Le Fromage de Hollande, Fernand Raynaud

29 octobre 1968
03m 36s
Réf. 00232

Notice

Résumé :

Dans ce sketch enregistré en 1968, Fernand Raynaud incarne un épicier chauvin, qui refuse systématiquement de vendre des produits étrangers, préférant faire tester à son client les bons produits français. A noter que, au début du sketch, le comique s'interrompt pour rappeler à l'ordre une spectatrice, qui se remaquille pendant qu'il joue.

Date de diffusion :
29 octobre 1968
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Éclairage

Fernand Raynaud est né le 19 mai 1923 à Clermont-Ferrand, dans une cité ouvrière. Son père est contremaître chez Michelin. Il a une sœur, de treize ans son aînée, Yolande, qui apparaîtra souvent dans ses sketches.

A quinze ans, après son certificat d'études, il arrête ses études. Il annonce sa volonté de devenir comédien, ce qui provoque une dispute avec son père, suite à laquelle il monte à Paris, où il a l'intention de devenir mime. Il fait ses débuts dans de petits cabarets de la capitale, et, au début des années cinquante, rencontre Jean Nohain. Cet homme de télévision a créé l'émission 36 chandelles, présentée en direct depuis une salle de théâtre parisienne, et qui accueille les artistes du moment. Fernand Raynaud y participe, rencontre de grandes figures du spectacle comique, comme Roger Pierre et Jean-Marc Thibault, Darry Cowl ou encore Raymond Devos. Dix ans plus tard, il connaît un grand succès avec le spectacle Fernand Raynaud Chaud, qui reste à l'affiche dix-huit mois au Théâtre des Variétés, avant de partir en tournée à travers le monde. Il expérimente également le théâtre et le cinéma, et, en 1970, propose un spectacle de mime au Théâtre de la Ville, Une heure sans paroles. Le 28 septembre 1973, il trouve la mort dans un accident de voiture.

Fernand Raynaud est connu pour ses personnages de benêts, de naïfs, qu'il fait exister grâce à son talent de mime. Il travaille très précisément les postures de ses personnages, ainsi que les expressions de leurs visages. Campant très souvent plusieurs personnages dans un même sketch – particulièrement dans les scènes qu'il a tournées pour la télévision – il peut signifier le passage d'un personnage à l'autre par un simple changement de posture. Mais l'humour de Raynaud est également fondé sur les clichés de son temps. Il s'intéresse donc naturellement à la prévention routière (un sketch met en scène un automobiliste ivre buvant à la bouteille, conduisant sans permis...), à l'immigration et au racisme ambiant (le sketch Le douanier, où le personnage ne cesse de répéter « je ne suis pas raciste, moi, je suis douanier », expliquant comment il a jeté hors de son village le boulanger, condamnant ses concitoyens à ne plus manger de pain) ou encore à la prétendue richesse des paysans (en mettant en scène un gros paysan aux multiples activités, se plaignant sans cesse de ne pas gagner d'argent, mais achetant des diamants à sa femme et se présentant sous le nom de Crésus)... Il campe aussi souvent des personnages désagréables – chauvins, racistes, râleurs – mis face à des benêts qui mettent en reliefs leurs défauts. Il se plaît à travailler à partir de personnages stéréotypés, et construit ses sketches sur un comique de répétition. Dans nombre de ses sketches, une expression revient comme un refrain, et se trouve brusquement retournée ou détournée lors de la chute du sketch. Le plus exemplaire à ce titre est le sketch Le plombier, où un plombier rend visite à une de ses clientes, à laquelle il imagine parler derrière la porte, alors qu'en réalité, il parle au perroquet, qui ne cesse de demander « Qui c'est ? » au plombier, de plus en plus irrité de répondre « c'est l'plombier ». Lorsque la cliente rentre et, voyant un homme effondré devant sa porte, se demande « qui c'est ? », c'est le perroquet qui lui répond « C'est l'plombier ». Comme cet échange, certains extraits des sketches de Fernand Raynaud sont devenus proverbiaux : « Tonton, pourquoi tu tousses ? » ; « bourreau d'enfants », ou encore « un certain temps », réponse donnée par des aspirants soldats à un caporal qui s'obstine à leur demander le temps de refroidissement du fût du canon. Dans le sketch Le Fromage de Hollande également, une phrase revient en boucle ; la proposition de l'épicier. Celui-ci, face à chaque demande, donne au client un équivalent français du produit demandé, en répétant « vous allez l'emporter chez vous, vous allez l'essayer, et si ça ne vous plaît pas, vous me le ramènerez, c'est bon ? ». Du fromage aux sardines, cette phrase finit par s'appliquer à la sœur de l'épicier.

