Délices landais

23 février 2003
06m 06s
Réf. 00171

Notice

Résumé :

Au fil des recettes élaborées par les chefs Michel Carrère et Jacques Porte, découverte de trois produits issus du terroir landais : le foie gras protégé par l'Association Label Foie Gras des Landes, le kiwi de l'Adour qui vient d'obtenir l'IGP et enfin l'Armagnac d'Ognoas distillé depuis deux siècles dans le même alambic.

Type de média :
Date de diffusion :
23 février 2003

Éclairage

La gastronomie a été pendant longtemps le privilège d'un petit nombre, nobles et bourgeois essentiellement ; ce n'est pas pour rien que le premier livre de cuisine à connaître une grande diffusion et de très nombreuses éditions soit La cuisine bourgeoise publiée à partir du milieu du XVIIIe siècle. Pour la majorité de la population, il fallait d'abord se nourrir avant de songer à se bien nourrir. Les produits de la ferme et du jardin étaient consommés en priorité et, en hiver surtout, les menus étaient assez répétitifs. Beaucoup des produits que nous consommons sont apparus relativement récemment, en provenance d'Orient par l'intermédiaire de l'Italie et de l'Espagne (melons, artichauts etc.) à la fin du Moyen Âge ou d'Amérique à partir du XVIe siècle, mais avec une diffusion très lente : maïs, haricots, tomates, pommes de terre etc. ne se répandent vraiment qu'aux XVIIIe et XIXe siècles.

Il faut donc être très prudent quand on parle de produits traditionnels ou ancestraux. L'histoire de chacun d'entre eux peut être retracée avec plus ou moins de précision chronologique, car ils n'apparaissent pas par hasard : le paysan ne consent, aujourd'hui comme hier, à modifier ses façons de faire, à introduire de nouvelles méthodes ou de nouvelles cultures, que s'il y trouve un intérêt et que si le risque qu'il prend est raisonnable, car il pense, à juste titre, que si ses ancêtres avaient agi de telle ou telle façon, c'est qu'ils avaient pensé que leur survie, celle de leur famille et de leur exploitation, la transmission à leurs enfants, étaient le mieux assurés de la sorte.

Les eaux-de-vie ont commencé à être produites, en Bas Armagnac, au milieu du XVIIe siècle, sous la pression de la demande hollandaise, relayée par les négociants de Mont-de-Marsan et de Bayonne, car leur débouché a paru assuré aux viticulteurs. Jusqu'au début des années 1960, les palmipèdes que l'on gavait, c'était les oies, et encore en petit nombre sur chaque exploitation, car la demande était saisonnière et les quantités de céréales disponibles, millet d'abord, puis maïs, n'étaient pas très importantes : il fallait d'abord nourrir les hommes avant de songer à nourrir les oies. Par ailleurs, pendant longtemps les oies n'étaient pas confites, mais salées et le prix du sel limitait aussi cet élevage. La hausse du niveau de vie dans les années 1960 a entraîné une hausse de la demande de ces produits et le canard, moins coûteux, a paru une meilleure solution que l'oie pour y répondre, ce changement étant permis par la généralisation des chambres froides et des congélateurs qui ont favorisé l'apparition de nouveaux produits, comme le magret. Si l'asperge était une production plus traditionnelle que le kiwi, le développement de la première comme l'apparition du second montrent que l'exploitation familiale, si elle est relayée par des structures d'accompagnement, coopératives ou groupements de producteurs, peut être innovante, la recherche de la qualité permettant de rentabiliser de telles spéculations.

