Voyage en Turquie, et entretien avec Michel Debré

29 octobre 1968
10m 18s
Réf. 00279

Notice

Résumé :

Le général de Gaulle accomplit un voyage officiel en Turquie du 25 au 30 octobre 1968. Le 29 octobre, il s'adresse par la radio-télévision au peuple turc.

Type de média :
Date de diffusion :
30 octobre 1968
Date d'événement :
29 octobre 1968

Éclairage

Du 25 au 30 octobre 1968, le général de Gaulle accomplit son dernier voyage officiel à l'étranger, accompagné par Michel Debré, et par son épouse. Il se rend en République de Turquie, répondant à l'invitation que le Général Cevdet Sunay - président depuis mars 1966 - lui avait adressée lors de sa venue à Paris, en juin de l'année précédente. Par cette visite, le président français approfondit largement la coopération culturelle, économique et politique entre les deux États : la France augmentera sensiblement son aide financière à la Turquie, et les deux présidents échangeront leurs vues sur les problèmes posés par la Tchécoslovaquie, le conflit israélo-arabe, le Viêtnam ou bien encore par la question de Chypre. Enfin, le développement de l'association de la Turquie et de la Communauté économique européenne sera un thème largement évoqué.

Le reportage, diffusé au cours du journal télévisé, retrace les deux derniers jours du voyage, que le général de Gaulle passe à Istanbul. Le 29 octobre, à l'occasion de la Fête nationale turque, il présente ses voeux au général Sunay et assiste au défilé organisé à cette occasion. Tandis que son ministre des Affaires étrangères Michel Debré signe des accords avec son homologue, de Gaulle enregistre quant à lui une allocution - diffusée le soir même - à destination du peuple turc : il y explique les raisons de son voyage puis achève son discours dans la langue de ses hôtes : " Chers amis turcs, à chacun de vous, en même temps qu'à votre patrie, j'adresse de tout mon coeur, au nom des Français, mes voeux de bonheur et de prospérité. Merci ! Bonne chance ! Vive la Turquie ! ".

Le reportage, après avoir retracé la journée du 30 octobre, propose une interview de Michel Debré qui fait le bilan de ce voyage officiel. S'il préfère ne pas parler de l'aide financière accordée à la Turquie (et qui est signifiée dans le communiqué franco-turc du 30 octobre 1968), il insiste néanmoins sur les autres accords de toutes sortes conclus entre les deux pays.

Aude Vassallo

Transcription

(Musique)
(Silence)
Charles de Gaulle
Je suis venu aussi pour resserrer avec vos dirigeants les rapports de nos deux pays, et notamment, pour développer leur coopération, au point de vue scientifique, technique, économique, culturel, dont dépend le progrès moderne. A cet égard, vous avez pour vous, le potentiel d'un vaste territoire et toutes les capacités d'un grand peuple, laborieux et courageux. Les Français ont pour eux d'importants moyens matériels et des valeurs intellectuelles considérables. C'est dire que tout engage nos deux pays à s'accorder dans les domaines pratiques. Et d'autant mieux que rien ne les oppose, que leur idéal commun, c'est l'équilibre et la paix, et qu'ils sont résolus, l'un et l'autre, dans tous les cas, à maintenir leur indépendance.
Traducteur
[Turc]
Charles de Gaulle
[Turc]
Inconnu 1
Ce sont les membres du Conseil ?
(Musique)
Inconnu 2
Les membres du conseil de l'amitié, oui.
Charles de Gaulle
Et voici un souvenir que je garde précieusement, je ne ferai pas un mauvais usage de la clé d'Ankara, je ne la livrerai à personne.
Journaliste
Monsieur le ministre, ainsi donc s'achève le séjour du Général de Gaulle en Turquie, et je crois que c'est l'heure du bilan. Un double bilan en quelque sorte, à la fois psychologique et matériel. Je crois que l'on pourrait tout d'abord aborder le problème psychologique de ce voyage.
Michel Debré
Vous avez raison, car les sentiments jouent beaucoup, en politique. Dans ce vieux pays qu'est la Turquie, mais aussi ce pays qui se modernise et qui se transforme, dans ce vieux pays, où depuis tant de siècles, nous avons des relations et que beaucoup de Français commencent à connaître, ne serait-ce que par le tourisme, la visite du Général de Gaulle, on peut le dire, a été un évènement. Que ce soit dans les rues d'Ankara, la ville neuve, la capitale ou que ce soit dans les rues d'Istanbul, l'ancienne Constantinople, des hommes, des femmes, de toute condition, de toute profession, de toute génération, à toute heure du jour, se sont précipités pour voir le Président de la République française. Si bien que nous pouvons constater, au-delà du prestige étonnant du Chef de l'Etat, du Général de Gaulle, la profondeur des sentiments qui unissent la Turquie à la France. Et voilà déjà qui, du point de vue psychologique, est fort important.
Journaliste
Alors, abordons le deuxième aspect de ce bilan, monsieur le ministre. Le communiqué final en donne les grandes lignes, il y a surtout cet accord de coopération franco-turc. Accord de coopération, que cela veut-il dire ? Est-ce une aide financière ?
Michel Debré
Non. Non, les conversations qui se sont déroulées ont porté sur beaucoup de problèmes, et des problèmes d'intérêt commun, et puis des problèmes de coopération, et il ne s'agit pas d'aide financière. Non. De quoi s'agit-il ? Il s'agit des rapports, entre un pays comme la Turquie, qui se développe et s'industrialise, et la France qui a des possibilités d'aider à ce développement et à cette industrialisation. En d'autres termes, la Turquie demande et souhaite des ingénieurs, des experts, des techniciens, pour pouvoir, dans certains domaines, et notamment le domaine qu'on appelle : les industries de pointe, mais aussi certaines autres, bénéficier de leur apport, de leur conseil. Ne croyez pas que cela soit indifférent à la France, en tant que telle. En aucune façon. En effet, dans le monde d'aujourd'hui, quand un pays veut développer ses ventes, veut exporter, et vous savez à quel point c'est nécessaire pour nous. Eh bien, il est indispensable, en présence d'un pays dont le développement est assuré et qui a besoin d'une aide pour ce développement, d'être parmi les pays qui aident, car c'est ainsi que l'on crée un courant de vente et, indirectement puis directement, nous en profitons. Voilà pourquoi un accord de coopération, scientifique et technique, comme celui qui vient d'être signé, est profitable aux deux parties.