Toulouse et Aquitaine : l'aéronautique dans le Grand Sud Ouest

07 novembre 1980
02m 05s
Réf. 00829

Notice

Résumé :
Sur des images d'illustration, sujet consacré à l'industrie aéronautique et aux entreprises sous traitantes qui travaillent pour elle, plus particulièrement Turboméca, spécialisé dans les moteurs d'avion.
Implanté à Tarnos, dans les Landes, Turboméca répond aussi bien aux commandes à usage civil que militaire, son développement a contribué à renforcer le tissu industriel de la région.
Type de média :
Date de diffusion :
07 novembre 1980
Source :

Éclairage

Turbomeca, voilà une entreprise bien gasconne ! Fondée juste avant guerre afin d’exploiter les premiers brevets concernant les compresseurs à circulation variable, l’entreprise s’installe à Mézières-sur-Seine mais c’est par l’assemblée constitutive du 29 août 1938, à Paris, que Joseph Szydlowski1 et l’ingénieur occitan André Planiol2 lui attribuent officiellement le nom de Turbomeca ; une appellation qui annonce clairement la vocation d’une société vouée au perfectionnement de l’avion à réaction.

On le comprend aisément, dans le contexte du début des années 1940, les événements qui s’enchaînent en France influent sur le destin de cette entreprise militaire. Et de deux façons : d’une part en stimulant sa production, d’autre part en l’obligeant à se délocaliser, devant l’avancée allemande, dans le sud de la France, sur un site qui n’est pas choisi au hasard, à Saint-Pé-de-Bigorre dans des ateliers réquisitionnés par le ministère de l’air à proximité des usines Hispano-Suiza de Tarbes où sont fabriqués les moteurs 12 Y.

Passée rapidement de la production artisanale à la production en série - effort de réarmement oblige - Turbomeca se déplace alors à Bordes, près de Pau, non loin de la base aérienne 119, l'une des plus anciennes de l'armée de l'air française,  opérationnelle dès 1909…L’invasion de la zone libre en novembre 1942 oblige ensuite ses fondateurs à fuir et les effectifs se réduisent comme peau de chagrin.

Si la guerre a réduit considérablement la voilure de l’entreprise, paradoxalement, après la fin du conflit, c’est en Allemagne que Joseph Szydlowski, revenu d’exil, va chercher une équipe pour développer des turbines à gaz3. Suit la longue période marquée par l’évolution technologique des transports, dynamisée par l’économie florissante des « Trente Glorieuses », qui renforce l’emprise de Turbomeca en Aquitaine. Entreprise à taille humaine, souple, réactive, elle ne souffre pas en effet de la crise qui s’amorce en 1973 car elle est multipolaire : également au service de la SNCF qui déploie ses plans de trains à grande vitesse, de 1972 à 2004 elle met au point des turbines adaptées pour la propulsion des rames à turbines à gaz construites par ANF Industries devenu Bombardier Transport. Là est sa force.

De fait, en 1980, l’année de la mise en service des turbines Makila4, la France amorce, dans un contexte économique maintenant franchement défavorable, un tournant majeur qui l’amène à une perte considérable de ses emplois dans l’industrie, notamment en raison de la délocalisation massive de la production5. Or, le secteur aéronautique n’est pas touché. On est là dans un domaine de compétence très pointu et, si le  partenariat avec d’autres pays d’une Union européenne renforcée est indispensable, voire complémentaire, il n’affecte pas les commandes.

L’inflation est à son plus haut niveau dans l’histoire de l’Après-guerre, le 22 octobre 1980, la mythique entreprise d’armes et cycles Manufrance est mise en liquidation, le nombre de chômeurs passe de 3, 3% en 1975 à 5,1%6, mais la complexité de la situation internationale en pleine guerre froide d’une part, la démocratisation de l’avion et l’émergence des trains à grande vitesse7 d’autre part, expliquent l’évolution exponentielle de l’industrie de précision à laquelle sont toujours assurés des débouchés nouveaux. Résilience ici, comme à Tarnos, dans les Landes.

En effet, à Tarnos, cité historiquement tournée vers l’industrie lourde, aux Forges de l’Adour8 a succédé, en 1965, une unité de production et de maintenance des appareils conçus à Bordes. Une reconversion remarquable et pérenne qui traduit effectivement le poids de l’entreprise multipolaire dans le tissu industriel local.

