Andrzej Wajda à propos de L'Homme de marbre

24 mars 1979
04m 39s
Réf. 00095

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Résumé :

Interview du cinéaste polonais Andrzej Wajda à propos de son film L'Homme de marbre. Le film raconte l'histoire d'une jeune fille qui mène une enquête sur un héros ouvrier des années 1950, Birkut.

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Date de diffusion :
24 mars 1979
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Éclairage

S'il connaît la consécration en 1981 avec la Palme d'or cannoise attribuée à L'Homme de fer, qui évoque à chaud l'effervescence de la Révolution polonaise, le cinéaste Andrzej Wajda, né en 1926, doit une partie de sa gloire à une édition antérieure du festival.

En 1978 a été acclamé L'Homme de marbre, présenté par surprise à la veille de la clôture pour éviter le veto des gouvernants polonais. L'enquête d'une apprentie documentariste cherchant à savoir pourquoi la statue d'un héros du communisme a été escamotée est un coup de maître cinématographique, ambitieux et courageux. Le film est un regard implacable sur les années de censure et de répression dont il annonce la fin prochaine.

Ce coup d'éclat de l'ancien élève de l'école de Lodz ne doit pas faire oublier d'autres oeuvres passionnantes, le plus souvent centrées sur l'histoire de la Pologne, qui choisissent délibérément les voies d'une résistance "de l'intérieur", de la remarquable "trilogie de la guerre", entre 1954 et 1959 (Génération, Kanal, Cendres et Diamant), aux tragédies historiques (Danton, 1983, Katyn, 2007), en passant par les fresques amères que sont les adaptations du Bois de bouleaux (1970) et des Demoiselles de Wilko (1978).

Thierry Méranger

Transcription

Andrzej Wajda
[polonais] (Traduction) Il y a longtemps que je voulais réaliser ce film, depuis 14 ans. (polonais) (Traduction) Et soudain... (Traduction) Chaque année, je me suis adressé aux autorités (Traduction) en leur disant que c'était un sujet magnifique, un scénario magnifique et qu'il fallait tourner, (Traduction) et soudain, au bout de 14 ans, cette possibilité s'est enfin ouverte (Traduction) alors que je n'y pensais plus. (Traduction) J'ai donc décidé, à ce moment-là, de réaliser ce film (Traduction) parce que je pensais que c'était une nécessité. (Traduction) D'abord... (polonais) (Traduction) parce que la jeune génération veut connaître l'histoire de ses pères. (Traduction) Ensuite, parce que la vieille génération, la mienne, veut voir son histoire, sa propre histoire, (Traduction) alors que ce sujet avait été carrément gommé de notre histoire, de notre vie. (Traduction) Et c'est donc normal que ce film ait un tel succès en Pologne.
Journaliste
Est-ce que ce film est un simple constat sur le passé ou bien il constitue un avertissement pour le présent ?
Andrzej Wajda
[polonais] (Traduction) Je pense que c'est un film qui ne montre pas seulement ce moment (Traduction) et ce qui s'est passé à ce moment-là (Traduction) mais qui est également une voie ouverte vers l'avenir (Traduction) parce que c'est un récit dans le récit : (Traduction) une jeune fille raconte l'histoire du passé (Traduction) et il me semble qu'entre ce qu'elle raconte, et ce qu'elle raconte, (Traduction) il y a des liens qui sont ceux de 20 ans de notre vie. (polonais) (Traduction) Il me semble qu'il est très important qu'il y ait, justement, cette continuité (Traduction) malgré toutes les hésitations politiques, malgré toutes les difficultés qui ont existé. (Traduction) Il est très important qu'elle insiste pour réaliser ce film comme si... (Traduction) comme si c'était l'histoire de son père.
Journaliste
Est-ce que ce film a créé une ouverture en Pologne ? Est-ce que d'autres films du même style critique ont suivi ?
Andrzej Wajda
(Traduction) Je suis profondément persuadé que oui. (polonais) (Traduction) Lorsqu'en 1958, j'ai montré un film à Cannes, (Traduction) en 1956, j'ai montré un film à Cannes, (Traduction) la critique française nous a donné un titre. (Traduction) Elle a dit que c'était l'école polonaise de cinéma. (polonais) (Traduction) Je crois que cela, nous le devons à la critique française, qu'ils nous aient donné un nom. (Traduction) Et sous ce nom-là, école polonaise de cinéma, nous avons réalisé beaucoup de films (Traduction) mais pas seulement moi mais des collègues : (Traduction) Kawalerowicz, Munk et pas mal d'autres. (Traduction) Ensuite, le cinéma polonais a semblé chuter pour longtemps. (polonais) (Traduction) Et je pense qu'à nouveau, nous pénétrons sur les écrans, nous revenons aux écrans, (Traduction) mais cette fois, les Français ne nous ont pas encore donné de nom. (polonais) (Traduction) C'est pourquoi je pense que tout ira bien. (polonais) (Traduction) Je crois qu'il se trouvera un nom pour ce nouveau cinéma polonais. (Traduction) Je crois que nous avons beaucoup de nouveaux metteurs en scène pleins de talent, (Traduction) que le nouveau cinéma polonais se caractérise par le fait qu'il traite de problèmes d'aujourd'hui. (Traduction) Même s'il n'aborde pas de très grands problèmes, (Traduction) il photographie la réalité telle qu'elle est. (Traduction) Et ça, c'est déjà quelque chose qui vaut la peine. (polonais) (Traduction) Il est curieux que Krzysztof Zanussi ait fait un film qui s'intitule Camouflage, (Traduction) que moi, j'ai fait L'Homme de marbre, (Traduction) et que la jeunesse ait fait tout un tas de films (Traduction) qui sont aussi des films du même cercle, du même type. (Traduction) Cela signifie que ce n'est pas une affaire d'une génération ou d'une certaine génération de régisseurs, de metteurs en scène. (Traduction) Evidemment, moi, je suis le plus ancien.