Le général de Lattre de Tassigny

11 décembre 1952
01m 45s
Réf. 01067

Notice

Résumé :

Après l'attaque virulente du Viêt-minh en octobre 1950 dans le Tonkin, la situation appelle des mesures d'urgence : le redressement est entamé par le général de Lattre de Tassigny (batailles de Vinh Yen et de Hoa-Binh). Les images, comme les discours du général de Lattre, retracent ces événements.

Type de média :
Date de diffusion :
11 décembre 1952

Éclairage

Ce document est consacré au parcours de l'une des figures les plus marquantes de la guerre d'Indochine : le général de Lattre de Tassigny (1889-1952). Jean de Lattre de Tassigny est réputé avoir été l'officier le plus doué de sa génération (il entre premier à l'Ecole de guerre en 1927 et est le plus jeune général de l'armée française en 1939). Surnommé « le Roi Jean » par la presse qui voit en lui l'un des derniers chefs de guerre français, il achève sa brillante carrière par un ultime engagement en Indochine, de décembre 1950 à janvier 1952. Il est promu au rang de maréchal de France à titre posthume.

Cet extrait des Actualités cinématographiques dresse le portrait de cet officier d'élite qui remporta au cours de l'année 1951 où il exerça les fonctions de Haut-commissaire en Indochine quelques unes des victoires les plus notables contre le Vietminh (Vinh Yen, Phuly, Nam Dinh, Mao Khé) et sut rallier l'aide matérielle et financière des Etats-Unis pour soutenir l'effort de guerre.

L'extrait démarre sur les accords tonitruants d'une musique d'accompagnement extrêmement rythmée supposée restituer au niveau sonore l'élan et l'énergie insufflés par de Lattre à sa prise de fonction. Sur cette musique se superpose la voix de De Lattre lors du discours fait à la jeunesse vietnamienne lors de la remise de prix de fin d'année au Lycée Chasseloup-Laubat de Saïgon. Au-delà des propos tenus, propos traditionnels pour un homme de guerre, la puissance de cet extrait sonore vient de l'indéniable charisme de De Lattre qui s'illustre ici pleinement et ne peut échapper au spectateur quelle que soit son opinion sur l'armée, la France et/ou son action en Indochine au début des années 1950.

La musique prend ensuite un tour plus dramatique au moment où apparaît à l'écran le général de Lattre remettant une médaille à son fils unique Bernard. Alors qu'il se permet un geste de rude tendresse à l'image d'une affection toute en pudeur et que le sourire timide de Bernard s'exprime furtivement, la voix off explique que Bernard devait trouver la mort peu de temps après. Le commentaire ne revient pas sur les circonstances de la disparition de Bernard de Lattre, mort en opération lors de la bataille de Ninh Binh, mais un rapide plan intervient immédiatement, laissant apercevoir le drapeau français flottant au sommet du rocher de Ninh Binh.

A partir de cette scène, le sujet ne montre plus qu'un général de Lattre portant un brassard noir en signe de deuil. C'est ainsi que le sujet le retrouve sur le pont du paquebot qui l'amène aux Etats-Unis où sa force de persuasion débloque de nouvelles aides américaines. Car en cette année 1951, la guerre d'Indochine vient de prendre un nouveau tournant idéologique : de guerre de reconquête coloniale, elle est devenue conflit de Guerre froide, tête de pont dans la stratégie d'endiguement du péril communiste menée par les Etats-Unis et leurs alliés. L'Indochine est désormais l'un des dominos qu'il faut soutenir pour empêcher l'Asie du Sud-Est de tomber sous l'influence de la Chine et de l'URSS. De Lattre a compris cet enjeu capital et obtient des Américains les moyens de mener une guerre qui échappe à l'ancien système impérialiste pour rentrer dans une logique moderne d'affrontement des blocs.

Si la guerre d'Indochine n'a laissé que peu de trace dans la mémoire collective, à l'exclusion sans doute du temps fort de la bataille de la RC4 et de Diên Biên Phu, la mort de Bernard de Lattre figure très certainement parmi les moments marquants du conflit. Les Français se sont massivement désintéressés de cette lointaine guerre, alors que la reconstruction de la France occupait toute leur pensée, mais ils n'ont su rester insensibles à la souffrance du couple de Lattre recevant la dépouille de leur fils unique dans la cour des Invalides.

A compter de ce jour, la santé déjà fragilisée par un cancer du général de Lattre, va lentement décliner, et il meurt quelques mois après son fils, le 11 janvier 1952.

Delphine Robic-Diaz

Transcription

Journaliste
Et surtout, il y avait De Lattre, il n’était pas seulement l’espérance, il était la foi, et c’est la foi qui change les hommes.
Lattre (De)
La foi et la volonté, tels doivent être les mots d’ordre de tous.
Journaliste
Aux jeunes officiers, il disait, ce n’est pas pour les colonels que je suis venu, mais pour vous.
(Musique)
Journaliste
Le Viêt-Minh ne pouvait plus gagner parce que De Lattre avait fait mieux encore que d’électriser ses troupes. Il leur avait donné son propre fils.
(Musique)
Journaliste
Il avait accepté le plus grand sacrifice qui puisse être demandé à un homme, qui n’est pas de mourir, mais de voir mourir son fils unique presque sous ses yeux et dans l’œuvre même de ses mains. Et les honneurs rendus aux dépouilles mortelles de Bernard De Lattre de ses compagnons s’adressaient à tous ceux qui partagent la charge la plus lourde de cette guerre.
(Musique)
Journaliste
De Lattre fit le voyage d’Amérique pour placer la guerre d’Indochine sur le plan international ; pour que la France obtienne de ses alliés, par une compréhension meilleure, une coopération accrue. La guerre d’Indochine n’était plus la guerre coloniale d’une puissance européenne refusant de perdre un empire. C’était la guerre dans laquelle la France défendait ses propres frontières aux avant-postes de l’Asie contre un ennemi qui la menaçait déjà en Europe. Et la France dépendait en même temps en Indochine une partie vitale du monde libre, exactement comme les Nations-Unies en Corée. C’était enfin la guerre du Viêt-Nam pour le Viêt-Nam. L’Amérique fut émue, et le matériel débarqua en masse dans les ports indochinois.
(Musique)