Birgit Nilsson et Jon Vickers chantent Tristan et Isolde

21 novembre 1974
04m 51s
Réf. 01014

Notice

Résumé :

La plus emblématique de toutes les productions des Chorégies d'Orange est peut-être ce Tristan et Isolde de Richard Wagner interprété en 1974 par les plus grands chanteurs wagnériens du moment, Birgit Nilsson et Jon Vickers, sous la direction de Karl Böhm, et dans une mise en scène très dépouillée de Nikolaus Lehnhoff. Ils chantent ici un extrait du gigantesque duo d'amour du IIe acte.

Date de diffusion :
21 novembre 1974
Source :

Éclairage

Le théâtre antique d'Orange est l'un des plus imposants vestiges de l'Empire romain qui ait survécu en Gaule. Ses gradins, pouvant accueillir jusqu'à 8500 spectateurs, et son fameux mur, hélas dépouillé de son ornementation originale de colonnes et de statues, forment aujourd'hui encore un lieu à l'acoustique exceptionnelle, ce qui a permis dès le troisième tiers du XIXe siècle leur réappropriation pour des représentations théâtrales, des concerts et des opéras souvent mémorables, dont le présent Tristan et Isolde de Wagner, filmé intégralement en 1974, a été l'un des sommets absolus.

Restauré à partir de 1825, le Théâtre antique voit ses premières représentations estivales dès 1860. Des "fêtes romaines" sont instaurées en 1869, inaugurées avec Joseph de Méhul, que suivent Norma de Bellini et Le chalet d'Adolphe Adam en 1874. Mais c'est en 1902 que sont instituées les Chorégies, qui proposent aussi bien des représentations théâtrales du grand répertoire classique (comme Phèdre de Jean Racine avec Sarah Bernhardt en 1903) confiées aux membres du Théâtre français, que des représentations lyriques données par la troupe de l'Opéra de Paris. Une soixantaine de soirées d'opéra sont ainsi montées en un siècle, dont majoritairement ceux de Gluck, Gounod et Berlioz.

En 1971, à l'initiative de Jacques Duhamel, ministre de la Culture audacieux, sont fondées les Nouvelles Chorégies, avec pour charge de donner chaque été opéras et concerts d'un niveau exceptionnel, privilégiant la qualité évènementielle à la quantité, contrairement à ce qu'on pratique aux Arènes de Vérone. La direction artistique en est confiée à Jacques Bourgeois et Jean Darnel, qui y invitent les plus prestigieuses distributions possibles pendant une dizaine d'années, alignant les noms de Monserrat Caballe (Le Trouvère, Norma), Jon Vickers (Tristan et Isolde, Salomé, Norma, Otello, Fidelio), Birgit Nilsson (Tristan, La Walkyrie), Leonie Rysanek (Salomé, La Walkyrie...), Grace Bumbry (Aïda, Macbeth...), James King (Lohengrin) ... et les chefs aussi prestigieux que Karl Böhm, Rudolf Kempe, Zubin Mehta, Lorin Maazel...  et en proposant des mises en scenes adaptées à l'échelle vertigineuse du lieu.

La plupart de ces représentations sont filmées par Pierre Jourdan, parfois dans des conditions difficiles - surtout quand le mistral se lève, comme c'est le cas lors de ce Tristan mémorable, où les micros souffrent énormément de la puissance du vent.

À partir des années quatre-vingt, la programmation, reprise par Raymond Duffaut, se fait moins élitiste et plus populaire, présentant encore Le Ring, Boris Godounov ou Elektra, mais surtout, et de façon répétitive, Faust, Traviata, Aïda, Carmen, avec des artistes de moindre renom autour de quelques stars françaises, comme Roberto Alagna.

En 1974, les protagonistes de ce Tristan et Isolde historique - qu'on a baptisé un peu rapidement en France du nom de "Tristan du siècle" - sont la suédoise Birgit Nilsson, à l'époque la plus grande soprano dramatique, qui chante au Festival de Bayreuth de 1954 à 1970, et le ténor canadien Jon Vickers, célèbre pour ses incarnations wagnériennes à New-York, Londres, et Bayreuth (en 1958 et 1964). Deux "stars"qui curieusement n'ont auparavant chanté ces rôles ensemble qu'une seule fois à Buenos-Aires. Karl Böhm, qui va fêter ses 80 ans un mois plus tard, dirige ce soir-là un Orchestre National de l'ORTF mis en grande difficulté par le vent. Karl Böhm est l'un des plus grands chefs d'orchestre du XXe siècle, et s'illustre à Bayreuth également en y dirigeant Tristan et Isolde, Les Maîtres chanteurs de Nuremberg, Le Ring, Le Hollandais Volant, de 1962 à 1971. Quand à Nikolaus Lehnhoff, ancien assistant de Wieland Wagner à Bayreuth, il est au début d'une carrière remarquable, dont le premier fait d'armes est la fameuse mise en scène de La femme sans ombre à l'Opéra de Paris en 1972. Son cycle des opéras de Janacek, comme sa production de Tristan et Isolde au Festival de Glyndebourne dans les années 1980-2000, sont restés célèbres.

Pierre Flinois

Transcription

(Musique)