Jeanne Laurent à propos de Charles Dullin et du Grenier de Toulouse

29 avril 1985
01m 32s
Réf. 00390

Notice

Résumé :

Jeanne Laurent raconte l'intervention de Charles Dullin en faveur de la troupe du Grenier de Toulouse. Elle évoque les difficultés des jeunes compagnies pour survivre et l'épisode de qui a permis au Grenier de Toulouse de poursuivre son travail.

Date de diffusion :
29 avril 1985
Source :

Éclairage

Jeanne Laurent (1902-1989) est à l'origine de la mise en place d'une politique étatique de décentralisation théâtrale. En 1939, elle est nommée au secrétariat d'Etat aux Beaux-Arts, puis en 1946 à la sous-direction des spectacles et de la musique à la direction générale des Arts et Lettres. Elle reste à ce poste pendant six ans, ce qui lui permet d'accompagner la création des premiers Centres Dramatiques Nationaux. Elle aide également le Théâtre National Populaire et le Festival d'Avignon. Son action permet à la décentralisation de s'établir de manière pérenne, notamment grâce à des subventions accordées à plusieurs compagnies. Elle met également en place le concours des Jeunes compagnies qui est à l'origine de la rencontre de beaucoup de compagnies de différentes régions entre elles et avec des professionnels. Tous les Centres Dramatiques reposent sur une troupe régionale existante, souvent primée par le concours des Jeunes Compagnies. En 1952, elle est mutée au Service universitaire des relations avec l'étranger et l'outre-mer, notamment à cause des critiques que sa politique reçoit de la part des directeurs de théâtres parisiens et d'une partie de la presse.

En 1949, la troupe du Grenier de Toulouse, dirigée par Maurice Sarrazin, devient le Centre Dramatique du Sud-Ouest. Il aura fallu que Charles Dullin intervienne auprès de Jeanne Laurent, proposant d'en être le co-directeur, pour que ce Centre voie le jour. Juste avant la création du Centre Dramatique, le Grenier de Toulouse est dans une situation catastrophique. Sans aide il devra cesser son activité rapidement. Maurice Sarrazin envoie alors un courrier à plusieurs acteurs de la vie culturelle française pour les informer de la situation du Grenier. Charles Dullin, qui estime beaucoup le travail de cette jeune troupe, refuse de la voir s'éteindre ainsi, et va plaider leur cause auprès de Jeanne Laurent. Ce sera sa seule intervention auprès d'elle en ce qui concerne les troupes de la décentralisation théâtrale. Il restera longtemps co-directeur du Centre Dramatique du Sud-Ouest sur le papier, même si dans les faits, il n'interviendra jamais dans la gestion de Maurice Sarrazin.

Sidonie Han

Transcription

Journaliste
Lorsque vous-même vous avez mis en place les premiers centres dramatiques, Dullin a eu un rôle aussi de, d’inspirateur ou… ?
Jeanne Laurent
Il n’est intervenu qu’au moment où il y a eu un problème concernant une jeune troupe toute jeune et provinciale, c’est celle du Grenier de Toulouse. Il savait que ces jeunes gens n’avaient pas la formation traditionnelle, n’avaient pas la formation qu’il exigeait des jeunes gens qui venaient chez lui, mais il était très ému par la qualité de poésie de leur spectacle. Et il m’a dit, puisque vous avez des crédits pour des troupes en province, il faut empêcher de mourir la troupe du Grenier qui, en 48-49, était en train de mourir car, pour les troupes, il y a ce moment de jaillissement, les troupes qui se forment spontanément, le jaillissement de jeunes gens qui travaillent comme travaillent des amateurs. Et puis un jour, on a vieilli, on a des obligations ; et à ce moment-là, il faut se préoccuper de ressources que l’on tire normalement de son activité de théâtre si l’on peut. Sinon, on est obligé de renoncer, de prendre une, évidemment, une autre carrière. Et au moment où le Grenier allait se défaire, il m’a dit, il faut absolument essayer de les sauver.