Indépendance du Vanuatu

02 août 1980
03m 58s
Réf. 00155

Notice

Résumé :

Reportage au Vanuatu qui fête son accès à l'indépendance, dans un contexte de rivalité entre francophones et anglophones. Entretien avec Olivier Stirn, secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, et avec un planteur français inquiet quant à l'avenir.

Date de diffusion :
02 août 1980
Source :
TF1 (Collection: IT1 20H )

Éclairage

En novembre 1979, le Vanua'aku Pati du pasteur anglican Walter Lini remporte les élections législatives avec 26 sièges sur 39. Walter Lini devient premier ministre et l'indépendance du condominium est fixée au milieu de l'année 1980.

Les francophones, très présents sur les îles d'Espiritu Santo et de Tanna n'acceptent pas l'évolution de la situation. Les négociations entre les deux communautés linguistiques échouent. En mai 1980, les sécessionnistes du mouvement Nagriamel prennent Luganville dans l'île de Santo. Leur leader, Jimmy Stevens, un des premiers militants pour l'indépendance du condominium, forme alors un gouvernement sur Santo et proclame l'indépendance de la « République de Vemerana ». Le gouvernement central de Walter Lini ordonne, lui, un blocus de l'île de Tanna. Les tensions se multiplient entre les deux communautés linguistiques et l'on recense des heurts et des déplacements de population. Le 30 juillet 1980, l'indépendance effective du pays est proclamée. Les forces armées franco-britanniques interviennent du 27 juillet au 18 août 1980 pour rétablir l'ordre mais cette opération va aussi, pour les unités françaises du 8ème RPIMA, se transformer en mission d'exfiltration des ressortissants français, menacés par l'évolution de la situation politique. Ce reportage est diffusé le 2 août, soit quelques heures après la fin des cérémonies de l'indépendance.

Avant même le départ des forces françaises, le gouvernement central a, comme indiqué dans le reportage, fait appel à l'aide militaire de la Papouasie Nouvelle-Guinée dont les forces vont reprendre le contrôle de l'île de Santo. Les insurgés vont être arrêtés et jugés. Stevens est emprisonné pour plus de 10 ans. De nombreux ressortissants français, souvent des planteurs, sont expulsés du nouvel état indépendant et trouvent refuge en Nouvelle-Calédonie où beaucoup ont des attaches familiales. L'arrivée de ces réfugiés en Nouvelle-Calédonie, où des structures d'accueil sont mises en place, va sans doute contribuer à exacerber les tensions et les craintes entre communautés sur ce territoire.

Ce reportage montre la situation sur l'archipel au lendemain même de l'indépendance, le temps que les images soient transmises en métropole. Le ton de ce reportage est sans concession et les critiques envers le monde anglophone assez virulentes. Il faudra quelques crises et des alternances démocratiques pour que la situation se normalise entre les différentes communautés linguistiques du Vanuatu.

Vincent Giraudier

Transcription

Présentateur
Aux Nouvelles-Hébrides, on s’installe tant bien que mal dans l’indépendance. Cet archipel qui s’étend sur 850 kilomètres n’a jamais été très homogène. C’est le moins que l’on puisse dire en raison de son étendue d’abord, de son morcellement ensuite en 80 îles ; et surtout, parce que ce condominium franco-britannique était partagé entre Anglophones et Francophones. Cela explique que la principale île, celle de l’Esprit Saint, est tentée de faire sécession. Les Nouvelles-Hébrides sont devenues depuis une semaine la République du Vanuatu. Sur place, notre envoyé spécial, François Debré.
François Debré
Le condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides, créé au temps lointain de l’entente cordiale a vécu après 66 ans d’existence. Une existence qui ne fut qu’une longue et sourde rivalité entre les deux pays colonisateurs. Aujourd’hui, cet archipel d’une douzaine d’îles et de 110 000 habitants s’agite encore au rythme de cette rivalité.
(Musique)
François Debré
Mercredi 30 juillet, les représentants de la France et de l’Angleterre pour la dernière fois côte à côte dans une cérémonie officielle à Port-Vila. Mais l’équilibre, qu’avait fait naître cette rivalité, est désormais rompu. Majoritaires au parlement mais non dans le pays, les Anglophones sont les maîtres absolus de la nouvelle République du Vanuatu. Quant aux francophones, ils se disent prêts à s’opposer par les armes, des arcs et des flèches au pouvoir du nouveau gouvernement.
(Bruit)
Olivier Stirn
S’il y a eu sans aucun doute des conséquences heureuses de la présence française et de la présence britannique dans ce pays, notamment sur le plan économique ; il faut voir qu’il y a eu aussi des conséquences négatives, car après tout, ces querelles ont été aggravées par la présence des Français et des Anglais ; qui ont apporté l’un et l’autre leur religion, qui ont apporté l’un et l’autre leur influence, et qui ont sans aucun doute accentué les rivalités actuelles. En nous retirant, nous pouvons espérer que ces rivalités s’estamperont et que la réconciliation nécessaire, souhaitable se réalisera.
François Debré
La réconciliation est-elle possible ? En attendant le départ très prochain des troupes franco-britanniques ; ce sont des soldats de la Papouasie Nouvelle Guinée qui déjà, remplacent gendarmes français et parachutistes britanniques. Ces soldats ne font pas mystère de leur mission, mettre un terme à toute agitation des Néohébridais francophones.
(Musique)
Olivier Stirn
Il faut s’habituer à cette idée, quand un Etat devient indépendant, n’est-ce pas ; il faut s’habituer à l’idée que les Français, comme les Anglais, en ce qui concerne cet Etat, n’auront plus à intervenir, en tout cas ce n’est pas à eux de décider. Pour l’instant, on a demandé d’ailleurs aux troupes françaises et britanniques de rester quelque temps ; donc il n’y a pas de rejet, loin de là, des anciennes autorités administrant. Et par ailleurs, on va peut-être faire appel à d’autres. Et alors, c’est un pays indépendant, c’est son droit.
François Debré
Quant aux colons français, quelques milliers d’hommes qui ont mis en valeur les îles de l’archipel, leur aigreur est désormais banale.
Padovani
C’est cette question des terres, on ne sait pas trop sur quel pied danser, parce qu’on nous a fait remplir des formules d’indemnisation. Donc, ce n’est pas un très bon signe déjà. Et je crois que les planteurs ici voudraient plutôt se faire indemniser et faire autre chose.
François Debré
Une page est tournée, un des derniers confettis de l’empire s’est envolé, peut-être pas pour tout le monde ; car l’ombre de l’Australie, la nouvelle grande puissance de la région s’étend de plus en plus sur les îles du Pacifique. Ayant résolu les problèmes de leurs aborigènes, en les parquant dans les réserves ; les Australiens s’estiment sans doute compétents pour conseiller les nouvelles nations mélanésiennes.