Depuis les balbutiements de l’aéronautique sur les sites de Toulouse, Mont-de-Marsan ou Biscarrosse, jusqu’à la production des Airbus gros porteurs du futur9, Turbomeca se place bien en position d’interface dans la production de haute technologie française, voire mondiale. Si ses premiers turboréacteurs portent des noms de pics pyrénéens, l’entreprise phare du « grand Sud-Ouest » se maintient toujours au sommet 35 ans plus tard !  

 
1)http://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_Szydlowski

2)http://aviadrix.blogspot.fr/2012/12/le-compresseur-planiol-szydlowski-s39-h.html

3) Il s’adresse au motoriste Daimler-Benz qui développait des turbines à gaz sous la direction de Friedrich Nallinger et crée un bureau d'études d’environ 150 personnes à Bregenz-Tannenbach, près du lac de Constance en Autriche, en zone française d'occupation. En 1947, le bureau d’étude est déplacé pour rejoindre Bordes alors qu’il travaillait sur une turbine à gaz du nom de B701 concurrent de l’ATAR 101 de SNECMA. Le choix définitif de l’État français se positionne finalement sur le moteur ATAR 101 de SNECMA, et le bureau d’étude d’origine allemande de Turbomeca se délite petit à petit. Mais la technologie, avec quelques ingénieurs allemands, reste.

4) Le makila est le nom basque d’un bâton de pèlerin, sophistiqué, muni d’un embout pointu.

5)http://insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ES438R.pdf

6)http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon03337

7)http://fr.wikipedia.org/wiki/TGV_001

8) Empreintes landaises : Les forges de l’Adour, un sauvetage réussi.

9) En mars 2014, la Chine passe une commande de 1000 appareils auprès d'Airbus, ce qui assure en ricochet une commande de 120 moteurs auprès de Turbomeca2. De plus, le dernier-né d’Airbus Helicopter - le mystérieux X4 - dévoilé le 3 mars 2015 au salon Heli-Expo d’Orlando en Floride, n’a finalement qu’un seul motoriste : le français Turbomeca et son nouveau moteur, l’Arrano. La filiale de Safran a donc l’exclusivité de ce tout nouvel hélicoptère bi-turbines de 5 à 6 tonnes, dont le marché est estimé à quelques 600 machines
Bénédicte Boyrie-Fénié

Transcription

Présentateur
Alors, l’autre motoriste régional, c’est Turbomeca, situé en Aquitaine. Turbomeca qui est spécialisé dans les moteurs plus gros que ceux de Microturbo.
Journaliste
4 357 emplois, près de 1 000 millions de francs de chiffre d’affaires dont quelques 63 % à l’exportation, c’est Turbomeca. Entreprise pionnière dans le monde pour la conception et la fabrication de petites turbines en priorité pour l’aviation, avion d’entraînement et d’appui tactique ; les hélicoptères à usage militaire et civil, mais aussi les naviplanes et même le rail pour les trains à grande vitesse. Turbomeca s’est implanté d’abord à Saint-Pé-de-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées, puis définitivement à Bordes entre Lourdes et Pau dans les Pyrénées Atlantiques. Deux autres unités importantes ont été implantées à Tarnos dans les Landes et à Mézières entre Nantes et Aubergenville dans la région parisienne. La production turbomoteur et turbopropulseur, tous sont baptisés de nom de Pic pyrénéen. Ce qui caractérise la firme, entreprise de taille moyenne et de dimension humaine, c’est son efficacité, sa souplesse et sa rapidité d’adaptation. 4 357 emplois, dont la majorité, 4 253, dans le sud-ouest et près de 15000 machines-outils, dont 12150 dans le sud-ouest. Certaines de celles-ci sont uniques en France. Le propre de Turbomeca, qui investit actuellement dans de nouveaux bâtiments et de nouveaux laboratoires est de créer et d’innover. Dans le domaine de la sous-traitance, Turbomeca est probablement le premier donneur d’ordre dans les Pyrénées Atlantiques et les Landes. Cette société a contribué fortement à renforcer le tissu industriel de la région formé de petites et moyennes entreprises. La société s’adresse en plus à des fournisseurs de pièces brutes, à des fournisseurs d’outillage spécialisés, à des entreprises de construction de bâtiment et d’installation, et à des prestataires de service. Au total, près d’un millier d’emplois.