"Chronique des années de braise", Palme d'Or au Festival 1975

19 octobre 1975
10m 54s
Réf. 00423

Notice

Résumé :

Mohammed Lakhdar-Hamina évoque son film, "Chronique des années de braise", où il raconte l'histoire des quinze années décisives qui ont précédé le début des "événements", en Algérie.

Type de média :
Date de diffusion :
19 octobre 1975
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Personnalité(s) :

Transcription

de film Extrait
(bruits)
Journaliste
"Chronique des Années de Braise", grand prix du festival de Cannes 1975. La première superproduction du cinéma algérien, un film de Lakhdar Hamina.
(bruits)
Mohammed Lakhdar-Hamina
Je n'ai pas voulu donner un message dans ce film. J'ai voulu simplement raconter honnêtement une tranche de ma vie, une tranche de la vie, aussi, du peuple algérien, puisque je suis une partie infime de ce peuple algérien. Une partie que je connaissais, la partie chaude de 1934 à 1954... 1939 à 1954. Et c'est une partie que je connaissais très très bien. Et je ne peux pas classer ce film, je ne peux pas dire s'il est... Il n'est même pas historique. Il est à travers des repères historiques qui racontent l'histoire d'une tranche de quinze années et qui ont été les plus décisives pour l'avenir du peuple algérien.
de film Extrait
[arabe]
Mohammed Lakhdar-Hamina
La prise de conscience de mon personnage est une prise de conscience d'abord contre la sécheresse, contre l'eau, contre Dieu, contre sa condition première. Et à un certain moment, même, [Eldio] dit : " Dieu ne nous regarde pas, il nous contemple ", quand on lui dit : " Dieu nous aidera ". " Il ne nous aidera pas, il nous contemple. Il est en train de nous contempler ". C'est-à-dire que si on ne peut pas bâtir quelque chose avec ses propres mains, on ne peut rien faire. C'est un film contre l'injustice, contre l'humiliation. Ce qui domine, si vous voulez, dans ce film, c'est la motivation et l'explication du comment et du pourquoi de la guerre d'Algérie. Pour les jeunes qui n'ont pas connu cette époque, ça va les aider à comprendre certaines choses. Pour les autres, beaucoup de gens de ma génération ou un peu plus âgés que moi, enfin, même tous les responsables, ont reconnu automatiquement l'authenticité, enfin, des faits relatés.
de film Extrait
(Musique) [arabe]
Journaliste
Dans ce public français, vous le savez bien, il y aura des gens qui ont vécu au moins autant que vous et en adulte la période que vous racontez. Pensez-vous qu'ils seront d'accord sur l'image que vous donnez des français d'Algérie ?
Mohammed Lakhdar-Hamina
Mais je n'ai pas donné d'image des français d'Algérie. Je ne les ai pas montrés. Je n'ai pas donné d'image des français d'Algérie, puisque, si vous voulez, la colonisation s'est toujours appuyée sur les autochtones pour réprimer. La courroie de transmission, c'était les autochtones. Dans le film, qu'est-ce qu'on voit comme Français ? Enfin, on voit deux flics, on voit un contremaître, on voit l'administrateur, et puis, c'est tout.
de film Extrait
(bruits) [arabe] Tu n'as pas encore compris que j'ai dit : " Au boulot ! " ?
Mohammed Lakhdar-Hamina
Les faits ont existé. Personnellement, j'ai vécu cette époque du typhus où nous étions cloîtrés. La ville était mise en quarantaine. Et la population française a été, disons, évacuée dans d'autres centres, dans d'autres hôpitaux. Et c'est vrai, personnellement, j'ai vécu par terre, dans les rues. J'ai passé presque quinze jours dans le coma. C'est une ville... c'est un petit village où sur, à peu près, vingt mille personnes, il y a eu plus de dix mille morts. C'est pour ça que je l'appelle " l'année de la charrette ", on ramassait les gens à la charrette.
de film Extrait
[arabe]
Mohammed Lakhdar-Hamina
Je ne connais pas un pays où il est plus facile de tourner. Enfin, il y a peut-être le côté bureaucratique, bon, qui n'est pas encore rodé, etc. Mais je crois que chaque réalisateur qui présente un script, et que ce script est admis, il tourne, il n'y a pas de problème.
Journaliste
Sur quels critères il est admis ?
Mohammed Lakhdar-Hamina
Il est admis selon un critère de l'orientation politique, il est admis selon le critère de l'orientation d'un engagement, enfin, de l'engagement à la politique du pays. L'audiovisuel n'est pas encore assez développé pour fabriquer, pour façonner l'homme de l'Algérie, de 2000, de demain. Il faut y mettre les moyens. Il n'y a pas assez. Vous, Français, par exemple, quand on parle de la France, on parle de sa culture. C'est d'abord... Et la réhabilitation de la nation algérienne, ce n'est pas simplement l'indépendance. C'est aussi la réhabilitation de sa culture. Parce que le peuple algérien a une culture, un passé. C'est pour ça que quand on raconte l'histoire du peuple algérien, rien n'est cher pour cette réhabilitation, enfin.
de film Extrait
[arabe]