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La mémoire des appelés de la guerre d’Algérie

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 13 mars 2012

Deux anciens appelés alsaciens témoignent de leur service militaire effectué pendant la guerre d’Algérie. Jean-Paul Grauffel raconte son service à Colomb-Béchar. Georges Karpierz évoque lui son expérience d’enseignant coopérant en Algérie après l’indépendance. Président de la section de la FNACA de Kruth, il raconte aussi son combat en mémoire des soldats tués pendant la guerre d’Algérie.

Niveaux et disciplines

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Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
13 mars 2012
Production :
INA
Page publiée le :
29 mai 2018
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001893

Contexte historique

Par Christophe Gracieux

La guerre d’Algérie a été une guerre d’appelés. Le contingent y a en effet été massivement engagé : sur deux millions d’hommes envoyés en Algérie entre 1954 et 1962, près de 1,2 million d’appelés y ont servi. Ils ont été mobilisés afin de lutter contre la guérilla menée par le FLN et de reprendre le contrôle du territoire algérien.

Les régiments français en Algérie ont par conséquent été principalement composés de jeunes hommes âgés entre 18 et 22 ans, sans aucune expérience du combat. 80 % d’entre eux ont pourtant pris part à des opérations. Ils ont aussi fait l’expérience des violences et des souffrances. Près de 16 000 d’entre eux ont ainsi trouvé la mort pendant la guerre d’Algérie. Ils ont également été confrontés à la torture pratiquée par l’armée française : Raphaëlle Branche insiste sur le « choc » que constitue pour eux cette découverte.

Les conscrits ressortent ainsi profondément marqués par l’expérience du conflit algérien. À leur retour en France, la plupart vont se réfugier dans le silence, ne partageant peu ou pas leurs souvenirs de la guerre. Cependant une mémoire de groupe émerge, portée par plusieurs associations d’anciens combattants. La Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA) voit ainsi le jour dès septembre 1958. Affichant « son indépendance à l’égard des pouvoirs publics et de tout parti politique », elle est plutôt orientée à gauche. Elle défend la paix en militant pour la commémoration du 19 mars 1962, date de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu ayant mis un terme officiel à la guerre d’Algérie. La FNACA compte environ 350 000 adhérents en 2018.

De son côté, l’Union nationale des combattants et des anciens d’Afrique du Nord (UNC-AFN), créée en 1956 comme émanation de l’Union nationale des combattants, réunit quelque 250 000 membres. Engagée à droite, cette association conserve selon Rémi Dalisson « une certaine vision impériale et nostalgique de la colonisation » qui la rend « majoritairement pro-Algérie française ». Elle refuse notamment de célébrer le 19 mars 1962 : à ses yeux, cette date représente une victoire militaire « trahie » et le début d’une période de violences meurtrières contre les pieds-noirs et les harkis. Enfin, les Combattants d’Algérie-Tunisie-Maroc, fondée en 1963 comme émanation de la Fédération nationale des combattants prisonniers de guerre, comprend 120 000 adhérents « moins marqués politiquement que ceux des groupes précédents » (R. Dalisson).

Quelles que soient leurs différences, ces associations ont toutes œuvré en faveur de l’obtention d’un statut pour les soldats d’Algérie et leur reconnaissance comme anciens combattants. Cette qualité leur est finalement attribuée par la loi du 9 décembre 1974. Pendant trois décennies, les associations incarnent également « presque à elles seules la parole publique des appelés » (R. Dalisson), réfugiés individuellement dans le mutisme.

Toutefois, à partir du début des années 1990, la parole des appelés d’Algérie se libère « de la chape de silence qui la recouvrait » (Claire Mauss-Copeaux). À partir de la diffusion du documentaire La Guerre sans nom de Bertrand Tavernier et Patrick Rotman en 1992, les témoignages individuels se multiplient. Cette libération de la parole prend encore plus d’ampleur au tournant des années 2000. La reconnaissance officielle de la guerre en 1999 et les révélations sur le recours à la torture en 2000-2001 conduisent de nombreux appelés d’Algérie à témoigner.

