Un entrepreneur agricole chinois au Sénégal

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 08 juin 2009

Un ancien vendeur de matériel agricole chinois s'est établi au Sénégal où il produit et commercialise des graines de sésame à destination du marché chinois. Son activité crée des emplois annexes et transforme l'agriculture traditionnelle des villages environnants.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Complément d'enquête
Date de diffusion du média :
08 juin 2009
Production :
INA
Page publiée le :
25 nov. 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001481

Contexte historique

Par Claude Robinot

La présence des Chinois sur le continent africain provoque beaucoup de commentaires, louangeurs et critiques. Elle est vécue comme une chance pour les uns, comme une colonisation rampante par les autres. Les pays occidentaux voient d'un mauvais œil ces concurrents asiatiques qui s'installent dans une ancienne chasse gardée. Il est vrai que le commerce chinois avec l'Afrique a beaucoup progressé : de 4,9 milliards d'euros en 2000 à 125 milliards en 2011. Mais d'autres chiffres démentent ce discours alarmiste. L'U.E en 2012 est encore le premier partenaire commercial de l'Afrique pour les importations comme pour les exportations.

Quand on regarde la liste des premiers partenaires commerciaux de la Chine sur le continent (Nigéria, Angola, Algérie, Afrique du sud, Congo) il est facile de s'apercevoir que la présence de la Chine, comme celle des Etats-Unis et de l'UE est en grand partie motivée par l'importation d'hydrocarbures et de minerais. Ce que confirme l'analyse de la structure des importations par produits. Les produits énergétiques et minéraux comptent pour plus de 80 % et les produits agricoles tournent autour de 3 %. Au total, les importations africaines en Chine ne dépassent pas 3,5 % de l'ensemble. En revanche, les exportations chinoises vers l'Afrique ont un poids supérieur qui équivaut à 13 % du PIB du continent. Le panier d'importations chinoises est composé d'appareils électriques et de communication (30 %), de textiles (18 %) et de matériel de transport (13 %). Derrière ces statistiques, se cachent les biens bon marché accessibles aux modestes consommateurs africains (téléphones, tissus, cyclomoteurs). La présence chinoise se manifeste aussi par des investissements directs dont les plus visibles sont les infrastructures routières ou ferroviaires construites par des entreprises chinoises dans les pays fournisseurs de matières premières : des voies ferrées au Nigéria, un stade au Bénin, une raffinerie et des autoroutes au Soudan. On compte environ 1600 entreprises chinoises en Afrique et probablement 1 million d'expatriés chinois sur le continent. Le dernier projet d'envergure consiste en la création de 5 zones économiques spéciales (ZES) dans lesquelles les entreprises chinoises pourront s'installer et bénéficier d'avantages tarifaires. Dans le domaine agricole, la Chine s'appuie sur les nouvelles règles de l'OMC qui ont libéralisé le secteur et contribué à faire disparaître l'aide publique aux projets de développement agricole. Comme pour les matières premières industrielles, la Chine signe des accords commerciaux d'approvisionnement. En échange, elle offre une aide technique et promet des investissements locaux. Les échanges avec le Mali, le Bénin, le Burkina Faso et le Togo ont brusquement augmenté depuis 2002 grâce au coton. Au Mali, les Chinois gèrent une usine de transformation du coton et construisent des raffineries de sucre. Les Chinois auraient acquis l'exploitation de 20 000 ha de terres agricoles répartis sur plusieurs pays.

Au sommet Sino-Africain de Beijing (2006), la République populaire s'est engagée à créer 10 centres techniques agricoles pour améliorer les techniques productives africaines. Une raffinerie béninoise peut maintenant exporter du sucre vers le marché européen. L'intérêt chinois pour l'agriculture africaine est multiple : il permet de diversifier les investissements, il garantit des approvisionnements en produits et en terres, il ouvre des marchés en Afrique mais c'est aussi un moyen détourné d'intervenir sur le marché mondial. C'est ainsi qu'il faut voir les accords signés entre la Chine et le Sénégal. Les échanges restent modestes (549 millions de $ en 2010, dont 10 % pour l'huile d'arachide) mais la Chine pénètre un nouveau marché. Les commerçants traditionnels syro-libanais et Baol Baol qui assuraient la vente de gros et de détail dans les rues de Dakar sont chassés par les Chinois importateurs de produits à très bon marché.

Éclairage média

Par Claude Robinot

La vidéo est extraite du magazine d'actualité de France 2 Complément d'enquête dirigé par Benoît Duquesne dont la raison d'être est de prolonger par des reportages et des avis d'experts une question qui est trop rapidement abordée par l'actualité quotidienne. Le sujet de la présence chinoise en Afrique est devenu familier aux téléspectateurs depuis le début des années 2000, avec parfois des sous-entendus qui évoquent le « péril jaune » d'antan. En l'occurrence, le commentaire commence par une formule ambiguë : « pour les Chinois le véritable enjeu de demain c'est la terre » qui laisse entendre que la présence asiatique en Afrique vise l'achat ou l'accaparement des terres.

L'exemple qui nous est détaillé ensuite montre autre chose : Riping Ouyang est un entrepreneur qui est passé de la vente de matériel agricole à la commercialisation du sésame. Sa réussite, il la doit à sa connaissance de la filière et du marché. Il fournit les semences dont on voit les sacs dans l'entrepôt à proximité de celui des machines agricoles, il contrôle la transformation et les sous-produits comme les aliments pour bétail et il maîtrise la vente des grains ou de l'huile à destination du marché chinois. Il dit pouvoir cultiver le sésame sur 35 000 hectares au Sénégal, dont il est loin d'être propriétaire. La séquence suivante nous montre une communauté villageoise où, à son instigation, le sésame a remplacé la culture traditionnelle de l'arachide. On devine les négociations qui ont dû avoir lieu sous le baobab pour convaincre les chefs de village.

Les images sont éloquentes entre la tenue soignée des notables et celle des simples paysans, entre les haillons des enfants dans les campagnes et les tenues des ouvriers dans la ville. La réussite de M. Riping Ouyang tient plus au savoir-faire d'un entrepreneur qui connaît le marché et qui vit en Afrique depuis plus de vingt ans qu'à une volonté d'accaparer des terres.

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