Les Précieuses ridicules, mises en scène par Jérôme Deschamps et Macha Makaïeff au Théâtre National de Bretagne

03 mai 1997
02m 25s
Réf. 00281

Notice

Résumé :

Les comédiens François Morel et Bruno Lochet conversent avec des passants pour mieux observer leurs contemporains, comme le faisait Molière. Extraits du spectacle, scènes 4, 7 et 9. Interview de Jérôme Deschamps qui revendique pour la pièce un propos actuel, ancré dans une société où les gens peinent à s'inscrire.

Date de diffusion :
03 mai 1997
Source :
A2 (Collection: MIDI 2 )
Compagnie :
Fiche CNT :

Éclairage

Lorsque la troupe de Molière crée Les Précieuses ridicules en 1659, la petite pièce en un acte est conçue comme une « farce », une courte comédie légère jouée à la suite d'une pièce longue pour compléter la soirée théâtrale. Présentée à la suite d'une reprise de Cinna de Corneille, la pièce connaît un vif succès et offre de belles recettes à la troupe. En l'écrivant, Molière reprend un sujet d'actualité déjà traité par d'autres, particulièrement les Italiens, qui avaient joué en 1656 une Précieuse au Théâtre du Petit-Bourbon : le snobisme et les originalités de langage inspirés par les salons de Mme de Rambouillet et de Mme de Scudéry donnaient matière à de riches effets comiques. Pour autant, Molière se défend d'avoir voulu attaquer ce que la démarche précieuse comporte de révolte et de recherche littéraire ; les cibles de sa comédie seraient plutôt les lectrices provinciales et naïves des romans précieux, sortes de Mme Bovary avant la lettre.

Pour cette pièce, où il reprend son rôle de Mascarille déjà applaudi dans L'Etourdi et Le Dépit amoureux, Molière s'offre un duo de choix avec le farceur Jodelet, vedette vieillissante qu'il est parvenu à débaucher de la troupe du Marais. Le texte garde quelques traces des marges d'improvisation ménagées par Molière pour son illustre camarade.

Devenue célèbre par la diffusion télévisée des Deschiens au cours des années 1990, la troupe de Deschamps et Makaïeff s'approprie la comédie de Molière avec naturel, revendiquant un statut théâtral comparable à celui d'un farceur comme Jodelet. Jérôme Deschamps se réjouit de proposer un théâtre d'acteurs, où les plages d'improvisation sont exploitées et où le public est heureux de retrouver des comédiens qu'il a aimés dans d'autres spectacles. Pour autant, le plaisir du jeu n'empêche pas la violence sociale qui se joue dans la pièce de Molière, bien loin de la conversation de salon que l'on y voit trop souvent.

Céline Candiard

Transcription

Présentateur
Rennes, la célèbre troupe de Jérôme Deschamps et de Macha Makeïeff est sur les planches avec Les Précieuses ridicules de Jean-Baptiste Poquelin, davantage connu sous son pseudonyme de Molière. Les Deschiens jouent chaque grand rôle en alternance et cela pour retrouver l’esprit de Molière. Reportage, Thierry Hay, Christian Leroux.
Journaliste
Des chiens de chasse, de véritables oiseaux de proie qui ne veulent rien perdre des gros et petits travers de notre société et qui laissent traîner non seulement leurs yeux mais aussi leurs oreilles ; ce qui parfois vaut la peine car la réalité dépasse souvent la fiction.
Inconnu 1
Oui d’accord, mais vous mélangez du crottin avec de l’eau et vous dites que ça ralentissait la brique. Oui mais il y a plus de crottin.
Inconnu 2
Ah non. On mettait du crottin, nous.
Journaliste
Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, lui aussi observait son époque.
Yolande Moreau
Ma cousine donne dans le vrai de la chose. Le moyen de bien recevoir des gens qui sont tout à fait incongrus en galanterie.
Journaliste
Comme le ridicule n’a jamais tué personne, il est toujours d’actualité alors Deschiens, c’est-à-dire Deschamps, monte Les Précieuses ridicules à sa façon.
(Bruit)
Comédien 1
Ah, là, c’est mieux.
Comédien 2
Que vous semble de ma petite voix ?
Journaliste
Deux valets se jouent de deux péronnelles snobinardes qui refusent tous les prétendants, au prétexte qu’ils ne sont pas assez branchés, pas assez précieux, pas assez lookés.
Comédien 2
La trouvez-vous congruente à l’habit ?
Journaliste
Molière d’actualité, réponse Deschamps mais à la ville.
Jérome Deschamps
Ce qui fait que la pièce me semble d’actualité c’est que les gens sont vraiment perdus, les gens savent pas très bien ce qu’ils font aujourd’hui dans la société et donc savent pas très bien quoi trouver pour s’inscrire. Il y a quelque chose qui fait rire mais qui fait rire pour ne pas pleurer.
Yolande Moreau
Une tête irrégulière en cheveux et un habit qui souffre une indigence de rubans. Oh, mon Dieu ! Mais quels amants sont ceux-là ?
Journaliste
Les mots de Molière, parfaitement respectés, l’esprit Deschiens, une succession de petits riens qui changent tout.
Comédien 3
Ben oui !