Voyage du général de Gaulle sur les sites de la bataille de la Marne

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 09 sept. 1964 | Date d'évènement : 1914

Le 6 septembre 1964, dans le cadre des commémorations du 50e anniversaire de la bataille de la Marne, le général de Gaulle, président de la République, effectue un voyage officiel sur les sites qui ont vu l'armée française stopper l'offensive allemande vers Paris. Après avoir déposé des gerbes et rencontré des anciens combattants sur plusieurs sites, il se rend à Reims et prononce un discours devant la cathédrale.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Les Actualités françaises
Date de l'évènement :
1914
Date de diffusion du média :
09 sept. 1964
Production :
INA
Page publiée le :
05 nov. 2014
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001689

Contexte historique

Par Fabrice Grenard

Avec quelques autres batailles, comme celle de Verdun notamment, la bataille de la Marne (6-9 septembre 1914) constitue un moment fort dans la mémoire de la Première Guerre mondiale, puisqu'elle apparut comme un événement décisif, celui où l'armée française sut retourner la situation à son avantage en stoppant l'offensive allemande vers Paris. Si elle fut très coûteuse en hommes, avec des pertes à peu près équivalentes dans chaque camp (230 000 hommes côté français, 250 000 côté allemand), cette bataille de la Marne est bien considérée comme l'une des principales victoires françaises dès lors qu'elle sauva la capitale et que se joua dans une large mesure, à travers elle, le sort de la France. L'ordre rédigé par le général Joffre le 6 septembre 1914 était à cet égard tout à fait représentatif de l'importance cruciale des combats qui allaient se dérouler : « au moment où s'engage une bataille dont dépend le sort du pays, il importe de rappeler à tous que le moment n'est plus de regarder en arrière [...] Une troupe qui ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer ». Les Allemands pourtant ne considèrent pas forcément les combats de la Marne comme une défaite mais plutôt un « repli tactique » dès lors que cette bataille, si elle leur barra la route de Paris, ne les empêcha pas de continuer à occuper tout le Nord-Est de la France en renforçant leurs positions défensives.

Dès la fin de la guerre, la « victoire » de la Marne fit l'objet d'une attention particulière avec d'importantes commémorations ainsi que la délimitation d'une zone spécifique pour préserver la trace des combats. Pour minimiser les pertes très élevées, le discours se veut glorificateur et héroïque. Alors que les célébrations du 11 novembre sont l'occasion de développer une vision sacrificielle de la guerre, favorable à un discours plutôt pacifiste et au recueillement, les commémorations de la bataille de la Marne possèdent davantage une dimension héroïque et patriotique. Les commémorations du cinquantième anniversaire par le général de Gaulle en 1964 ne dérogent pas à la règle, pas plus d'ailleurs que celles du centième anniversaire, le président François Hollande effectuant à cette occasion quasiment le même voyage que celui du général de Gaulle cinquante ans plus tôt. L'ouverture récente du musée de la Grande guerre à Meaux, sur les lieux mêmes de la bataille de septembre 1914, permet d'illustrer la place toujours importante prise par cet événement dans notre mémoire nationale.

Éclairage média

Par Fabrice Grenard

La façon dont se déroule la commémoration du 50e anniversaire de la bataille de la Marne et le discours prononcé à cette occasion à Reims par le général de Gaulle s'inscrivent dans un contexte bien particulier : celui de la fin de son premier mandat de président, alors que doivent avoir lieu l'année suivante les premières élections présidentielles au suffrage universel direct. Les images de liesse autour du général de Gaulle lors de son déplacement permettent de souligner sa popularité (les foules se sont déplacées malgré la pluie, comme le montrent les nombreux parapluies). En prononçant son discours au pied de la cathédrale de Reims, où étaient autrefois sacrés les rois de France, de Gaulle accentue encore le caractère régalien de son déplacement, lui donnant une dimension quasi sacrée et liturgique. Le site de Reims est également tout à fait symbolique, puisque si la cathédrale, entièrement détruite en 1914-1918, permet de rappeler la violence du premier conflit mondial, c'est également à Reims que les Allemands signèrent leur capitulation sur le front ouest le 7 mai 1945. Cela permet donc de faire un lien entre les deux guerres, d'autant que l'année 1964 associe le cinquantenaire de la Première Guerre mondiale avec le vingtième anniversaire de la Libération de la France en 1944, dont de Gaulle avait été le principal acteur. Ses rencontres avec des anciens combattants rappellent aussi qu'il a été l'un des leurs. Surtout, le discours prononcé par le général de Gaulle au pied de la cathédrale de Reims et les deux phrases extraites qui en sont ressorties dans le commentaire sont l'occasion pour le président de faire passer un double message. Le premier est un appel à l'union de tous les Français dans les moments importants (la victoire de la Marne a été possible grâce à « la cohésion et la résolution de tous les Français » selon de Gaulle). Le second concerne le fait de toujours se souvenir du passé pour mieux faire face à l'avenir (« dans la vie d'un peuple, chaque action du passé entre en compte pour l'avenir » conclut le général dans son discours). Les célébrations de la bataille de la Marne en 1964 constituent donc bien pour le général de Gaulle le moyen de célébrer un moment décisif de la Première Guerre mondiale et de rappeler l'héroïsme des soldats français (le reportage propose plusieurs gros plans sur des anciens combattants arborant de nombreuses médailles gagnées par leur attitude au feu), mais aussi de faire passer un message politique très clair sur le rôle que doit avoir le passé sur les hommes. Une façon pour l'auteur de l'appel du 18 juin 1940 et chef de la France libre de rappeler qu'il reste le meilleur candidat à sa propre succession, même s'il n'a pas encore fait savoir officiellement qu'il se présenterait aux élections de 1965.

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