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Le négationnisme

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 30 avr. 1987

En pleine préparation du procès de Klaus Barbie, Robert Faurisson réaffirme ses thèses négationnistes.

Niveaux et disciplines

Ressources pédagogiques utilisant ce média

  • Niveaux: Lycée général et technologique - Lycée professionnel

    Racisme et antisémitisme en France

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
30 avr. 1987
Production :
INA
Page publiée le :
2007
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001014

Contexte historique

Par Vincent Casanova

En 1978, l’hebdomadaire L’Express publie un entretien avec l’ancien Commissaire général aux Questions juives Louis Darquier dit "de Pellepoix", réfugié en Espagne depuis sa condamnation à mort en 1947. Sous le titre "À Auschwitz, on n’a gazé que les poux", Darquier libère sa haine antisémite. C’est peu de temps après que Robert Faurisson fait paraître un article dans Le Monde intitulé "Le problème des chambres à gaz".

Maître de conférences en littérature à l’université Lyon II, Faurisson réussit alors à déclencher une médiatisation sans précédent du négationnisme. Si ses thèses font l’objet de réfutations incontestables, elles gagnent pourtant une forte popularité aussi bien dans les milieux d’extrême droite que dans ceux d’extrême gauche, incarnée par Pierre Guillaume, fondateur de la maison d’édition la vieille Taupe, au nom d’une contestation de la "vérité officielle" et d’une lecture anticapitaliste de l’histoire.

Condamné à plusieurs reprises par la justice, Faurisson affirme que les chambres à gaz n’ont pas servi pour les hommes ; si la crémation n’est pas contestée, elle est justifiée par les besoins d’hygiène. La Solution finale ne désigne que la déportation des Juifs hors d’Europe. Les Juifs seraient décédés de mort naturelle dans les camps de concentration et le génocide serait une invention.

Cette négation de la réalité historique peut s’expliquer en partie par les failles d’un mode de représentation de l’histoire. Les négationnistes ont utilisé à leur profit la démarche fondamentalement "révisionniste" de l’histoire et sont apparues dans le sillage du sentiment de vérité révélée qui a fait voler en éclats dans les années 1970 les certitudes historiques des années 1950-60. En s’engouffrant dans ce courant de relecture de l’histoire qui visait à une meilleure connaissance du passé, le discours négationniste révèle sa perversité. La différence fondamentale entre une réinterprétation, fondée sur un apport supplémentaire de sources, mais qui n’a jamais remis en cause les faits établis avant elle, et la négation d’un fait massif (la Solution finale) opéré au nom d’une logique purement mécanique des choses ("il est impossible que"), n’est pas apparue immédiatement.

Faurisson réitère ses positions en 1987, au moment du procès du nazi Klaus Barbie à Lyon, alors que des libelles sont envoyés aux avocats des parties civiles comme Serge Klarsfeld et que des tracts antisémites circulent dans la ville. Conscient de l’impact médiatique que pourrait avoir cette publication, il participe à la publication du premier numéro des Annales d’histoire révisionniste.

C’est dans cette mouvance que s’inscrit le Front national dirigé par Jean-Marie Le Pen qui qualifie en 1987 les chambres à gaz de "point de détail de la Seconde Guerre mondiale" ou bien encore le délégué général du FN Bruno Gollnisch qui, en 2004, a introduit selon la justice le doute sur l’existence d’un crime contre l’humanité. En cela, la justice a suivi la loi Gayssot votée en 1990 qui condamne la contestation de l'existence des crimes contre l'humanité, définis dans le statut du Nuremberg. Elles trouvent aujourd’hui de nouveaux adeptes dans les cercles islamistes radicaux, toutes révélant la survivance d’un antisémitisme séculaire, comme l’a montré la conférence organisée en Iran en décembre 2006 qui a rassemblé les négationnistes du monde entier. Bien que l’initiative ait été condamnée par l’ensemble de la communauté internationale, Robert Faurisson y a participé.

Éclairage média

Par Vincent Casanova

Toute la rhétorique du discours négationniste apparaît dans cet entretien. Assis au fond d’un canapé, dans un espace neutre et indéfini, Faurisson égrène ses thèses avec aplomb : il prend son temps pour asséner ses propos avec certitude et se pose en maître de vérité alors qu’il déforme non sans mépris et arrogance la réalité historique.

L'usage récurrent de modalisateurs ("la prétendue extermination", "dit-on") cherche à instiller le doute. Le dispositif conçu par le journaliste vise à mettre à nu la froide horreur de tels propos. L'ensemble prend la forme d'un plan fixe sur le visage, sans aucun mouvement de caméra afin de ne pas parasiter l'audition du téléspectateur, qui doit ainsi ne pas en "croire ses yeux ni ses oreilles". Par ailleurs le journaliste n'apparaît pas à l'écran, sans doute pour ne pas être complice. À sa voix, on peut deviner sa jeunesse et son inexpérience. À l'aide d'un questionnaire qu'il a sans doute élaboré avec la plus grande minutie, il pose ses questions jusqu'au moment où Faurisson refuse d'échanger.

L'armada d'interrogations qui sont soulevées à la fin de l'entretien reste sans réponse et semble bien contradictoire avec l'attitude de Faurisson qui se déclare porteur de la vérité et prêt à la révéler. Ses silences et sa volonté de couper court à l'entretien apparaissent comme un moyen de fuir face à des aberrations dont on se demande comment il peut y croire.

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