Bibliographie

  • Dalisson R., Guerre d’Algérie. L’impossible commémoration, A. Colin, 2018.
  • Jauffret J.-C., La Guerre d’Algérie, les combattants français et leur mémoire, O. Jacob, 2016.
  • Mauss-Copeaux C., Appelés en Algérie, la parole confisquée, Hachette, 1998.
  • Rotman P. et Tavernier B., La Guerre sans nom, Le Seuil, 2001.

Éclairage média

Par Christophe Gracieux

Ce reportage a été diffusé dans le journal télévisé de la mi-journée de France 3 Alsace, « Midi pile Alsace », le 13 mars 2012, à cinq jours du quarantième anniversaire des accords d’Évian. La rédaction de France 3 Alsace a en effet décidé de commémorer cet anniversaire par plusieurs reportages diffusés dans ses journaux télévisés pendant une semaine. Ces sujets sont consacrés à des Alsaciens liés à la guerre d’Algérie. Le premier traite d’un spectacle sur les relations franco-algériennes mis en scène à Strasbourg, le troisième de harkis installés en Alsace.

Le présent reportage, le second de la série, est consacré aux appelés du contingent qui ont effectué leur service militaire pendant la guerre d’Algérie. Il a une dimension locale, s’intéressant à deux anciens appelés d’origine alsacienne, Jean-Paul Grauffel et Georges Karpierz.

Ce reportage prend principalement la forme d’interviews successives recueillies aux domiciles des deux anciens appelés. Il comprend aussi de nombreuses photographies prises par Jean-Paul Grauffel pendant son service militaire à Colomb-Béchar. Il les projette sous la forme de diapositives devant deux amis dont on peut supposer qu’ils sont également d’anciens conscrits d’Algérie. Ces photographies ont une simple visée illustrative : non commentées en tant que telles ni par son auteur, ni par la journaliste, elles rendent plus concret le récit de Jean-Paul Grauffel. D’autres documents relatifs à la guerre d’Algérie sont aussi présentés dans le sujet : des cartes postales et une brochure destinée aux appelés publiée par l’Alliance des équipes unionistes de France, association de scoutisme protestant. Une brève séquence d’images d’archives est également insérée au reportage. Datant d’une période non déterminée de la guerre d’Algérie, elle montre un bateau arrivant à Alger avec des appelés à bord.

Les témoignages livrés par les deux anciens conscrits apparaissent bien différents. Jean-Paul Grauffel donne de nombreux détails sur les dix mois qu’il a passés à Colomb-Béchar. À l’inverse, Georges Karpierz ne dit mot sur son expérience combattante, n’évoquant que son choix de revenir sur le sol algérien comme enseignant après l’indépendance. On ne sait même pas où et dans quelles conditions il a effectué son service militaire en Algérie. Toutefois, tous deux apparaissent unis par le traumatisme provoqué par la guerre. Jean-Paul Grauffel fait ainsi référence au recours à la torture par l’armée française : « Ils avaient certaines méthodes assez brutales ». Georges Karpierz évoque quant à lui son action pour la mémoire des anciens combattants morts lors de la guerre d’Algérie : « J’essaie de tout faire pour qu’on se souvienne de cette époque. C’était une guerre, c’était pas n’importe quoi. » On comprend dans le sujet que Georges Karpierz préside la section de la FNACA de Kruth (Haut-Rhin) et des environs. Il est d’ailleurs interrogé à la fin du sujet devant la stèle commémorative édifiée par la FNACA dans le cimetière de Kruth « à la mémoire des victimes en A.F.N. Maroc – Tunisie – Guerre d’Algérie 1952-1962 ». Le commentaire ne cite jamais la FNACA et se contente de parler de « l’association dont [Georges Karpierz] est président. » Pourtant l’emblème de la principale association d’anciens combattants d’Afrique du Nord, gravé sur le monument, apparaît en gros plan durant quelques instants : une poignée de main, symbolisant l’action de la FNACA en faveur de la paix et de la réconciliation.

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