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La chaîne de télévision qatarie Al Jazeera

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 21 mai 2004

Installée à Doha, au Qatar, la chaîne de télévision d'information Al Jazeera émet à destination du monde arabe. De nombreux journalistes travaillent dans sa salle de rédaction. Le présentateur Ahmed Krichen récuse les accusations d'antiaméricanisme. Le rédacteur en chef Ahmed Sheikh condamne les sévices commis par des soldats américains sur des détenus irakiens à la prison d'Abou Ghraib.

Niveaux et disciplines

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
21 mai 2004
Production :
INA
Page publiée le :
23 sept. 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001375

Contexte historique

Par Christophe Gracieux

La chaîne satellitaire d'information Al Jazeera a vu le jour le 1er novembre 1996 à Doha, dans le petit émirat du Qatar. Financée à moitié par ce dernier, elle a été lancée par l'émir Hamad Ben Khalifa Al-Thani lui-même. Diffusée en langue arabe, cette chaîne de télévision, dont le nom signifie « la péninsule » ou « l'île », espérait alors devenir le premier organe d'information du monde arabe.

Émettant en continu dès 1999, Al Jazeera voit son audience et son influence croître sensiblement à partir d'octobre 2001 et de l'intervention des États-Unis contre les talibans en Afghanistan. Elle offre en effet une couverture très complète du conflit : elle est la seule autorisée par les talibans à pouvoir filmer dans les régions qu'ils contrôlent et à disposer de correspondants sur place. Al Jazeera se fait également connaître dans le monde entier par la diffusion d'enregistrements vidéo ou sonores d'Oussama Ben Laden et de différents responsables d'Al-Qaïda. Elle diffuse ainsi un premier message du chef de l'organisation terroriste le 7 octobre 2001, jour même du début de la guerre en Afghanistan.

Dès lors, Al Jazeera va très régulièrement être accusée par les États-Unis de se faire le porte-parole d'Al-Qaïda et de relayer un sentiment anti-américain au sein des pays arabes. Dès octobre 2001, le secrétaire d'État américain Colin Powell se plaint auprès de l'émir du Qatar du traitement par Al Jazeera des événements qui font suite aux attentats du 11 septembre 2001. Les locaux de la chaîne d'information qatarie sont du reste bombardés par l'armée américaine en 2001 à Kaboul et en 2003 à Bagdad. Selon un article paru dans le quotidien britannique The Daily Mirror en 2005, le président américain George W. Bush aurait même envisagé de bombarder le siège d'Al Jazeera à Doha avant d'en être dissuadé par le Premier ministre britannique Tony Blair.

C'est précisément en raison de sa couverture des guerres en Afghanistan et en Irak qu'Al Jazeera s'est imposée comme une chaîne d'information mondiale. Elle s'est alors affirmée comme une concurrente redoutable pour l'américaine CNN et la britannique BBC. Ses ambitions mondiales se sont trouvées confirmées par le lancement le 15 novembre 2006 d'une chaîne d'information en anglais, Al Jazeera English. Disposant de nombreux bureaux et recrutant des journalistes confirmés au sein des grandes chaînes anglo-saxonnes, elle connaît un succès rapide. En 2012, elle comptait 200 millions de téléspectateurs dans le monde entier.

Regardée par 50 millions de téléspectateurs arabes, Al Jazeera s'est par ailleurs imposée comme un acteur incontournable dans le monde arabe. Le franc-parler qui prévaut dans ses émissions a du reste souvent valu à la chaîne qatarie de subir les foudres des monarchies pétrolières du Golfe persique. Al Jazeera a également joué un rôle essentiel lors du « Printemps arabe » en 2011. La chaîne a non seulement accordé une très grande couverture aux révolutions qui ont alors emporté les régimes tunisien, égyptien et libyen. Mais surtout elle a ouvertement pris parti pour ces mouvements démocratiques. Depuis 2011, elle continue de leur accorder une place importante sur son antenne couvrant abondamment la rébellion en Syrie contre le régime de Bachar Al-Assad ou les soubresauts révolutionnaires en Égypte.

