La victoire de Diên Biên Phu [muet]

1954
01m 24s
Réf. 01057

Notice

Résumé :

[Document muet] Film vietnamien sans titre ; mise bout à bout de plusieurs bobines de films. Il porte sur le conflit indochinois mené par le Viêt-minh contre les Français de 1946 à 1954, puis sur l'affrontement opposant le Viêt-cong aux Américains entre 1954 et 1975.

Type de média :
Date d'événement :
1954
Lieux :

Éclairage

Ce document appartient à une série de bobines acquises par Jérôme Kanapa pour l'ECPA (actuels ECPAD) en 1986.

Il s'agit d'un bout à bout extrait de films vietnamiens tournés en 1964 pour célébrer les 10 ans de la victoire de Diên Biên Phu. Muets et noir et blanc, leur date de réalisation correspond pourtant à l'avènement des tournages en son direct et en couleur. Au-delà d'une volonté esthétique de donner une « patine » ancienne à ces documents en privilégiant le noir et blanc muet avec une image griffée et tressautante, il faut surtout voir dans ces films vietnamiens non pas tant un exercice de production de « faux » ayant l'aspect de documents d'époque, mais des réalisations témoignant de l'état de maîtrise des techniques de tournage, de reconstitution, et surtout de conservation.

Ainsi l'usure de ces bobines n'a-t-elle pas été falsifiée, elle atteste simplement des conditions très précaires dans lesquelles elles ont été entreposées à un moment où le Vietnam, pris dans une nouvelle guerre, ne pouvait pas se prévaloir d'une politique culturelle en faveur de la préservation des archives audiovisuelles (cf. les conditions d'hydrométrie et de température particulières aux climats tropicaux).

De la même manière, le choix du noir et blanc muet relève de contraintes techniques et financières. Il ne s'agit pas d'avoir à disposition la dernière caméra en vogue pour les tournages de fiction occidentaux et en ces débuts de guerre américaine du Vietnam, la récupération et le système D président aux bricolages sur des appareils venus le plus souvent de l'école soviétique à laquelle sont formés l'essentiel des opérateurs vietnamiens. Le but n'est pas d'organiser un tournage de reconstitution, mais d'inscrire certains moments-clefs dans une sorte d'imagier populaire et collectif de la guerre d'Indochine, moments victorieux d'autant plus cruciaux pour stimuler les troupes dans ces premières années de guerre du Vietnam.

On retiendra donc de ces images l'effet brumeux très stylisé mis en place pour recréer l'ambiance des combats et des bombardements, l'usage des diagonales chères aux Frères Lumière pour organiser l'espace dans le champ de la caméra, composante reprise par le cinéaste soviétique Roman Karmen (notamment lorsqu'il fixe sur la pellicule le défilé des prisonniers de guerre français selon le schéma d'un grand S qui occupe le champ de l'angle haut droit jusqu'à l'angle bas gauche, voir le film Prisonniers français) et dont on retrouve l'écho répétée dans les nombreux plans de progression du drapeau nationaliste jusqu'au toit du PC du général de Castries. Forts de ces quelques leçons de composition du cadre, les opérateurs vietnamiens répètent ces diagonales pour inscrire un maximum de mouvements à l'écran. On remarque d'ailleurs, sur ces plans victorieux, quelques corps au sol et surtout nulle trace de soldats du Corps Expéditionnaire Français, et pour cause puisque les derniers ont quitté le territoire depuis près de 10 ans.

Delphine Robic-Diaz