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L'art contemporain à Nantes : l'opération « Estuaire 2007 »

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 08 juin 2007

Le reportage, consacré à l'opération « Estuaire 2007 », présente ce parcours d'art contemporain proposé sur l'estuaire de la Loire entre Nantes et Saint-Nazaire. Les artistes sont conviés à proposer des œuvres in situ pérennes et contribuer ainsi à changer le regard sur l'estuaire.

Niveaux et disciplines

Ressources pédagogiques utilisant ce média

  • Niveaux: Cycle 3

    L’art in situ

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
08 juin 2007
Production :
INA
Page publiée le :
26 nov. 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001516

Contexte historique

Par Alexandre Boza

La ville de Nantes initie en 2005 l'idée d'une grande manifestation culturelle articulée sur la Loire afin de transformer l'image de la « Belle endormie » en métropole dynamique. Une « Fête de la Loire et de l'Atlantique » pour un coût de sept millions d'euros est initialement prévue pour créer un événement de promotion touristique et économique de Nantes et de la Loire-Atlantique, sinistrée économiquement. Avec le changement de majorité, la gauche demande au scénographe et directeur artistique Jean Blaise de mettre en place une opération artistique culturelle fédératrice pour « accompagner son projet politique ». Il est à l'origine du Festival des Allumés, de la Folle journée de Nantes et propose Estuaire 2007 : des artistes venus du monde entier pour fabriquer des œuvres sur le tracé de la Loire jusqu'à son embouchure à Nantes. Ces installations sont pérennes et visent à attirer vers le fleuve pour pouvoir aborder d'autres thématiques comme le développement durable et l'aménagement du territoire.

Nantes n'est pas la première ville à proposer un tel dispositif. L'« Île-aux-Pierres » de Vassivière en Limousin est ainsi habitée depuis 2015 par quinze sculptures de granit, la pierre de la région, réalisées par des sculpteurs de renom (Jean-François Demeure, Pierre Digan...) pour créer « l'art dans l'île ». Mais le dispositif est de petite dimension et n'atteint pas la systématicité de l'Estuaire que revendique Jean Blaise : « tout part du paysage. En sélectionnant un site, on se disait : tiens, là, peut-être qu'untel ou untel pourrait faire quelque chose... La deuxième particularité d'Estuaire, c'est que normalement une biennale a vocation à perdurer. Nous avons au contraire décidé dès le début qu'il n'y aurait que trois éditions. La collection d'oeuvres ainsi créée, il nous faut à présent l'entretenir et l'animer. L'art dans l'espace public, c'est très complexe à gérer. Nous voulons faire en sorte que cette collection soit sans cesse visitée. Pour cela, nous travaillons sur les liaisons entre les oeuvres, les pistes cyclables et l'hébergement » [Le Monde, dossier spécial, 15 juin 2012] .

L'opération Estuaire 2007 connaît un tel succès qu'elle est reconduite sous forme de biennale en 2009 et 2012 pour devenir « une collection permanente à ciel ouvert » [titre du dossier de presse pour l'édition 2012]. Au final, vingt-huit œuvres sont installées entre Nantes et Saint-Nazaire pour habiter et habiller cet espace. Le dispositif, installé pour durer, connaît pourtant des modifications. La Maison dans la Loire de Jean-Luc Courcoult, installée en 2007 à Lavau-sur-Loire, est reproduite à Couëron en 2012 car la première n'a pas résisté à la force du fleuve.

Le dispositif de l'estuaire est repensé comme un prolongement de l'opération plus touristique qu'est le Voyage à Nantes. Comme le reconnaît Jean Blaise qui en assure la direction, « l'impact sur le tourisme a été tel que nos édiles nous ont demandé de continuer. Les nuitées hôtelières, calculées sur la base de la taxe de séjour, ont augmenté de 10 % sur l'année, alors que celles des autres villes de même importance ont au mieux stagné. Le but du « Voyage à Nantes », c'est ça : faire venir des touristes à partir de l'énorme offre culturelle ». Nantes se définit comme métropole culturelle avec cette grande manifestation qui tient du festival à la fois touristique et culturel.

Éclairage média

Par Alexandre Boza

L'exposition prend place entre Nantes et Saint-Nazaire pour les relier par des œuvres d'art qui « flottent sur la Loire ou en plein milieu des marais », créant un « voyage original et surréaliste ».

Une vingtaine d'oeuvres sont installées dans la ville de Nantes. Les Anneaux de Daniel Buren et Patrick Bouchain ponctuent le quai des Antilles, « des anneaux à bateaux ou des fers aux chevilles des esclaves du commerce triangulaire » qui s'éclairent quand vient le soir. Chaque anneau de quatre mètres de diamètre porte la signature de l'artiste : des bandes verticales alternées de 8,7 cm de largeur. Ils permettent de voir la ville autrement, car pour Buren, « d'un anneau à l'autre, ce qui apparaît c'est un morceau de l'estuaire, un morceau de la ville, un morceau de l'eau et du ciel, et au fur et à mesure de ce grand grand travelling on découvre tout ce lieu ».

Ces dix-huit « cerceaux » ouvrent le parcours d'art contemporain le long du fleuve. Des œuvres diverses et déroutantes sont posées le long d'une croisière de soixante kilomètres qui permet également de découvrir « les villages le long de l'estuaire ». Le reportage insiste sur les logiques d'appropriation des lieux et des œuvres par les habitants, les « locaux ». Il est question d'art mais également de production d'un lien social sur le territoire par le biais d'oeuvres qui pour Josette Pedron, retraitée, « agrémentent bien les quais. C'est une attraction qui va déplacer des gens ». La Maison dans la Loire réalisée par Jean-Luc Courcoult interroge. L'oeuvre d'art in situ est d'un réalisme troublant : est-ce une œuvre ou une maison ? Comment s'est-elle retrouvée là ? Réalisée dans le style architectural de la région, elle ouvre vers une réflexion sur le paysage, sa formation, son organisation, car « elle raconte les changements du cours du fleuve ».

Saint-Nazaire prend une nouvelle dimension avec les installations : le pont est davantage un ouvrage d'art car il est montré au même titre que les œuvres. Les quais de déchargement de conteneurs avec les grues gagnent en identité et en humanité avec l'installation de Felice Varini. Les « suites de triangles » obligent le public à observer, chercher le bon point du vue et encore une fois à s'approprier, au moins visuellement, les lieux. Varini « aime bien mettre en valeur, révéler. Quand [sa] pièce révèle les choses, [il peut se] considérer très heureux. Dans ce cas, [...] le silo révèle [sa] peinture et vice et versa ». L'intérêt vient de l'approche ludique de l'art contemporain qui est proposée : découverte d'un territoire en même temps que des œuvres, le dispositif crée de l'attachement. En 2012, Jean Blaise rappelle qu'Estuaire, « c'est une aventure politique, au vrai sens du mot : tout d'un coup, un territoire façonné au fil des siècles, mais qui n'existe pas dans l'inconscient collectif, divisé entre Nantais d'un côté et Nazairiens de l'autre. Avec Estuaire, c'est aussi un symbole que l'on crée ».

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