Mano a Mano "Milonga de Porto Rico"

10 décembre 1992
02m 35s
Réf. 00703

Notice

Résumé :

MANO A MANO interprète "Milonga de Porto Rico" en direct. Ils sont rejoints par deux danseurs.

Type de média :
Date de diffusion :
10 décembre 1992
Personnalité(s) :

Éclairage

C'est Camille de Rhynal qui, en 1906, sur un pari fait avec un ami, fit venir de Buenos Aires Enrique Saborido qui allait enflammer tout Paris avec son tango (alors tango-milonga et tango-habanera, comme aperçu plus haut). Mais, comme le rock, le tango est une très longue histoire, une culture totale.

Rappelons que les rythmes de milonga des payadores (ces troubadours argentins venus de la campagne argentine vers la ville, qui pouvaient, pour quelques sous, improviser sur n'importe quel thème) rencontrent, en fin de XIXe siècle, à Buenos Aires, le rythme de habanera apporté par les marins des Caraïbes. Cette racine milonguera apporte au tango le sens de l'improvisation ; tandis que la racine havanaise l'enrichit de celle du contretemps et de la syncope. Les deux rythmes sont presque identiques et s'entremêlent aisément. S'ajoute à cela la canzonetta italienne, qui bonifie les mélodies. Le tanguillo espagnol apporte le sens inné de ce pays pour la chorégraphie. Les rythmes du candombé africain (à ne pas confondre avec le candomblé brésilien) ajoutent un certain esprit de transe qui habitera éternellement le tango et ses musiques. Puis le bandonéon allemand, souvent en mode mineur, complète la panoplie nécessaire à exprimer la nostalgie des émigrés loin de leurs femmes, et leur plainte du pays perdu. Enfin, le tango, suivant Enrique Santos Discépolo, rencontre Carlos Gardel (1890-1935, né à Toulouse) qui, lui, fit « monter le tango des pieds aux lèvres ».

À cette époque, le rythme de la milonga vu plus haut et qui était aussi connu des gauchos et des payadores, ce rythme de milonga rencontra le rythme de la habanera. La milonga et la habanera argentines se fondirent alors dans le tango. Et elles inspirèrent particulièrement les musiciens.

Ce rythme de milonga-habanera évolua encore, par exemple avec le grand bandonéoniste Piazzolla dont le rythme favori est encore un descendant des rythmes ancestraux :

Rythme Piazolla :

Le tango étant traité par ailleurs, nous nous contenterons ici d'une courte vidéo qui démontre, nous l'espérons assez clairement, le défi que nous nous sommes donné de parler par l'écrit de pas de danse et de rythme musical. Il faut bien écouter et longuement regarder cet extrait. Il s'agit seulement de l'exemple d'une milonga dansée par Coco Diaz et sa femme à Paris en 1992 : Mano a mano. Notez bien le rythme, répétitif, ici aussi rapide que la samba mais orchestré différemment, syncopé donc, strictement identique à la milonga-habanera, mais, à l'inverse, si gai. Il est aussi possible de vérifier que la forme de base de la milonga, comme du tango dit aujourd'hui « argentin », est un carré, souvent complété par un chassé argentin célèbre depuis plus d'un siècle. Le cavalier guide régulièrement un assemblé vers la droite suivi d'un pas en arrière... Tout ceci caractérisant cette forme de tango.

Contrairement à toutes les formes des danses que nous avons pu apercevoir et venant des Caraïbes, et en lien direct avec notre polka comme nous avons tenté de le démontrer, il faut au moins signaler une très importante particularité du tango, si ce n'est la particularité de cette danse de couple : c'est une danse totalement improvisée. Du pas à pas, en principe ! C'est Rodolfo Dinzel, très célèbre danseur et théoricien du tango de Buenos Aires qui nous a dit en 1991 : « Lorsque je fais un pas dans le tango, ma partenaire ne sait pas quel sera le suivant... Et moi non plus ! ». C'est évidemment « la grande classe ».

C'est probablement sous cette forme que le tango est arrivé en France, et son premier démonstrateur, Enrique Saborido, à qui l'on demanda de l'enseigner, dut probablement se plier à la mentalité française et européenne de l'époque qui consistait à répertorier « des figures et des pas ». Il fut, probablement, le premier à édulcorer le tango des origines, à tenter de le synthétiser, à en extraire des constantes. La prise en charge du tango par la compétition, dès son arrivée, a porté une grande atteinte à son intégrité : il fut découpé en figures et en pas, classés, écrits et répertoriés dans les manuels de danse de l'époque. Il se normalisa ainsi, et perdit son essence.

D'où sa résurgence en 1989, après le passage à Paris du spectacle Tango Argentino, avec le succès de ce qui prit alors le nom de « tango argentin » (comme s'il ne l'était pas par essence), pour le différencier clairement du vieux tango des dancings français où beaucoup de gens n'utilisaient qu'un seul pas répétitivement et dans toutes les occasions.

Ne pas oublier concernant le tango : la sphère tango est composée de la danse tango, incluant de nombreux styles différents ; mais aussi la danse appelée milonga visible dans l'extrait, et la valse argentine, mais qui n'est pas une valse ! La valse à la « sauce » argentine est un tango marché. Et pourquoi pas ? C'est la richesse du métissage. Encore un genre de « salsa » !

Christian Dubar

Transcription

(Musique)
Présentateur
Mano A Mano, Tango Joyeux , on est quitte ! Heu, alors, ce n’est pas l’heure prévue mais Aline Pailler bout, mais littéralement. Elle bout sur son siège, elle est presque en colère, malgré son sourire charmant,