La mort de Marcel Cerdan

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 03 nov. 1949

La mort tragique du boxeur Marcel Cerdan est l’occasion de revisiter la vie de celui qui, devenu légende du sport par ses combats victorieux, se transforme en une figure mythique incarnant la France.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Les Actualités françaises
Date de diffusion du média :
03 nov. 1949
Production :
INA
Page publiée le :
2006
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000591

Contexte historique

Par Vincent Casanova

Issue du pugilat pratiqué dans l’Antiquité, la boxe anglaise, combat exclusivement aux poings, fut réglementée au cours du XIXe siècle, notamment par l’usage obligatoire de gants et le déroulement de l’affrontement sur un "ring" en "rounds" successifs. Cela permet à ces combats qui n’étaient jusqu’alors qu’une violente bagarre à mains nues de devenir plus respectables, mettant en avant autant l’agilité que la force puisque le corps à corps et l’étouffement sont interdits. En France, le "noble art", tel qu’on l’appelle également, se pratique d’abord dans les music-halls et cafés-concerts où équilibristes et acrobates mettent à leur manière leur corps à l’épreuve.

À l’unisson d’une époque soucieuse d’hygiène de vie et qui invente l’éducation physique, la boxe anglaise, devenue sport olympique à partir de 1908, apparaît par les qualités qu’elle sollicite force et volonté, intelligence et finesse comme l’une de ces "cérémonies de justice" où une communauté nationale et/ou sociale vient défendre et affirmer son honneur et ses valeurs. Elle est aussi perçue pour les couches populaires comme un vecteur d’ascension, assurant tout à la fois, reconnaissance sociale et financière. Considérée comme un bon moyen de gagner de l’argent quand elle est pratiquée de manière professionnelle, la boxe fédère autour d’elle un monde de managers et de parieurs qui contribuent à faire des combats un spectacle divertissant, parfaitement scénarisé et mis en scène. C’est ainsi qu’elle s’est imposée en France comme l’un des sports les plus populaires au cours des années 1940-1960, alors que le pays est à la recherche d’une dignité et d’une unité perdues. Marcel Cerdan a cristallisé tous ces enjeux, incarnant la figure du champion par excellence.

Né en 1916, Cerdan devient le héros d’un pays après avoir battu à 23 ans à peine, à quelques mois du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, le champion d’Europe italien soutenu par plusieurs milliers de chemises noires fascistes réunies à Milan. Il réitéra ce triomphe en 1942 contre José Ferrer, arrivé en effectuant le salut nazi, habillé d’un peignoir orné d’une croix gammée. Le KO, que Cerdan lui inflige en 83 secondes, déclenche le délire des Parisiens occupés depuis deux ans par les Allemands. Mais c’est son combat contre Tony Zale aux Etats-Unis en 1948 qui le fait entrer dans le panthéon des sportifs français : il décroche le titre mondial qui pour la première fois depuis 1891 est ravi aux Américains. Son retour à Paris est triomphal : des milliers de Français descendent dans la rue et lui font l’un des plus importants cortèges populaires depuis la Libération. Reçu par le Président de la République Vincent Auriol à l’Élysée, il a même le privilège de rallumer la flamme du soldat inconnu. Sa mort tragique en 1949 dans un accident d’avion, à 33 ans, ainsi que son histoire d’amour avec la chanteuse Édith Piaf ont contribué à épaissir la légende de celui qu’on avait surnommé le "bombardier marocain" par la vitesse et le punch de ses frappes.

Éclairage média

Par Vincent Casanova

C’est au son d’une musique lyrique, sur un mode mineur pour symboliser la tristesse, que les Actualités françaises retracent la carrière triomphale de Marcel Cerdan. À l’exception des applaudissements et de la clameur populaire qui viennent rappeler la ferveur qu’il déclenchait, cet hommage rendu à la gloire de Cerdan est constitué uniquement d’un défilé d’images, quelques images de combats alternent avec la rencontre avec Vincent Auriol agrémenté d’un récit sobre mais élogieux.

Recourant volontiers aux superlatifs (le boxeur n'est rien moins que "le meilleur du monde"), le commentaire conserve toutefois un ton relativement neutre, n'affectant pas d'épanchements particuliers, allant même jusqu'à passer sous silence la catastrophe aérienne dans laquelle Cerdan mourut. Restant très discret sur l'intimité de Cerdan - la brasserie de ses parents à Casablanca où il a grandi est simplement rappelée - l'ensemble du propos se concentre sur l'aspect strictement sportif. Seuls les derniers principaux combats sont évoqués. Il est néanmoins remarquable que ne soit pas mentionnée la défaite que venait de subir Cerdan à Detroit quelques mois auparavant et qui avait mis un coup d'arrêt à l'exceptionnel enchaînement de combats victorieux. Aucune ombre n'est portée à l'histoire d'un homme qui disparut au faîte de sa carrière. En cela, le traitement est emblématique d'une vision médiatique consensuelle dont doit être exclu tout débordement d'émotion.

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