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Voltaire : l'affaire Calas

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 01 juin 1978

Ce diable d'homme, feuilleton historique, retrace en 1978 la vie de Voltaire, dans un scénario de Claude Brulé et une réalisation de Marcel Camus. Ici est présenté un extrait du 5ème épisode : Le Supplicié de Toulouse.

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
01 juin 1978
Production :
INA
Page publiée le :
18 févr. 2014
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001591

Contexte historique

Par Alexandra Von Bomhard

François Marie Arouet, dit Voltaire, est une figure emblématique du XVIIIe, le Siècle des Lumières. Ecrivain «multiforme» selon d'Alembert, il est à la fois poète, essayiste, dramaturge et historien. Par delà la diversité des genres littéraires qu'il explore, il assigne à sa plume une mission : éclairer la raison, défendre la liberté et la tolérance.

Né à Paris en 1694, Voltaire fait ses études à Louis-le-Grand, chez les jésuites. Il en retire une culture classique, un goût de la repartie, une passion pour le théâtre. Très jeune, Arouet brille dans les salons où il séduit par son esprit insolent. Ses pamphlets contre le Régent lui valent cependant d'être embastillé. Il triomphe au théâtre avec son Oedipe, puis dénonce, dans La Henriade, le fanatisme des Guerres de Religion. Suite à une dispute avec le chevalier de Rohan, il est de nouveau emprisonné, puis exilé en Angleterre. Il y découvre la monarchie parlementaire, la tolérance religieuse et l'esprit d'entreprise. De retour en France, il se lie avec Emilie du Châtelet, chez laquelle il se réfugie à Cirey lorsqu'il est menacé d'être arrêté après la publication de ses Lettres philosophiques en 1734. Cette retraite est en réalité studieuse et heureuse. Voltaire se passionne pour les sciences et l'histoire, publie en 1736 le poème satirique Le Mondain, et devient l'historiographe du roi Louis XV. Mais en 1748, il se retrouve en disgrâce à la cour de France et part pour Berlin, cédant aux appels de Frédéric II, avec qui il entretenait une abondante correspondance.

L'amitié qui unit le roi de Prusse et Voltaire symbolise l'alliance éclairée du pouvoir et de l'esprit, mais rapidement des dissensions surgissent entre les deux hommes. Le penseur des Lumières quitte la Prusse pour Genève. En 1755, Voltaire, bouleversé par la nouvelle du séisme meurtrier qui sévit à Lisbonne, s'engage dans une profonde réflexion sur la Providence et écrit son Poème sur le désastre de Lisbonne. Il défend L'Encyclopédie, condamnée au feu par le Parlement en 1759 et publie la même année Candide (voir ce document). En 1760, il s'installe dans son domaine de Ferney, sans se retirer du monde pour autant. Usant de sa notoriété pour dénoncer certaines affaires judiciaires, le philosophe obtient la révision de quelques procès injustes et la réhabilitation d'innocents comme Calas ou Sirven. Ses écrits, tels son Traité sur la tolérance ou son Dictionnaire philosophique portatif, diffusent les valeurs du Siècle. De retour en France en 1778, il connaît un triomphe, même s'il n'est pas reçu à la Cour. Il meurt le 30 mai de la même année en laissant derrière lui ce testament : « Je meurs en adorant Dieu, en aimant mes amis, en ne haïssant pas mes ennemis et en détestant la superstition ».

Le 13 octobre 1761, Marc-Antoine Calas est retrouvé mort dans le magasin de son père, Jean Calas, un protestant. Celui-ci est accusé d'avoir tué son fils pour l'empêcher de se convertir au catholicisme, qui était la seule religion autorisée à l'époque. Y voyant une manifestation du fanatisme qu'il ne cesse de combattre, Voltaire s'empare de l'affaire et se lance dans une longue investigation. Dans son Traité sur la tolérance, publié en 1763, il démontre l'innocence de Calas et réhabilite la mémoire de l'accusé.

Éclairage média

Par Alexandra Von Bomhard

Né en 1912 et mort en 1982, Marcel Camus est fils d'instituteur, déporté dans un camp de prisonniers durant la Seconde Guerre mondiale. Il découvre, dans cet univers morne et sombre, le théâtre, qui le marque profondément, mais c'est finalement vers le cinéma qu'il se tourne à la fin de la guerre. Il devient assistant ou conseiller technique d'artistes de renom (Luis Buñuel, Alexandre Astruc, André Barsacq), réalise, en 1957, Mort en fraude, son premier long métrage, puis obtient la Palme d'Or l'année suivante avec Orfeu Negro. Il tourne, dans les années 1970, plusieurs séries pour la télévision, dont Ce diable d'homme. Composé de 6 épisodes, ce feuilleton retrace la vie trépidante de Voltaire et donne à voir les incidents littéraires, politiques et mondains qui ont scandé son parcours. «Le supplicié de Toulouse», avant-dernier épisode de la série, se concentre sur le récit de l'affaire Calas.

Ce feuilleton fait le choix de la reconstitution historique, tout en cherchant à donner corps et vie au grand esprit du Siècle. Si les décors de J. Dugied et R. Giordani et les costumes de Sylvie Poulet dessinent avec précision le cadre spatio-temporel (l'action se déroule au XVIIIe, dans la propriété de Voltaire, à Ferney, plus précisément dans son salon, où plusieurs grands esprits sont réunis), on note le souci qu'a le réalisateur de rendre le célèbre philosophe profondément humain. Cela va du café qu'on lui déconseille, à la colère qui s'empare de lui, l'empêchant de continuer son discours. Dans ce passage, le penseur fait part de ses réflexions concernant l'accusation que le Tribunal de Toulouse a porté contre le protestant Jean Calas. Il remet en cause une sentence qu'il juge inique. Le scénario de Claude Brulé est ici très nettement inspiré des écrits de Voltaire (notamment de son Traité sur la tolérance). La maîtrise rhétorique de Voltaire est la première garantie de l'efficacité de son discours. L'épiphore «Infamie !» scande son propos d'un accent de révolte, tout en rappelant la célèbre devise par laquelle le philosophe concluait ses missives («Ecr. l'inf», soit «Ecrasons l'infâme»). Les arguments avancés mettent à jour les incohérences du jugement rendu contre Jean Calas. Le penseur ne se limite cependant pas à convaincre son auditoire, il le persuade. L'extrait souligne en effet combien la force d'un texte dépend de la qualité de son interprétation. Le jeu véhément de Claude Dauphin (Voltaire) fait résonner le discours de toute sa colère (ce qui est mis en évidence par la lecture plus neutre momentanément proposée par le secrétaire). En revêtant l'ethos de l'indigné, Voltaire emporte son auditoire. L'efficacité du discours est d'ailleurs mise en évidence par les réactions admiratives de celui-ci («Quel homme !», «Vous êtes le plus grand esprit du Siècle», etc.). Enfin, les regards-caméra de Claude Dauphin/Voltaire, en impliquant le spectateur, l'invitent à prendre part à cette lutte contre l'obscurantisme.

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