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80e anniversaire de l'armistice à Paris en présence de la reine d'Angleterre

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 11 nov. 1998

À l'occasion de la commémoration à Paris du 80e anniversaire de l'armistice, le 11 novembre 1998, le président Jacques Chirac et la reine d'Angleterre Elizabeth II déposent chacun une gerbe sur la tombe du soldat inconnu, puis se rendent devant la statue de Clemenceau avant d'inaugurer une statue de Churchill, près du Petit Palais.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
11 nov. 1998
Production :
INA
Page publiée le :
05 nov. 2014
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001691

Contexte historique

Par Fabrice Grenard

Occupant une place à part dans la mémoire collective, la commémoration de l'armistice du 11 novembre 1918 a toujours constitué un temps fort de la vie publique française. Son déroulement a toutefois connu d'importantes évolutions selon le contexte dans lequel se déroulait cette journée commémorative. Depuis la fin de la Première Guerre mondiale, certains 11 novembre ont ainsi occupé une place plus particulière sur le plan symbolique en raison de la résonance qu'ils ont pu avoir. Le second anniversaire de l'armistice, en 1920, a par exemple été l'occasion de l'inauguration de la tombe du soldat inconnu sous l'arc de triomphe. Le 11 novembre 1922 fut déclaré « journée de la victoire et de la paix » et c'est à cette occasion que la commémoration de l'armistice est devenue une journée fériée. Le 11 novembre 1938 fut l'occasion de renforcer l'unité nationale, au lendemain de la conférence de Munich et dans un contexte de montée des tensions en Europe. Le 11 novembre 1940 constitua l'une des premières manifestations résistantes en France occupée avec le défilé des étudiants parisiens alors que les Allemands et le gouvernement de Vichy avaient interdit de commémorer la fin du premier conflit mondial. À l'occasion du 11 novembre 1944, la France put célébrer à la fois la victoire de 1918 et sa libération de l'occupation allemande : de Gaulle et Churchill s'inclinèrent ensemble sur la tombe du soldat inconnu. Le cinquantenaire de l'armistice, le 11 novembre 1968, se déroula lui aussi dans un contexte particulier, quelques mois après la crise de mai 1968. Il permit au général de Gaulle d'apparaître à la fois comme un rassembleur et un garant de la puissance de la France, après avoir vu son autorité remise en cause quelques mois plus tôt.

Dans cette histoire des 11 novembre, le 80e anniversaire, en 1998, constitua lui aussi un moment particulier, pour plusieurs raisons. Le contexte politique tout d'abord, celui de la cohabitation, avec des tensions qui se développent entre le président de la République, Jacques Chirac, et le Premier ministre, Lionel Jospin, sur la question de la réhabilitation des « fusillés pour l'exemple ». Pour éviter d'alimenter la division à l'occasion d'une cérémonie se voulant « œcuménique », les deux hommes durent s'efforcer de ne pas évoquer le sujet alors que, quelques jours plus tôt, Jospin avait prononcé à Craonne un discours en faveur de la réhabilitation des fusillés (voir Discours de Lionel Jospin à Craonne). Cette commémoration de 1998 est également particulière du fait qu'il s'agisse de l'une des dernières à laquelle peuvent encore participer les acteurs de ce premier conflit mondial : six anciens combattants de 1914-1918 parmi les derniers survivants assistent ainsi aux cérémonies officielles qui se déroulent à Paris, ce qui leur donne une dimension particulière. Enfin, l'invitation de la reine d'Angleterre, Elizabeth II, à assister aux commémorations venait rappeler l'alliance franco-britannique et le lourd sacrifice consenti par les Anglais sur le sol français au cours de cette guerre, notamment lors de grandes offensives comme la bataille de la Somme (1916). L'un des objectifs de la commémoration du 80e anniversaire de l'armistice était d'ailleurs « d'évoquer l'histoire commune des nations combattantes ». Cela permettait aussi de donner une dimension pacifiste à l'événement en insistant sur l'importance de la construction européenne, garante de paix en Europe, après les deux conflits de 1914-1918 et 1939-1945.

Éclairage média

Par Fabrice Grenard

Les images montrent, dans le cadre de la cohabitation, une volonté d'apaisement entre le Premier ministre Lionel Jospin et le Président de la République Jacques Chirac, qui participent côte à côte aux commémorations alors que le discours prononcé quelques jours plus tôt à Craonne par Jospin en faveur d'une réhabilitation des « fusillés pour l'exemple » avait été critiqué par Chirac (qualifiant la démarche « d'inopportune »). Depuis la fin de la Première Guerre mondiale, les « bleuets » côté français et les coquelicots côté anglais constituent deux symboles du sacrifice des soldats, ce qui explique les deux gerbes différentes déposées au pied de la tombe du soldat inconnu par le Président de la République française et la Reine d'Angleterre. Peu nombreux avant la guerre, les coquelicots s'étaient mis à pousser sur les champs de bataille de la Somme et des Flandres, où stationnaient les troupes anglaises, en raison des bombardements qui avaient modifié la structure des terres (riches en poussière et en chaux). Plusieurs poètes et écrivains anglais qui avaient combattu en 1914-1918 érigèrent le coquelicot en symbole dans leurs écrits sur la guerre. En Grande-Bretagne et dans les pays du Commonwealth, le 11 novembre, qualifié de « jour du souvenir » (Remembrance Day ou Poppy Day), donne lieu chaque année à la vente de coquelicots en papier au bénéfice des anciens combattants. Dans la mémoire française, le bleuet a joué un rôle équivalent : présent sur les champs de bataille, sa couleur rappelait également celle de l'uniforme des poilus.

L'inauguration de la statue de Churchill, près du Grand Palais, faisant face à la statue de Clemenceau, permet de relier les deux victoires, celles de 1918 et de 1945, et de rappeler que l'alliance franco-britannique avait été déterminante pour permettre à la liberté et à la démocratie de l'emporter à chaque fois. Si Churchill symbolise effectivement la ténacité des Anglais face à l'Allemagne nazie et la victoire des Alliés sur Hitler, son rôle lors de la Première Guerre mondiale fut toutefois plus controversé, notamment pour des choix stratégiques contestables (ouverture d'un front oriental et tentative de débarquement contre l'empire ottoman) alors qu'il était Premier Lord de l'Amirauté. Tenu pour responsable de l'échec des Dardanelles, il dut quitter le gouvernement à la fin de l'année 1915 avant d'être blanchi quelques années plus tard des accusations portées contre lui par une commission d'enquête parlementaire.

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