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Vers l'indépendance du Zimbabwe : l'organisation d'élections libres en mars 1980

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 27 févr. 1980

Les élections libres de mars 1980 sous l'égide britannique ouvrent la voie à l'indépendance de la Rhodésie du Sud rebaptisée Zimbabwe, après 14 ans d'isolement diplomatique et de guerre civile opposant le gouvernement et les mouvements nationalistes.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
27 févr. 1980
Production :
INA
Page publiée le :
2007
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000000760

Contexte historique

Par Emeline VanthuyneProfesseure agrégée d'histoire )

En 1923, la Rhodésie du Sud (futur Zimbabwe) obtient le statut de colonie britannique autonome. Le pays est dominé par une élite de colons blancs minoritaires qui cherchent à se garantir un accès privilégié aux terres agricoles. Dans les années 30, des lois ségrégationnistes entérinent le principe d'un inégal partage des terres. Ainsi, les Noirs, majoritaires dans le pays, n'ont le droit de posséder des terrains qu'au sein de réserves spécifiques. Par ailleurs leurs droit civiques sont limités. Tandis que les colonies britanniques voisines accèdent à l'indépendance au profit de gouvernements africains, les négociations achoppent en Rhodésie du Sud.

En effet, le gouvernement dirigé par des colons européens entend conserver le pouvoir et doit faire face à la constitution de mouvements de libération africains. C'est pourquoi le Premier Ministre, Ian Smith, signe une déclaration unilatérale d'indépendance de son pays le 11 novembre 1965, contre l'avis de la métropole britannique. La communauté internationale (à l'exception de l'Afrique du Sud et du Portugal) refuse de reconnaître cette indépendance. Malgré les sanctions économiques adoptées par l'ONU, le gouvernement poursuit sa politique ségrégationniste : en 1969, la nouvelle Constitution restreint à nouveau les droits civiques des Noirs et proclame l'égal partage des terres entre les communautés, bien que les Européens soient 20 fois moins nombreux. Face à ces mesures, la résistance armée des mouvements nationalistes africains tente de s'organiser mais reste affaiblie par les divisions existants entre ses différentes composantes : la ZAPU (Union du peuple africain du Zimbabwe) s'oppose à la ZANU (Union nationale africaine du Zimbabwe). Ils parviennent cependant à s'unir au sein d'un Front Patriotique. L'aggravation de la rébellion et l'isolement diplomatique du pays entraînent en 1976 l'ouverture de négociations entre Londres, le gouvernement rhodésien et le Front Patriotique, conclues en décembre 1979 par les accords de Lancaster.

Ceux-ci mettent fin à 14 ans de rébellion contre la couronne britannique. Ils prévoient l'adoption d'une nouvelle Constitution et l'organisation d'élections libres sous la surveillance de la Grande-Bretagne. Malgré quelques mesures d'urgence pour faire face aux violations du cessez-le-feu, les élections se déroulent dans le calme et sont remportées par la ZANU. Robert Mugabe devient premier ministre et forme un gouvernement de réconciliation nationale. Le 18 avril 1980, l'indépendance à la Rhodésie du Sud rebaptisée Zimbabwe est proclamée en présence de nombreux chefs d'Etats étrangers. Cependant l'indépendance ne signe pas la fin des troubles dans le pays : à la guerre civile qui sévit jusqu'en 1987 entre les mouvements nationalistes ZANU et ZAPU s'ajoute la dérive autoritariste d'un régime aujourd'hui mis au ban de la communauté internationale. La réforme agraire ordonnée par Robert Mugabe légalise une politique d'expropriation des fermiers blancs, souvent remplacés par d'anciens miliciens à la solde du pouvoir. La crise économique qui en résulte a de graves conséquences dans un pays où 70% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté et 25% des adultes sont atteints par le VIH.

Les élections législatives truquées d'avril 2005 et la chasse aux pauvres de la capitale Harare (expulsés des bidonvilles) prouvent que la violence est devenue la seule arme de coercition du président Mugabe, aujourd'hui désavoué par les électeurs.

Éclairage média

Par Emeline VanthuyneProfesseure agrégée d'histoire )

Patrick Poivre d'Arvor, alors présentateur du 20h d'Antenne 2, évoque dans son lancement la forte participation de la population noire aux élections libres de Rhodésie du Sud. Pourtant, dans le reportage, tourné peut-être la veille, on n'aperçoit aucune image des bureaux de vote. C'est un tout autre aspect de la question que le reporter met en évidence ici : l'impuissance britannique à garantir le cessez-le-feu dans le pays. Malgré l'arrivée de Lord Soames, chargé d'assurer le bon déroulement des élections, le journaliste exprime son scepticisme face à l'insuffisance des moyens déployés sur place. L'oisivité des soldats australiens filmés en train de se restaurer et d'écrire à leur famille illustre son propos. Il met clairement en doute l'efficacité de leur action qui selon lui se résume à compter les soldats des mouvements nationalistes rebelles dans les camps où ils sont regroupés.

Le pessimisme du reporter tranche avec le ton adopté par le présentateur dans son lancement, insistant sur le calme régnant sur place et l'importance du scrutin. En réduisant la problématique du scrutin à la fin du règne britannique, on peut se demander si le journaliste ne se trompe pas d'enjeu. Depuis 1965 en effet, les Britanniques n'ont plus de contrôle effectif sur le gouvernement rhodésien entré en rébellion. De plus, ils n'ont jamais refusé l'indépendance de la Rhodésie comme en attestent les accords de Lancaster conclus en décembre 1979. Contrairement au Portugal dont les dernières colonies ont atteint l'indépendance réelle en 1975 seulement, les Britanniques n'ont plus véritablement d'emprise sur leur ancienne colonie. Ce qui apparaît alors comme le plus incertain est le rapport qui va s'installer entre Blancs et Noirs face à la nouvelle donne politique. Le journaliste évoque la force militaire détenue par les mouvements nationalistes noirs mais sans replacer la guerre civile dans une perspective historique plus large (aucune allusion n'est faite à la politique inégale de partage des terres par exemple..).

Le téléspectateur a l'impression d'assister à une "banale" guerre civile africaine, opposant les différentes organisations de libération noires. On ne saisit pas dans ce sujet ce qui fait aujourd'hui encore la spécificité du problème rhodésien, à savoir une répartition très inégalitaire de la terre.

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