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La guerre en Tchétchénie

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 20 déc. 1994

Les habitants de Grozny organisent une chaîne de la paix en réaction à des bombardements de l'aviation russe. Le reportage montre la vie des habitants de Grozny.

Niveaux et disciplines

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
20 déc. 1994
Production :
INA
Page publiée le :
2007
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000740

Contexte historique

Par Carole Robert

Pour comprendre l'impact de la guerre de Tchétchénie, il convient de remonter dans l'histoire du Caucase. En effet, dès le XVIIIe siècle, les Tchétchènes ont combattu l'avancée russe dans le Caucase. Refoulés dans les montagnes, ils prennent la tête de la révolte des peuples du Caucase au début du XIXe siècle, mais subissent des défaites. C'est seulement en 1922 que le pouvoir soviétique les dote de la Région autonome de Tchétchénie qui est réunie à la Région d'Ingouchie en 1934. En décembre 1936, la République de Tchétchénie-Ingouchie accède au statut de République autonome. Accusée de collaboration avec l'Allemagne, son autonomie est abrogée en 1944. Les Tchétchènes sont massivement déportés au Kazakhstan. En 1957, leur République est rétablie par Khrouchtchev.

Lors de la dislocation de l'URSS en 1991, les Tchétchènes sont les seuls, parmi les 21 républiques nationales de Russie, à s'opposer de façon frontale au pouvoir fédéral. Ils élisent par un scrutin boycotté par les Ingouches le général Djokhar Doudaïev. Celui-ci proclame l'indépendance et refuse de ratifier en mars 1992 le traité fédéral entre les anciennes républiques fédérales. Contesté par une partie de la population et combattu par l'opposition, armée par Moscou, Doudaïev ordonne la dissolution du Parlement en avril 1993. En décembre 1994, les troupes russes (20 000 soldats) envahissent la Tchétchénie. C'est la première guerre de Tchétchénie. Les conflits sont meurtriers et s'embourbent, provoquant d'énormes pertes humaines. Doudaïev est tué au cours d'un bombardement russe en 1996. La Russie finit par capituler : le successeur de Doudaïev, Iandarbaïev, conclut un cessez-le-feu avec Eltsine qui signe un décret sur le retrait total des troupes russes (31 août 1996).

L'accession d'Aslan Maskhadov, chef de l'armée tchétchène, au pouvoir en janvier 1997 débouche sur la conclusion d'un accord de paix signé par Boris Eltsine et Aslan Maskadov en mai 1997, mais ne règle pas le statut de l'indépendance de la République tchétchène. Russes et Tchétchènes pensent que c'en est fini de cette guerre. Mais certains chefs de guerre tchétchènes plus radicaux, comme Chamil Bassaïev ou Salmon Radouiev, deux ans plus tard, réclament l'instauration d'un Caucase Islamiste. A la suite d'attentats terroristes meurtriers, l'armée russe intervient de nouveau en Tchétchénie et c'est le début d'un second conflit, peut-être plus meurtrier encore que le premier.

Éclairage média

Par Carole Robert

Le reportage se caractérise par le souci de rapprocher au maximum le téléspectateur des événements de Tchétchénie en passant à la fois par des images fortes et symboliques, à la fois par des scènes d'intimité. Dès les trois premiers plans, la façon de filmer veut provoquer l'émotion. Un travelling sur les manifestants pris de la voiture donne l'impression d'une solidarité et d'un grand nombre de manifestants ; un gros plan sur les mains symbolise la force du lien et de la solidarité entre tous et est astucieusement calé sur les termes "braves gens" ; un plan fixe et large, fondé sur une diagonale, insiste sur la détermination des gens. Enfin, les gros plans sur les visages, contextualisés par les images précédentes, prennent toute leur dimension tragique, d'autant plus que le reportage se focalise sur des visages de personnes âgées ou d'enfants : les innocents.

Le commentaire en off est engagé aux côtés de ceux que le journaliste appelle les "braves gens" qu'il distingue des "combattants". L'intervention des troupes russes est taxée d'intervention de "Moscou", terme qui rappelle la guerre froide : toute décision venant d'URSS était alors dénommée "ordre de Moscou". D'ailleurs, distinguant clairement le point de vue officiel de l'Etat russe de sa propre opinion, le journaliste précise qu'il s'agit de "la terminologie de Moscou". Il accuse les Russes de bombarder des zones civiles en dénonçant même à travers une belle métaphore "l'Absurde de la guerre sur un visage de vieille femme". Ensuite, le procédé consiste à suivre un Tchétchène dans son intimité - scènes familiales - afin de le rendre proche du téléspectateur et de provoquer la compassion de ce dernier. La force expressive du reportage provient du choix délibéré d'enchaîner des plans montrant les "braves gens" qui veulent vivre dans la paix et les plans montrant à quel point la guerre est omniprésente, même dans les foyers : de nombreux gros plans sur les armes, des panoramas sur les traces de la guerre l'attestent.

Le commentaire en off est enrichi d'une interview sur le terrain - celle du chauffeur qui devient le "héros" du reportage, afin d'incarner vraiment l'événement et d'intéresser personnellement le téléspectateur. La télévision de proximité dans les années 1990 fonctionne en rentrant dans l'intimité des gens. Les plans d'intérieur sont très symboliques : gros plan sur la soupe, gros plan sur les enfants et gestes de tendresse de leur mère. Il s'agit plus d'attirer l'attention par l'identification et l'affectif, que d'expliquer une situation. S'éloignant de la situation actuelle, le commentaire choisit de rappeler l'histoire héroïque du "patriarche" : il s'agit d'une sorte d'héroïsation de l'un des combattants tchétchènes. Mais ce n'est pas un hasard si l'interview est celle du chauffeur pacifiste et prêt à partager son pays, non celui d'un combattant. Le retour au groupe de Tchétchènes qui dansent pour se "rapprocher d'Allah" prend d'ailleurs une dimension plus sympathique après le passage à l'intérieur de la maison. La conclusion du commentaire est ambigüe : "si tu veux la paix, prépare la guerre" et témoigne bien de la situation compliquée de la Tchétchénie. Le journaliste nous avertit que la guerre est loin d'être finie. Aucune allusion n'est encore faite à l'islamisme.

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