Al Jazeera a parallèlement poursuivi sa croissance en se diversifiant : elle a créé une chaîne pour enfants en 2005, une dédiée aux documentaires en 2007 et une consacrée à l'Égypte en 2011 ainsi qu'un bouquet de chaînes sportives. Elle s'est également établie en Europe en ouvrant deux chaînes sportives en France en 2012, BeIn Sport et BeIn Sport 2, qui disposent désormais d'1,5 million d'abonnés. Le groupe qatari a par ailleurs lancé en août 2013 une chaîne aux États-Unis, Al Jazeera America, après avoir racheté le réseau Current TV. Il prévoit aussi la création d'une chaîne d'information en français.

Éclairage média

Par Christophe Gracieux

Consacré à Al Jazeera, ce reportage a été tourné à Doha au siège même de la chaîne qatarie en mai 2004. Diffusé dans le journal télévisé de 20 heures de France 2 le 21 mai 2004, il a été réalisé peu après la révélation des sévices pratiqués par des soldats américains sur des détenus irakiens dans la prison d'Abou Ghraib en 2003 et 2004. Il s'agit donc essentiellement pour l'envoyé spécial de France 2 Bernard Lebrun de traiter du positionnement d'Al Jazeera à l'égard des États-Unis. Aussi ce reportage se décompose-t-il en deux séquences distinctes : la première porte sur la chaîne qatarie elle-même, la seconde sur son traitement des actions américaines au Moyen-Orient.

Filmée au sein même du siège d'Al Jazeera, la première séquence s'intéresse au travail des équipes de la chaîne. Elle propose ainsi des plans de la salle de rédaction dans laquelle les journalistes sont au travail devant leur ordinateur. Elle laisse également apercevoir un journaliste qui lit un prompteur devant les caméras et suit l'un des présentateurs, le Tunisien Ahmed Krichen au sein des locaux de la chaîne. Quelques rapides plans donnent en outre à voir la régie de la chaîne de télévision au sein de laquelle œuvrent le réalisateur et ses assistants. Si une majorité de l'équipe d'Al Jazeera semble vêtue à l'occidentale, certains hommes portent la dishdasha, vêtement long traditionnel pour les hommes de la Péninsule arabique, et certaines femmes le voile. Le plan sur la photographie du journaliste palestinien Tarik Ayub tué à Bagdad en 2003 dans le bombardement américain des locaux d'Al Jazeera vient rappeler le danger que courent les journalistes de la chaîne qui couvrent notamment les conflits en Irak ou en Afghanistan.

La deuxième séquence du reportage s'intéresse surtout à l'antiaméricanisme supposé d'Al Jazeera. De fait, la chaîne qatarie a souvent été la cible de l'administration de George W. Bush. Celle-ci la jugeait résolument hostile aux États-Unis et l'accusait de contribuer à répandre un sentiment anti-américain au sein des pays arabes. Cette profonde méfiance américaine à l'égard d'Al Jazeera était notamment alimentée par la diffusion régulière sur son antenne à partir de 2001 d'enregistrements vidéo d'Oussama Ben Laden et d'autres responsables d'Al-Qaïda.

La question de la ligne éditoriale d'Al Jazeera à l'égard des États-Unis se retrouve au cœur des deux interviews des journalistes de la chaîne qatarie interrogés par Bernard Lebrun : le présentateur tunisien Hamed Krichen et le rédacteur en chef palestinien Ahmed Sheikh. Le premier récuse ainsi les accusations portées par le secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld contre sa chaîne. Le deuxième condamne quant à lui les traitements dégradants pratiqués par des soldats américains sur des prisonniers irakiens dans la prison d'Abou Ghraib. Ce n'est pourtant pas Al Jazeera qui a révélé ce scandale. C'est une chaîne de télévision américaine, NBC, qui dans son émission 60 Minutes II avait diffusé le 28 avril 2004 des photographies de détenus irakiens soumis à des sévices. NBC avait même retardé de deux semaines la publication des photographies en raison des pressions des autorités américaines qui souhaitaient l'empêcher.

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