Stéphane Lissner prend la direction du Festival d'Aix-en-Provence

18 juillet 1998
04m 01s
Réf. 01058

Notice

Résumé :

Dans un reportage en direct d'Aix-en-Provence, en juillet 1998, Bruno Albin s'entretient avec Stéphane Lissner, nouveau directeur du Festival d'Aix. Ce dernier évoque les réformes qu'il met en œuvre dès ce premier été, notamment la création de l'Académie européenne de musique. De courts extraits de deux productions, Curlew River et Didon et Enée, ponctuent ses propos.

Date de diffusion :
18 juillet 1998
Source :
A2 (Collection: JA2 20H )

Éclairage

En 1998, soit 50 ans après sa fondation, le Festival d'Aix-en-Provence connaît une mue profonde dûe aux orientations prises par son nouveau directeur, Stéphane Lissner. Ce dernier s'est illustré précédemment lorsqu'il était à la tête du Théâtre du Châtelet, à Paris, où il a mené pendant neuf ans une politique de prestige, invitant les plus grands chefs et metteurs en scène à signer des productions qui ont marqué leur époque.

Lorsqu'il prend la tête du Festival d'Aix-en-Provence, ce dernier sort d'une période de turbulences, où des problèmes financiers l'ont progressivement contraint à restreindre ses ambitions et son envergure internationale. Fort d'un soutien renouvelé des collectivités publiques et d'un nouvel accent mis sur le financement privé (à travers le mécénat) et les coproductions (qui permettent de partager les coûts des spectacles en s'associant à d'autres institutions), Stéphane Lissner rend de son lustre à la manifestation, qui va effectivement connaître une seconde jeunesse.

S'inspirant de l'initateur du Festival, Gabriel Dussurget, Lissner remet la jeunesse au cœur de la manifestation à travers l'Académie européenne de musique, qui accueille de jeunes chanteurs et instrumentistes pour des classes de maître et des spectacles. Dans la cour du Palais de l'Archevêché, lieu historique du Festival, on donne des spectacles confiés aux artistes majeurs de l'époque : cette année-là, Peter Brook et Claudio Abbado revisitent Don Giovanni de Mozart, René Jacobs et Trisha Brown réinventent L'Orfeo de Monteverdi, Pierre Boulez et Pina Bausch explorent Le Château de Barbe-Bleue de Bartok.

Par ailleurs, Lissner démultiplie les lieux de représentation; en plus de l'Archevêché, il investit d'autres endroits avant d'aller, l'année suivante, dans la cour d'une vieille bastide à l'extérieur d'Aix (le Grand Saint-Jean), puis dans un petit théâtre à l'italienne restauré (le Théâtre du Jeu de Paume). A la fin de son mandat, en 2007, il finit même par obtenir la construction d'une nouvelle salle aux larges dimensions, le Grand Théâtre de Provence, dans lequel sera créée une nouvelle mise en scène de la Tétralogie de Wagner.

Alain Perroux

Transcription

Journaliste
Alors, l’homme du renouveau du Festival d’Aix est avec nous. Stéphane Lissner, bonsoir.
Stéphane Lissner
Bonsoir.
Journaliste
Stéphane Lissner, comment est-ce qu’on peut retoucher l’intouchable, c’est-à-dire une institution comme Aix-en-Provence ?
Stéphane Lissner
Non, l’idée c’est de s’appuyer aussi sur les fondations de ce Festival. C’est donc de s’appuyer essentiellement sur la naissance de ce Festival juste après la Seconde Guerre et sur l’idée d’un homme, Gabriel Dussurget qui a su en quelques années faire de ce lieu un grand festival international. Donc, j’ai beaucoup réfléchi et beaucoup travaillé sur le projet qu’il avait mis en place. Et je m’en suis largement inspiré en ce qui concerne la découverte des jeunes, en ce qui concerne l’intégration du Festival dans la ville. Donc, on a travaillé beaucoup sur ce thème.
Journaliste
Mais l’ouverture du Festival hors de ses propres murs, c’est vraiment quelque chose d’important pour vous ?
Stéphane Lissner
Oui, pour moi, c’était très important que le Festival ne soit pas réservé d’abord à une élite. C’était très important que les aixois se sentent concernés par le Festival. Et le fait d’avoir créé cette Académie européenne de musique, d’avoir ouvert à 70 concerts environ, 70 répétitions publiques, récitals, master class, c’était l’idée que le tout public pouvait venir. Et grâce à un passeport de cent Francs, on savait qu’on allait pouvoir très facilement permettre au plus grand nombre de venir dans toutes ces salles. Et les sujets qu’on vient de voir le montrent, ils ont répondu présent. Je pense qu’on aura à peu près 20 à 25000 personnes qui seront rentrées dans tous ces lieux.
Journaliste
Alors, je voudrais qu’on s’arrête un instant et que nous regardions un extrait de Curlew River , l’opéra d’un classique du XXe siècle puisqu’il s’agit de Benjamin Britten. Nous allons voir les images, il s’agit d’un opéra contemporain donc, qui est absolument magnifique.
(Musique)
Journaliste
[Inaudible]
Stéphane Lissner
Oui, mais je pense que c’est le rôle du service public. Le rôle du service public, c’est bien évidemment d’explorer toutes les musiques et surtout de ne pas nier la musique du XXe siècle. Donc ce soir, nous allons donner une représentation d’Orfeo . Et nous avons exactement à la même heure dans un autre lieu, Curlew River de Britten qui est une œuvre qui est peu donnée et qui justement, elle, est donnée par l’ensemble de la troupe européenne donc de cette académie.
Journaliste
Alors, les gens qui viennent à Aix-en-Provence voient ces spectacles. Ils sont nombreux certes, mais on peut se dire qu’un tel investissement pour si peu de monde, est-ce qu’il y aura la possibilité de les revoir ensuite, ces spectacles ?
Stéphane Lissner
Bah écoutez, je crois qu’on peut donner quelques chiffres si vous voulez. Nous allons jouer environ 45 représentations de l’opéra ici, où nous allons atteindre à peu près donc, environ 30000 spectateurs. Mais ensuite tous ces spectacles, la plupart de ces spectacles vont partir en tournée à travers l’Europe et à travers la France. Et nous aurons à peu près, je pense, le Festival aura à peu près 160 à 180000 spectateurs sur toute l’année, car après le Festival, ça continue.
Journaliste
Alors, pour nous quitter, je vous propose de regarder et d’écouter encore Béatrice, avec vous aussi, l’image absolument extraordinaire de cette jeune chanteuse qui chante la mort de Didon et Enée . C’est l’un des très beaux spectacles de cette version 98 du Festival d’Aix-en-Provence.
(Musique)