Canard Pékinois de Josef Nadj

22 janvier 1988
01m 15s
Réf. 00813

Notice

Résumé :

Canard pékinois est la première pièce de Josef Nadj, artiste protéiforme chorégraphe, plasticien et photographe.

Date de diffusion :
22 janvier 1988
Source :
FR3 (Collection: Normandie soir )
Artistes et personnalités :

Éclairage

Canard Pékinois (1987) signe l'acte de naissance chorégraphique de Josef Nadj ( né en 1957). Cette première pièce, présentée au Théâtre de la Bastille, à Paris, par un jeune homme à peine repéré comme interprète chez François Verret, impose son nom d'un coup, d'un seul. Depuis, Nadj, nommé directeur du Centre chorégraphique national d'Orléans en 1995, n'a pas quitté l'affiche. Un succès national et international pour cet artiste, par ailleurs plasticien et photographe, dont l'oeuvre chorégraphique déroule les chapitres du roman de la vie d'un Européen, obsédé par ses racines et son passé. Lorsque Nadj, fils d'un charpentier et petit-fils de paysans, dit "qu'il danse sa mémoire", la formule est à prendre au pied de la lettre et dans son extension imaginaire.

Un exemple concret de cette immense relecture spectaculaire opérée par Nadj de sa vie. Dans ses pièces - plus d'une vingtaine depuis 1987-, mais aussi dans ses dessins et ses installations plastiques, il pose souvent une table en bois. Cet objet rappelle la table de son grand-père. Celle-ci était dissimulée par une nappe sous laquelle une petite étagère accueillait un livre. Evidemment, le livre, la lecture et la littérature - de Bruno Schulz à Franz Kafka en passant par Raymond Roussel et Henri Michaux- sont au coeur du processus de travail de Nadj.

Avec Canard Pékinois, Nadj pose la première pierre de la grande saga de son village, Kanizsa, bourgade de 12 000 habitants située en Voïvodine (région d'ex-Yougoslavie aujourd'hui en Serbie). Enfant, Nadj s'entraînait aux arts martiaux dans un théâtre où une troupe d'acteurs rêvait de partir en Chine et finit par se suicider. Un an plus tard, dans Sept peaux de rhinocéros, il évoquait l'agonie de son grand-père tandis que dans Les Echelles d'Orphée (1992), il rend hommage aux sapeurs-pompiers de sa ville qui gagnèrent le championnat des pompiers à Turin en 1911. Récemment, Les Corbeaux (2009), pièce inspirée par les corbeaux de sa région, ajoute encore un chapitre au roman fantasmé de sa ville et de sa région.

Les quelques images du reportage donnent la tonalité fantastique de l'oeuvre. Jeune mariée trimballée dans une relation acrobatique avec un homme, gestuelle sèche et fragmentée... La figure féminine, souvent habillée en blanc, apparaît régulièrement dans les spectacles de Nadj tandis que les hommes, généralement en costards noirs, se jettent dans une danse expressive, nourrie de lutte gréco-romaine, d'art martial et de mime. La gestuelle hachée de Nadj électrise un théâtre dansé très singulier, sarabande au ton acide et burlesque, menée par des personnages désarticulés. Les décors, souvent bâtis à partir de matériaux bruts, transforment le plateau en espace magique de mutation. Le théâtre dans le théâtre, les scènes-gigognes, les puzzles, les engrenages, font partie des motifs de prédilection du chorégraphe.

La formation de Nadj passe aussi par la peinture. Il raconte qu'il avait 11 ans lorsqu'il eut la chance d'exposer ses premières toiles dans sa ville natale. C'est à l'école des Beaux-Arts de Novi-Sad, puis de Budapest, qu'il poursuivra son apprentissage. Chorégraphe, il continue à dessiner, proposant parallèlement à certains de ses spectacles des expositions.

Josef Nadj débarque en France en 1980. Il suit des cours de mime auprès d'Etienne Decroux et de Marcel Marceau, puis collabore aux spectacles des chorégraphes François Verret et Mark Tompkins. La même année que sa nomination au CCN d'Orléans, il met en scène, à la demande de Bernard Turin, directeur du Centre national des arts du cirque de Châlon-en-Champagne, Le Cri du caméléon. Depuis, ce cri est devenu celui de ralliement de toute une nouvelle génération d'artistes de cirque, mixant danse, théâtre, arts visuels et... cirque. En 2006, En 2006, artiste-associé du festival d'Avignon, il crée Asobu ( "jeu" en japonais), inspiré par l'œuvre de l'écrivain et du peintre Henri Michaux, dans la Cour d'honneur du Palais des papes. La même année, à l'Eglise des Célestins, Josef Nadj se livre à une performance somptueuse avec le plasticien Miquel Barcelo intitulée Paso Doble. Devant un mur de boue, couvert de terre, Nadj modèle en direct son talent de performer, de danseur et de plasticien. Avec Angelin Preljocaj, José Montalvo et Dominique Hervieu, Philippe Decouflé, Josef Nadj fait partie des chorégraphes qui tournent le plus en France et à l'étranger.

Rosita Boisseau

Transcription

(Silence)
(Musique)