Anaïs Bonnier

Transcription

(Musique)
Fernand Raynaud
Bonjour, bonjour, bonjour monsieur l’épicier ! Bonjour ! Je voudrais du fromage de Hollande. De où ? De Hollande ! Ecoutez Monsieur, nous sommes dans une épicerie située dans le Cantal. Le Cantal, c’est un département placé au milieu de la France. Nous avons, nous, en France, la chance d’avoir 287 sortes de fromages. C’est la seule chose qui nous sauve par rapport à l’étranger, pas la diplomatie, le fromage. Aussi vrai que cette dame regarde son poudrier et qu’elle regarde la beauté qu’elle a. Merci Madame. C’est un peu long. J’en ai pour deux minutes. Et puis après, je m’en vais... Non, mais c’est excitant pour un artiste de voir une dame qui est là... Je parle à la dame qui a les cheveux gris et les lunettes noires. Et voila. Je ne vous ai pas dérangé ? Nous sommes dans le Cantal, un département placé au milieu de la France. Nous avons 287 sortes de fromages. Et vous voulez du fromage de... ? De Hollande. Ecoutez Monsieur, moi, je vais vous donner du fromage français. Et comme tous les Français, je ne suis pas chauvin. Je sais même pas si à Mexico, on a eu cette médaille d’or, j’en sais rien. C’est pour vous dire si je suis pas chauvin. Moi, je vais vous donner du fromage français Monsieur. Vous allez l’amener chez vous. Vous allez l’essayer. Et s’il ne vous plaît pas, vous le ramènerez. Ca va ? Ca va. Et avec ça, qu’est ce qu’il vous faut ? Je voudrais de la morue d’Ecosse.
(Rires)
Fernand Raynaud
Ecoutez Monsieur, nous, en France, nous avons des marins bretons, qui vont en Islande, chercher de la morue française, et vous voulez de la morue ? De la morue d’Ecosse. On a de la morue française Monsieur. Vous allez l’amener chez vous. Vous allez l’essayer et si elle ne vous plait pas, vous la ramènerez. Ca va ? Ca va. Et avec cela, qu’est ce qu’il vous faut ? Je voudrais de la sardine du Portugal. Vous voulez pas du couscous canadien non ?
(Rires)
Fernand Raynaud
Ou du [chiporlata] du Venezuela. Hein ? Je veux de la sardine du Portugal. Moi, je vais vous donner de la sardine française, Monsieur. Ca, c’est français. Je suis pas chauvin comme tous les Français. Vous allez l'amener chez vous. Vous allez l’essayer et si elle vous plaît pas vous la ramènerez. Ca va ? Faut pas vous énerver pour ça. Oh ! Qu’est ce que vous êtes susceptible alors ! J’avais fait la connaissance de votre sœur qui est... au demeurant très gentille. Nous avions sympathisé. Je voulais me marier avec, mais si elle a le même caractère que vous, je crois que je vais choisir une Italienne. Une Italienne ? Vous voulez critiquer ma sœur ? Yoyo ! Viens ici. Tu es en peignoir. On s’en fout. Viens ! Regardez ma frangine. Elle est pas jolie ma sœur ? Regardez-moi ça, si c’est mignon. En dirait des danseuses anglaises. Regardez ces dents, regardez ces petits pieds. Regardez… C’est bien simple. Amenez la chez vous, vous allez l’essayer et si elle vous plaît pas, vous la ramènerez. Ca va ?
(Musique)