Fête du 1er mai à Bagatelle

01 mai 1949
02m 27s
Réf. 00320

Notice

Résumé :

Lors d'une vaste manifestation sur la pelouse de Bagatelle à l'occasion de la fête du travail, le général de Gaulle revient sur la nécessaire participation des salariés à la marche et aux résultats des entrepriss.

Type de média :
Date de diffusion :
01 mai 1949
Type de parole :

Éclairage

La situation internationale, dominée par la guerre froide, ne cesse de se dégrader depuis 1947. Après le "coup de Prague" en 1948 et le blocus de Berlin (juillet 1948-mai 1949), l'Allemagne est désormais divisée en deux Etats, matérialisant la coupure de l'Europe de part et d'autre du rideau de fer et les communistes l'ont emporté en Chine où Mao a fondé en octobre 1949 la République populaire de Chine. La guerre d'Indochine fait rage. Après les Etats-Unis, l'URSS dispose depuis 1949 de l'arme atomique. La peur d'une troisième guerre mondiale augmente. En mars, l'appel de Stockholm condamne, au nom du mouvement de la Paix, la bombe atomique.

En France, la tension monte aussi dans la majorité de "troisième force" au pouvoir depuis le printemps 1947 et les ministres socialistes quittent le 4 février 1950 le gouvernement. De Gaulle sillonne plus que jamais la France pour expliquer les objectifs du Rassemblement du Peuple Français qu'il a fondé en 1947. Il insiste en particulier depuis le début de l'année sur le projet social du gaullisme. Ainsi, le 11 février, dans un discours, de Gaulle déclare :"En vérité, il n'y a que deux issues possibles : le Communisme ou l'Association". Le 15 mars, le RPF publie un avant-projet de loi sur l'Association Capital-Travail, revu et corrigé par de Gaulle lui-même. A Bagatelle, de Gaulle explique le 1er mai que "c'est bien la question sociale, toujours posée, jamais résolue, qui est à l'origine des grandes secousses subies depuis trente-cinq ans" et il ajoute, en cette fête du Travail, après avoir rappelé ce qu'est l'Association : "travailleurs ! C'est avec vous, d'abord, que je veux bâtir la France nouvelle".

L'avant-projet présenté en mars, base d'une proposition de loi RPF le 17 juillet 1951, est cependant très timide par rapport aux intentions initiales. Il n'aboutit pas et le projet social du RPF se radicalise à nouveau, au milieu des années 1950, sous l'impulsion de René Capitant, sans plus de succès. Ce projet ne disparaît pas du discours gaulliste sous la Ve République mais il est surtout développé par les "gaullistes de gauche" qui ne parviennent pas à le faire aboutir d'où un fossé croissant entre des hommes comme Capitant ou Vallon et la majorité des gaullistes dont Georges Pompidou en particulier qui n'y croit pas du tout.

Bibliographie :

Patrick Guiol, L'impasse sociale du gaullisme. Le RPF et l'Action ouvrière, Paris, Presses de la FNSP, 1985.

Bernard Lachaise

Transcription

Charles de Gaulle
Au niveau de la foule immense que voilà, on éprouve comme une révélation. " Je ne sais pas, disait, jadis, Louis Veuillot, quel souffle planant sur la multitude lui révèle qu'elle est une nation ". Nous tous, ici, en nous voyant nous-mêmes, nous connaissons que nous sommes un grand peuple qui s'assemble pour son salut. Ce qu'il faut, c'est abolir l'humiliante condition dans laquelle l'organisation économique dérivée tient la plupart des travailleurs. Ce qu'il faut, c'est faire cesser le système en vertu duquel les intérêts de ceux qui apportent à la production leur travail s'opposent à ceux qui y apportent soit leurs biens, soit leur autorité et qui fait que dans une entreprise, les ouvriers sont des instruments et non pas des participants. Ce qu'il faut créer et faire vivre, c'est l'association du travail, du capital et de la direction qui confère à chacun la dignité d'un sociétaire responsable et bénéficiaire du rendement collectif pour sa part et à son échelon. Naturellement, on ne fera pas ça si on ne passe pas outre au sectarisme des spécialistes de la lutte des classes et, en même temps, aux routines de certains dirigeants et de certains capitalistes qui voudraient voir les affaires marcher toujours comme au temps de papa.