Histoire du maloya

19 décembre 1998
01m 52s
Réf. 00600

Notice

Résumé :

A la Réunion évocation d'une musique traditionnelle le maloya. Pouvant être assimilé au blues, il a longtemps été censuré et n'a été reconnu qu'en 1981. Séquences de danseurs et chanteurs interprétant des rythmes issus de l'esclavage.

Type de média :
Date de diffusion :
19 décembre 1998
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Éclairage

A la Réunion le maloya se donne à voir et à entendre dans trois cadres sociaux de pratique [3] : dans le servis kabaré (rituel de commémoration des ancêtres d'origine afro malgache), dans lakour où l'événement est appelé kabar et est organisé dans la cour des habitants ou dans un espace public (lors d'un feu de camp sur la plage, derrière les usines) et su podium c'est à dire sur les scènes surélevées devant un public qui paye le plus souvent une entrée.

Ces trois cadres sociaux de pratique traduisent des manières d'être, de relations entre les participants qui sont implicitement définis et connus des habitués.

Un kabar à la Réunion désigne donc un rassemblement de personnes qui vont jouer et danser du maloya. C'est au cours de ces rassemblements que les plus anciens apprennent et donnent l'occasion aux plus jeunes de s'initier au maloya.

Nous voyons ici Gérose Barivoitse dit le Rwa Kaf (roi des cafres, cafre désignant le noir d'origine afro malgache à la Réunion) chantant un maloya dans un kabar chez l'habitant en 2012. C'est à l'occasion de fêtes familiales, de fêtes de fin d'année ou d'autres événements festifs que ces kabars sont organisés chez l'habitant.

Lo Rwa Kaf fait partie des piliers de la culture maloya avec Jules Manent dit Gramoun Bébé ou encore Julien Phileas dit Gramoun Lélé ou Gramoun Baba et son épouse Marie Marte Bazaline. Ces chantres du maloya, décédés à ce jour, laissent derrière eux un large héritage et presque tous ces acteurs culturels sont considérés comme les détenteurs de la tradition maloya issue du servis kabaré. Ainsi, pour beaucoup le servis kabaré est-il perçu comme le conservatoire du maloya.

Gérose Barivatse, Lo Rwa Kaf était chanteur musicien de maloya et conteur. Il a fait partie de ceux qui ont perpétué la pratique maloya à la Réunion pendant la période où cette musique et danse réunionnaise étaient officieusement interdites dans l'île. Dans les années 70, il était effectivement courant que des instruments de maloya soient confisqués et leurs pratiquants sanctionnés par une amende. Musique décrétée comme subversive, le maloya est de ce fait parfois moins connu du grand public mais il est pour les puristes un véritable pilier de cette culture réunionnaise. Lo Rwa Kaf a enregistré deux albums Somin galisé en 1992 et Tradition maloya en 1997.

Depuis 1981, le retour de la gauche au pouvoir rend au maloya sa totale liberté d'expression. Il ne va pas pour autant se diffuser sur les ondes radiophoniques elles aussi ouvertes. Le maloya gagnera lentement ses lettres de noblesse. Il est joué aujourd'hui sur toutes les scènes de l'île mais également sur les plus grandes scènes mondiales. De Gramoun Lélé qui a aussi bien joué au Québec, en Afrique, Nouvelle Calédonie, aux groupes plus récents comme Lindigo, Urbain Phileas (fils de Gramoun Lélé), le maloya s'exporte et séduit très largement les publics. En 2010, Danyel Waro le chantre du maloya par excellence a été primé au Womex award ; la plus grande distinction qui existe pour les musiques du monde. Véritable poète d'une langue créole qu'il a largement contribué à revitaliser, au-delà de son berceau de naissance, Danyel Waro a inspiré nombre de musiciens d'une nouvelle génération tels que Zanmari Baré, Jean Didier Hoareau.

[3] Florence Boyer, 2012. Mémoire de master 2. La danse maloya : étude anthropologique et choréologique d'une pratique culturelle réunionnaise

Florence Boyer

Transcription

Journaliste
Aujourd’hui vecteur du folklore réunionnais, le maloya est pourtant né loin de ces couleurs ensoleillées. C’est autour des usines sucrières que se rassemblent les individus déracinés pour épancher leur soif de communication et de liens culturels. Là, les paroles évoquent d’autres thèmes que la fête en ressassant les douleurs de l’exil.
(Musique)
Journaliste
Contraints de se taire et d’acquiescer les lois des maîtres, propriétaires des exploitations agricoles, ces hommes et femmes du XIXème siècle développent une musique comparée au blues des noirs américains.
(Musique)
Journaliste
Les paroles, dont la compréhension échappe à leurs surveillants, ils perpétuent ainsi une tradition orale.
(Musique)
Journaliste
Le tintement des piqueurs, [caillant messati], le battement des rouleurs hantent les alentours des cabanons où vivent les esclaves.
(Musique)
Journaliste
Mais il faudra plus d’une centaine d’années avant que ces cris de la nuit s’affranchissent du veto administratif pour se faire entendre sur les scènes de spectacle.
(Musique)
Journaliste
Les deux albums de Firmin Viry, enregistrés dans les années 70, constituent une première étape avant la reconnaissance officielle du maloya en 1981, année où les [fonds de kever] tels Danyèl Waro, Gilbert Pounia, Thierry Gauliris reprennent le flambeau de leurs ancêtres pour porter la flamme de leur musique réunionnaise dans le monde entier.