La Cellulose du Pin : l'usine de Tartas réoriente sa production

25 juin 1981
02m 40s
Réf. 00109

Notice

Résumé :

Afin de relancer son activité, le groupe Cellulose du Pin décide de réorienter la production de l'usine de Tartas vers la fabrication de papier destiné au marché de l'hygiène et du sanitaire, abandonnant progressivement le marché de la pâte textile. Les 350 emplois que représente le site seront ainsi maintenus.

Date de diffusion :
25 juin 1981
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Éclairage

Près de quarante ans après son édification, l'usine de la Cellulose du pin à Tartas, à la frange sud du massif forestier des Landes de Gascogne, franchit une étape importante pour son développement.

Le projet initial, dû à l'industriel d'origine tarusate Bernard Navarre, remonte à 1939 : fabrication d'une pâte au bisulfite pour l'élaboration de la viscose [1]. À cause de la guerre, la construction de l'usine ne se réalise qu'entre 1942 et 1945 où apparaît la Société Landaise des Celluloses. Surmontant de difficiles problèmes techniques, d'ordre chimique notamment, l'usine passe d'une production de 6 000 tonnes en 1946 à 75 000 tonnes à la fin des années 1960. Entre temps, en 1960, l'établissement devient propriété du groupe Cellulose du pin.

Au cours des années 1970, le marché évolue fortement et implique des choix techniques.

D'une part, la viscose se heurte au développement fulgurant des fibres synthétiques issues de la pétrochimie, le fameux nylon par exemple.

D'autre part, les pâtes papetières au bisulfite sont moins appréciées que les pâtes kraft aux meilleures caractéristiques mécaniques.

Enfin, la demande en pâte "fluff" [2] augmente considérablement. C'est la base même du matelas absorbant des couches pour bébés, des protections pour personnes incontinentes et des protections féminines externes. L'amélioration générale du niveau de vie, la longévité de la population qui s'accroît et la dynamique de la grande distribution font exploser la consommation.

On comprend dès lors qu'au début des années 1980 les dirigeants de l'usine de Tartas désirent investir pour conforter sa position sur un marché international fort concurrentiel. D'autant qu'avec 350 emplois directs, la "papète", comme on dit familièrement dans la région, est un élément capital du tissu économique local.

Cependant, la restructuration du groupe est en train de s'ébaucher. Outre la perspective de nationalisation de Saint-Gobain-Pont-à-Mousson [3] qui contrôle alors la Cellulose du pin, la spécialisation productive implique des opérations de concentration technique avec des conséquences géographiques.

Ainsi, la papeterie de Roquefort ayant été fermée en 1978, les activités de l'usine de Bègles, en proche banlieue bordelaise, éloignée du massif forestier et trop à l'étroit dans son emprise des bords de Garonne, sont destinées à être transférées à la puissante usine de Facture, à Biganos (à deux pas du Bassin d'Arcachon). La géographie "papetière" des Landes de Gascogne, esquissée avec intelligence par les milieux de la sylviculture entre les années 1920 et 1940, s'en trouve donc modifiée, puisque de 5 usines (Bègles, Facture, Mimizan, Roquefort, Tartas), on passe à trois (Facture, Mimizan, Tartas). Loi darwinienne du capitalisme et problèmes concrets de reconversion des sites...

Ultérieurement, l'usine de Tartas, tout en continuant la fabrication de "fluff", change de mains et de raison sociale. En 1994, après une fracassante annonce de fermeture du site par le groupe Saint-Gobain, Cellulose du Pin-Tartas devient Tartas.

Les nouveaux actionnaires canadiens, Cascades et Tembec, décident d'une augmentation de capacité de production et d'une nouvelle diversification. En 1999, Tembec achète la participation de Cascades (50%) et devient ainsi actionnaire unique de Tartas. L'usine est désormais connue sous le nom de Tembec Tartas, loin de Temiscaming, le berceau québécois (Abitibi) du nouveau propriétaire, groupe apparu au début des années 1970.

[1] Apparue dans les années 1890, la viscose ou soie artificielle est un textile végétal au départ, puis obtenu par la chimie de synthèse. Il a été connu sous le nom de rayonne ou de fibranne et entre aussi dans la composition de la cellophane largement utilisée dans les emballages alimentaires.

[2] Parmi les pâtes chimiques, la pâte fluff (d'origine anglaise, au sens de "doux, laineux, léger, pelucheux") est une pâte de bois qui, à la différence des autres pâtes, mécaniques ou chimiques comme le papier kraft par exemple, n'est pas transformée en feuille. C'est une matière première qui subit un défibrage avant d'être associée à d'autres matériaux (plastique, non-tissé, produits rétenteurs, élastiques, colles...) pour former un produit d'hygiène absorbant.

[3] Effectivement nationalisé de 1982 à 1986,

Jean-Jacques Fénié

Transcription

Présentateur
Avec une production annuelle de 100 000 tonnes de pâte, Tartas est la seconde entreprise du groupe la Cellulose du Pin en Aquitaine. Cependant, face aux problèmes que l’entreprise rencontrait dernièrement, la direction a décidé de débloquer des crédits pour orienter l’usine, vers la production de pâte pour papier d’hygiène. Un marché qui augmente de 12 % par an.
(Bruit)
Solminihac Carlo Michel
Les 20 millions de francs investis par la Cellulose du Pin devraient permettre à l’entreprise tarusate, d’utiliser à plein rendement ses capacités en achetant de nouvelles machines permettant de produire, à partir de l’été 82, 125 000 tonnes de fluff. L’unité de Tartas abandonnerait, ainsi, la production de pâte textile, et serait uniquement consacrée à la production de papiers destinés au marché de l’hygiène et du sanitaire. En tout cas, la nouvelle a été accueillie avec soulagement par les syndicats. Les 350 emplois seront maintenus, grâce à cette bouffée d’oxygène, mais 20 millions de francs, cela semble peu, en regard des 100 millions réclamés, récemment, par certains responsables de l’entreprise.
(Bruit)
Daniel Melin
20 millions, ce n’est pas grand-chose, mais, tout de même, 20 millions, c’est 2 milliards de centimes. Et, c’est une étape dans le développement de cette usine. Et c’est une étape qui va vers le renforcement de son outil de production.
Journaliste
Vous n’aurez, donc, à terme, qu’une seule production, qu’un seul type de produit. Est-ce que cela ne fragilise pas un petit peu l’entreprise ? La rendant un peu plus dépendante ?
Daniel Melin
Il nous a fallu étudier différents marchés. Et notamment, préciser si ce marché sur lequel nous entendons axer le développement de l’usine de Tartas, et de la division pâte de la Cellulose du Pin, est un marché porteur, comme on dit, est un marché de développement pour le futur. Et effectivement, nous pensons qu’en Europe, et en France en particulier, ce marché réserve un développement intéressant pour cette division.
Journaliste
Quand aux autres unités de production de la région, leur sort parait bien tranché. Après celle de Roquefort fermée en 78, l’usine de Bègles devrait progressivement être rapatriée sur celle de Facture d’ici 83. A moins que de nouveaux éléments interviennent, la Cellulose du Pin est une filiale de Saint-Gobain-Pont-à-Mousson. L’un des groupes industriels nationalisables.
Daniel Melin
Nous avons, effectivement, annoncé, ces dernier mois, que les productions de l’usine de Bègles seraient à terme, transférées vers l’usine de facture. Sans toute fois, vous l’avez noté, qu’il soit question de date. En effet, les machines à papier de l’usine de Bègles ne sont pas d’une taille qui permet à cette usine d’affronter la concurrence internationale, dans de bonne condition.