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Laurent Gbagbo investi président en Côte d'Ivoire malgré sa défaite électorale

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 04 déc. 2010

D'abord déclaré perdant à l'élection présidentielle contre Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo est proclamé président de la Côte d'Ivoire le 4 décembre 2010. Il organise alors sa propre cérémonie d'investiture, au cours de laquelle il prononce un discours. Les tensions entre partisans de Laurent Gbagbo et d'Alassane Ouattara s'exacerbent à Abidjan.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
04 déc. 2010
Production :
INA
Page publiée le :
05 sept. 2011
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001322

Contexte historique

Par Christophe Gracieux

Président de la République de la Côte d'Ivoire depuis 2000, Laurent Gbagbo a régulièrement reporté l'élection présidentielle qui devait initialement se tenir en 2005. Déchirée à partir de 2002 par un coup d'État puis une rébellion et une partition, la Côte d'Ivoire n'a été pacifiée qu'à partir des accords de paix de Ouagadougou et de la nomination du chef des rebelles Guillaume Soro comme Premier ministre en 2007.

Dix ans après la dernière, une élection présidentielle est enfin organisée en 2010. Il s'agit aussi de la première élection présidentielle libre et transparente en Côte d'Ivoire : les opérations électorales sont supervisées par l'ONU, présente sur le sol ivoirien depuis 2004 par le biais de l'Onuci (Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire). Le scrutin met aux prises Laurent Gbagbo et l'ancien Premier ministre Alassane Ouattara. Économiste, directeur du département Afrique au Fonds monétaire international de 1984 à 1988, ce dernier a dirigé le gouvernement de 1990 à 1993. Après une campagne électorale émaillée de quelques affrontements, le président sortant arrive en tête au premier tour, le 31 octobre 2010, avec 38 % des voix contre 32 % pour Alassane Ouattara. Celui-ci forme alors une alliance avec l'ancien président de la République Henri Konan Bédié, arrivé troisième avec 25 % des voix.

À l'issue du second tour, tenu le 28 novembre suivant, auquel participent 80 % des électeurs ivoiriens, Alassane Ouattara est proclamé vainqueur le 2 décembre par la Commission électorale indépendante, dont les résultats sont certifiés par l'ONU : il l'emporte avec 54,1 % des voix contre 45,9 % pour Laurent Gbagbo. Cependant, dès le lendemain, le Conseil constitutionnel ivoirien annule 600 000 voix pour fraudes présumées et proclame Laurent Gbagbo vainqueur de l'élection présidentielle avec 51 % des suffrages. Or, le Conseil constitutionnel est entièrement acquis au président sortant. L'ONU, la France, l'Union africaine, les États-Unis et tous les pays de l'Union européenne apportent alors leur soutien à Alassane Ouattara.

Laurent Gbagbo refusant le verdict des urnes, la Côte d'Ivoire se retrouve avec deux présidents : l'un démocratiquement élu, Alassane Ouattara, et l'autre qui ne se résout pas à quitter le pouvoir, Laurent Gbagbo. Celui-ci organise même la cérémonie de sa propre investiture dès le 4 décembre 2010 à Abidjan, la capitale économique ivoirienne. Retranché pendant plusieurs mois à l'Hôtel du Golf à Abidjan, sous la protection des Nations unies, Alassane Ouattara forme un nouveau gouvernement dirigé par Guillaume Soro, ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo et chef de l'ancienne rébellion qui domine le nord de la Côte d'Ivoire depuis 2002.

À partir du 16 décembre 2010, des affrontements sanglants éclatent à Abidjan entre les partisans d'Alassane Ouattara et les forces loyales à Laurent Gbagbo, alors que les premiers tentent de marcher sur la télévision nationale, tenue par le président sortant. La crise dure quatre mois. Elle ne prend fin qu'à partir de l'adoption à l'unanimité par le Conseil de sécurité, le 30 mars 2011, de la résolution 1975 autorisant le recours à la force pour interdire l'utilisation d'armes lourdes contre la population. Puis, le 11 avril 2011, une offensive est menée contre la résidence de Laurent Gbagbo par les forces d'Alassane Ouattara, soutenues par les troupes de l'Onuci et les soldats français de la force Licorne. Laurent Gbagbo est ainsi arrêté. Devenu le président effectif de la Côte d'Ivoire, Alassane Ouattara appelle alors à la constitution d'une « commission vérité et réconciliation » et demande à ses partisans de ne pas se livrer à des représailles.

Éclairage média

Par Christophe Gracieux

Ce reportage, réalisé à Abidjan par les envoyés spéciaux de France 2, propose un récit du principal événement de la journée du 4 décembre 2010 : l'investiture de Laurent Gbagbo comme président de la Côte d'Ivoire. Battu dans les urnes par Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo tente en effet de remporter la bataille de l'image. Refusant de quitter le pouvoir, il se présente comme le président légitimement élu de la Côte d'Ivoire.

Minutieusement mise en scène par Laurent Gbagbo lui-même, la cérémonie d'investiture vise à montrer qu'il a été reconduit au poste de chef de l'État de manière légale, conformément à la Constitution. Les différentes étapes de la cérémonie servent toutes à mettre en valeur la légitimité de Laurent Gbagbo. Il est ainsi officiellement proclamé comme président par le Conseil constitutionnel – la même instance qui l'avait déclaré vainqueur de l'élection présidentielle la veille, alors qu'une commission électorale indépendante avait proclamé Alassane Ouattara président. Puis il se voit remettre l'insigne présidentiel et prête serment. Son passage en revue de l'armée sert également à témoigner de la loyauté des militaires au chef de l'État.

Pourtant, plusieurs éléments dans le reportage indiquent clairement l'illégitimité de Laurent Gbagbo. D'abord, de façon très surprenante, en se comparant dans son discours d'investiture à Napoléon qui avait lui-même posé la couronne impériale sur sa tête le jour de son sacre le 2 décembre 1804, Laurent Gbagbo trahit clairement ses intentions. Maladroite ou cynique, la comparaison de celui qui est réputé pour ses qualités de tribun avec l'empereur français n'est pas des plus heureuses. Napoléon a en effet lui-même régulièrement violé la souveraineté populaire, organisant un coup d'État en 1799, puis mettant en place des simulacres d'élections et concentrant tous les pouvoirs. En outre, l'illégitimité de Laurent Gbagbo transparaît dans la composition du public qui assiste à cette cérémonie d'investiture : il n'est constitué que de partisans du président sortant. L'absence de diplomate européen ou américain montre également qu'il n'est pas reconnu par la communauté internationale. Enfin, le dernier élément qui témoigne de l'illégitimité de Laurent Gbagbo réside dans les derniers plans du reportage : les images du cortège présidentiel escorté de soldats indiquent que Laurent Gbagbo a besoin de s'appuyer sur l'armée pour rester au pouvoir et que les partisans d'Alassane Ouattara n'acceptent pas l'investiture de Laurent Gbagbo.

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