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Les fouilles archéologiques controversées de Jérusalem

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 09 févr. 2007

Le reportage est tourné à Jérusalem par Charles Enderlin, où des incidents ont eu lieu entre palestiniens et policiers israéliens sur l'esplanade des mosquées en réaction aux fouilles archéologiques israéliennes aux abords de la mosquée al Aqsa. Les travaux font craindre aux musulmans que les équipes israéliennes touchent aux fondations de ce haut lieu de l'islam.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
09 févr. 2007
Production :
INA
Page publiée le :
26 nov. 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001513

Contexte historique

Par Alexandre Boza

Dans le cadre du conflit qui oppose Arabes et Juifs à Jérusalem, et au-delà entre Israéliens et Palestiniens, l'histoire et l'archéologie sont des arguments de poids dont les deux parties sont conscientes. En 2007, Israël décide de procéder à des rénovations près d'une entrée de l'esplanade des mosquées (le mont du Temple pour les juifs). Un chantier de rénovation de la rampe est lancé et parallèlement, des fouilles archéologiques sont entamées sous l'esplanade des mosquées pour trouver des vestiges du palais du roi David. Le Premier ministre palestinien, Ismaïl Haniyeh, appelle alors à la mobilisation contre des travaux qui mettraient en péril les fondations du site. Le Hamas menace de mettre un terme au cessez-le-feu si les fouilles ne sont pas stoppées. La Jordanie, l'Egypte et le Maroc demandent leur arrêt immédiat. Une mission d'experts du patrimoine se rend sur place à la demande de l'Unesco et rend ses conclusions par une demande plus nuancée de prudence sur le site fragile et sensible.

De tels incidents se sont déjà produits. En 1996, le creusement d'un tunnel dégénère en émeutes, faisant 76 victimes. En 2006, les découvertes des archéologues israéliens Eilat Marzar et Gabriel Barkay suscitent l'émoi. Elle tendent à prouver que les juifs auraient vécu à Jérusalem au moins seize siècles avant les musulmans. Parmi les débris extraits du sous-sol de l'esplanade des Mosquées est découvert un sceau, ou bulla, datant du XIe siècle avant notre ère, époque du premier temple de Jérusalem. Les archéologues annoncent alors officiellement qu'ils pensent avoir exhumé les vestiges du palais du roi David sous Jérusalem-Est, partie majoritairement arabe de la ville sainte.

Les Palestiniens font remarquer qu'Eilat Mazar est la petite fille de Benjamin Mazar qui, après la conquête de Jérusalem-Est en 1967, a dirigé d'énormes chantiers de fouilles sur la façade sud du mont du Temple. Benjamin Mazar et son collègue Yigal Yadin ont fait de l'archéologie une passion nationale israélienne. Les musulmans affirment cependant que l'archéologue israélien a détruit des vestiges islamiques pour accéder plus vite aux couches de terrain où il pensait trouver des pièces importantes pour l'antiquité juive de Jérusalem. Eilat Mazar s'oppose de son côté au mouvement islamique du Sheikh Raed Salah. Elle l'accuse de détruire les traces du passé juif et chrétien sur le mont du Temple.

Au sein de la communauté scientifique la tension est également vive. La querelle oppose les « biblistes », pour lesquels la Bible rapporte fidèlement l'histoire, comme une chronique, aux « minimalistes » qui, autour de l'archéologue israélien Israël Finkelstein, défendent l'idée d'un roi David pauvre. Ce dernier n'aurait pas mené toutes les conquêtes que lui prête le texte sacré ravalé au rang de récit légendaire.

Éclairage média

Par Alexandre Boza

Les images montrent une situation de guerre qui n'est pas sans rappeler l'intifada de 2001. La violence du conflit qui oppose les deux populations sur le contrôle des lieux saints de Jérusalem est une dimension non négligeable du conflit israélo-palestinien. Les Palestiniens jettent des pierres en direction des policiers israéliens sur l'esplanade des mosquées en réaction aux fouilles archéologiques effectuées aux abords de la mosquée Al Aqsa. La police anti-émeutes réplique par des tirs de grenade et de lacrymogènes.

Les explosions dans ces vestiges sont impressionnantes. Elles déclinent toute l'imagerie du conflit : confusion lors des assauts pendant lesquels les journalistes sont mêlés aux civils, transport de blessés aux visage livides, des lieux aux noms évocateurs du conflit (la Vieille ville et Jérusalem-Est qui sont les points de contact des deux communautés séparées). La violence ordinaire de la région se déchaîne à Jérusalem et Hebron. Les forces de l'ordre sont lourdement armées, nombreuses, violentes comme le montrent les images de l'arrestation très musclée de l'un des dix-sept manifestants par plusieurs hommes armés de longues matraques. La réplique palestinienne est filmée de plus loin, même si elle demeure impressionnante comme ce parpaing lâché sur un véhicule militaire. Enfin les images de la mosquée al-Aqsa et de son évacuation alors que le calme revient sur l'esplanade rappellent la situation de tension très vive dans la ville. Le moment de la prière du vendredi est important pour la mobilisation des fidèles et sur ce lieu saint de l'islam la situation peut rapidement devenir explosive.

Charles Enderlin, grand reporter et chef du bureau de France 2 à Jérusalem, est l'un des plus fins observateurs de la région. Il montre à quel point politique, religion et culture sont intriqués dans la ville. Ikrima Sabri, chef du haut conseil islamique de Jérusalem, estime que l'attaque était planifiée par la police israélienne pour empêcher les manifestations contre les travaux israéliens près de la porte des Maghrébins et pour « créer des faits accomplis dans ce lieu saint », le troisième de l'Islam. Il reprend le discours critique de la colonisation des territoires occupés par l'Etat israélien pour discréditer les opérations de restauration.

La rampe de 75 mètres en cours de reconstruction est montrée dans un plan large de l'esplanade des Mosquées, puis un panoramique au cours duquel le commentaire rappelle les raisons des violences qui ont fait trente-cinq blessés. « Il s'agit de reconstruire la rampe en dur qui relie l'esplanade du mur des Lamentations à la porte des Maghrébins qui s'était effondrée en 2004. Les archéologues israéliens entendent également fouiller le site. Cela sans coordination avec les responsables musulmans. » En effet, fragilisé par les intempéries, un mur de soutènement de la rampe s'est écroulé. En juin 2005, un pont provisoire en bois a été posé. Les Israéliens veulent installer une passerelle, ou reconsolider la rampe car elle conduit à la porte des Maghrébins placée sous autorité israélienne exclusive et n'est pas ouverte aux musulmans. C'est par là également qu'accèdent les touristes, ou les fidèles juifs sous escorte policière.

Cette zone est un lieu en partage des deux religions : un morceau près du mur comprend les restes d'une maison où prient des femmes juives ; une porte pourrait provenir du temple d'Hérode et il existe une salle de prière, sacrée pour les musulmans car elle aurait abrité Al-Buraq, le cheval du prophète Mahomet. Un dialogue de sourds s'installe entre les deux communautés qui se suspectent de vouloir établir des situations de fait au détriment de l'autre : les Palestiniens craignent un effondrement de la mosquée, les Israéliens souhaitent dégager la rampe qui a un intérêt archéologique. Une mission de l'Unesco dépêchée sur place s'est montrée rassurante sur l'état des travaux et la stabilité du mur, mais s'inquiète de l'absence de dialogue entre les communautés. Les fouilles se font à la pelle et à la pioche pour ne pas compromettre la stabilité du mur. Elles sont retransmises en vidéo en permanence.

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