Francis Brumont

Transcription

(Musique)
Michel Carrère
Nous autres dans les Landes, le foie gras, ben on connait ça depuis tout petit, on connait ça quoi, donc c’est, on a peut-être un petit avantage par rapport à certaines autres régions. Il paraît que du foie gras, on en fabrique dans tous les pays du monde bientôt alors.
Hélène Archilla
Dans tous les pays du monde, mais avant tout dans les Landes. Le département est le premier producteur français de canard gras, avec 7 millions de têtes par an et 2000 producteurs. La filière a pourtant connu des périodes difficiles, notamment pour les petites exploitations. Et c’est pour survivre qu’elles ont créé en 1996, une association baptisée Label Foie gras des Landes, son but, ne produire qu’un foie gras de très grande qualité.
Jacques Massein
Nous avons justement voulu garder ce qu’à fait l’identité propre des Landes qui est le foie gras. Et ce que nous faisons avec cette démarche Label rouge, ça veut dire que nous produisons le canard comme il y a 20, 30 ou 40 ans. Nous avons gardé les mêmes process de production et de fabrication pour justement que les générations futures puissent toujours consommer ce mets d’excellence.
Hélène Archilla
Un mets d’excellence soumis à des normes draconiennes. Les canards doivent vivre au minimum 102 jours, ils disposent d’un espace vital d’au moins 5 mètres carrés chacun. 120 producteurs font aujourd’hui partie de cette association. Leurs produits sont tous référencés sous l’appellation Canard Fermier des Landes, Label rouge, un label qui est bien sûr présent au Salon de l’agriculture.
(Silence)
Jacques Porte
Je trouve que la qualité des kiwis du pays est toute aussi bonne et même supérieure que celles qui viennent d’ailleurs quoi. Donc, même si [inaudible]. Vous savez, beaucoup de choses est en France, mais ça n’était pas avant, on pourrait parler en matière de chasse, en matière de tout. Donc on a un terroir qui se prête à ce genre de culture. On va mettre ça dans notre sauce voilà. On va le faire mijoter pendant une dizaine de minutes, voilà notre sauce kiwi est en place, et puis si vous aimez la Saint Valentin c’était il n’y a pas longtemps.
Hélène Archilla
Moins connu, mais de plus en plus reconnu. Le kiwi des pays des l’Adour est en train de s’installer confortablement dans l’économie landaise. En 35 ans, la production s’est largement développée, 350 producteurs fournissent le quart de la production nationale. Les pays de l’Adour représentent aujourd’hui le plus grand terroir kiwicole de France.
(Silence)
Jean-Louis Tailleur
Ça a été une aubaine, une très bonne aubaine pour beaucoup d’exploitations ici. Et surtout dans la Vallée des Gaves où la majorité des agriculteurs vivaient uniquement d’élevage de céréales. Ça a permis un développement énorme dans la région.
Hélène Archilla
De plus, après 6 ans de longues démarches auprès de l’INAO, les pays de l’Adour viennent d’obtenir une IGP, une indentification géographique protégée, une première pour un fruit exotique.
Pierre Laborde
Nous comptons sur cette IGP pour accroître notre notoriété. Et puis, en fait, pour conforter un peu les exploitations familiales qui produisent les kiwis, car il faut savoir que le kiwi est produit en grande partie, sur des exploitations familiales, la moyenne par exploitation est d’environ de deux hectares. C’est donc des petites exploitations et si nous pouvons aider à leur survie, nous serons pleinement satisfaits.
Hélène Archilla
Cueilli en novembre, le kiwi est ensuite stocké dans cette coopérative, 15000 tonnes de fruits ont été ramassées cette année.
Michel Carrère
Nous allons faire brûler un peu d’armagnac. L’armagnac, c’est le produit du terroir, c’est ce qui coule dans notre terre. Donc, tout ce qu’on peut trouver, toute la richesse, elle se retrouve dans ce produit qui est fait par les gens du bas-armagnac et qui est fait avec beaucoup d’amour et beaucoup de soins et, c’est un plaisir pour nous de s’occuper de ça, nous en cuisine, c’est un produit incontournable. Et voilà. La recette du foie rôti avec la fricassée d’asperges.
Hélène Archilla
Ognoas, cinq siècles d’histoire, presque deux consacrés à la distillerie. Ce lieu unique abrite le plus vieil alambic du monde, un alambic toujours en état de marche, un véritable objet d’art.
Patrick Arnaud
Armagnac c’est un alambic qui date de 1804 donc qui est le plus vieil alambic en fonctionnement dans la région, donc bientôt bicentenaire. On en reparlera beaucoup en 2004. Un alambic de principe armagnacais, donc il fonctionne jour et nuit, 24h/24, et qui respecte et qui exalte donc tous les parfums, toutes les saveurs des terroirs de bas-armagnac landais.
Hélène Archilla
C’est au contact du bois de chêne des tonneaux que l’armagnac puise au fil des années sa couleur ambrée, tradition et savoir faire entourent l’élaboration de cette eau-de-vie unique.
Patrick Arnaud
Les fondations de cette région, ce sont des sols identifiés, ce sont des usages locaux [incompris] constants, mais ce n’est pas juste typique pour la distillation des grandes eaux-de-vie d’Armagnac. Et tout ça, ça représente donc une multitude de petits producteurs de quelques négociants qui animent et qui font vivre une grande richesse économique pour la région landaise et aussi la région entière de l’appellation qui comprend aussi une partie du département du Gers et du Lot et Garonne.
Jacques Porte
Eh Michel, finalement, manger du foie gras, des asperges, des kiwis, et boire avec parcimonie ce nectar qu'est l’armagnac, et vous vivrez très vieux.
Michel Carrère
Ah oui. Alors on a encore du chemin à faire.
(Musique)