Alain Françon met en scène Le Canard sauvage d'Ibsen à la Comédie-Française

25 décembre 1993
02m 27s
Réf. 00067

Notice

Résumé :

En 1993, Le Canard sauvage d'Henrik Ibsen entre au répertoire de la Comédie-Française dans une mise en scène d'Alain Françon. La pièce décrit la mise à bas des illusions par un idéalisme forcené. Extraits du spectacle, interviews du metteur en scène ainsi que des comédiens Jean Dautremay et Jean-Yves Dubois.

Date de diffusion :
25 décembre 1993
Source :
FR3 (Collection: 19/20 )
Fiche CNT :

Éclairage

Né en 1828 et mort en 1916, Henrik Ibsen était un dramaturge norvégien. Il est l'auteur de vingt-six pièces à travers lesquelles s'expriment régulièrement ses fortes prises de position politiques. Son théâtre, qui met en scène des figures contemporaines, historiques ou folkloriques, s'intéresse à la place de l'individu au sein de la société. Il développe une esthétique qui progressivement s'éloigne du naturalisme pour se rapprocher du symbolisme.

Le Canard sauvage est une pièce en cinq actes écrite en 1884. Elle s'ouvre au moment du retour de Gregers Werle, jeune idéaliste, en sa ville natale après une longue absence. Fidèle à ses convictions, le jeune homme entreprend de dévoiler à Hjalmar Ekdal, son ami d'enfance, une vérité que tous refusent de voir. Réduisant à néant les illusions de chacun, ses révélations entraînent l'effondrement de tout un monde. La présence du « canard sauvage », volatile blessé recueilli par la famille Ekdal, symbolise l'immobilisme funeste dans lequel le présent des personnages semblait empêtré. Le reportage, diffusé lors du « 19/20 » (France 3) du 25 décembre 1993, met en avant l'entrée de la pièce au répertoire de la Comédie-Française, dans une mise en scène d'Alain Françon et une traduction de Terje Sinding. La scénographie est conçue par Jacques Gabel, la musique par Denis Levaillant et les costumes par Patrice Cauchetier. Jean-Yves Dubois joue le rôle de Gregers Werle. Hjalmar Ekdal est interprété par Jean-Baptiste Malartre, Gina, sa femme, par Martine Chevallier, Hedvig, sa fille, par Anne Kessler.

Dans un entretien, Alain Françon souligne l'affrontement entre, d'une part, l'idéalisme aveugle et, d'autre part, l'amertume de la désillusion. Jean Dautremay, qui interprète le personnage du médecin Relling, revient sur l'affirmation capitale qu'il énonce au dernier acte et selon laquelle le « mensonge vital » assure le salut de l'homme qui ne saurait affronter la réalité. Jean-Yves Dubois rappelle quant à lui la cruauté jubilatoire de la pièce qui, par ailleurs, n'est pas dépourvue d'humour.

L'extrait d'une conversation entre Hjalmar et Gregers est issu de l'acte III ; celui de la dispute entre Hjalmar et sa femme se rapporte à l'acte IV.

Marie-Isabelle Boula de Mareuil

Transcription

Présentatrice
Un évènement à la Comédie-Française où seules certaines œuvres sont jouées. Après un véritable parcours du combattant, la pièce du dramaturge norvégien Henrik Ibsen, Le Canard sauvage entre donc au répertoire. Une pièce assez sombre sur le conflit entre mensonge et vérité. Dominique Poncet, Hervé Guttmann.
Comédien 1
Retirez à un homme ordinaire son mensonge vital, vous lui enlevez en même temps le bonheur.
Jean Dautremay
[Reling] dit une chose fondamentale par rapport à la philosophie de l’époque : mieux vaut mentir et continuer à vivre que de rester dans une réalité qui nous échappe et dans laquelle on ne peut pas continuer à vivre.
Journaliste
Peut-être qu’il s’agit-là dans ce Canard sauvage d’une tragédie, la tragédie des gens ordinaires qui tentent de vivre comme ils peuvent avec leurs mensonges. Regardez-les ces personnages pathétiques inventés par Ibsen. Ce sont vous et moi, ils sont notre miroir.
Comédien 2
Tu appelles ça comme tu veux, je ne peux pas te dire comme je suis heureux de ce que tu m’apprends sur mon père.
Alain Françon
Je crois qu’il a écrit ça à un moment où il était vraiment en colère et en rage et qu’en même temps, il avait fait lui-même à travers ses pièces mais même dans la vie, un peu le tour de tout ce qui pouvait concerner l’idéal ou son idéal et que... je crois qu’il avait plus grande confiance comme ça en l’humanité.
Comédien 3
Quand j’ai vu mon père sous les verrous, ce fut le début d’un véritable calvaire. J’avais les stores baissés à mes deux fenêtres, dehors le soleil continuait de briller, je n’y comprenais plus rien. Les gens continuaient à marcher dans la rue, à rire, à parler de choses.
Jean-Yves Dubois
C'est un travail vraiment sur un fil, une tension très interne, je pense que si nous comédiens, nous arrivons à faire véritablement ce qui est proposé, ce qu'on propose quoi... alors les gens dans la salle vont avoir un bonheur entre ce qui est effrayant, cruel je dirais, puis entre le plaisir d’apercevoir la cruauté chez les autres ou chez soi-même, quoi...
Comédienne
Parce que tu étais dans une mauvaise passe quand tu m’as remplacé… [inaudible]
Journaliste
Dans cette mise en scène signée Alain Françon, le grotesque affleure souvent et donc le rire aussi. Dans la vie, l’homme parfois, Dieu merci, arrive à se moquer de lui-même, c’est ce qui le rend touchant, poignant, comme ce spectacle.
Comédien 4
J’étais bien à la maison !