Recensement agricole dans les Landes : moins d'exploitations moins de terres

21 septembre 2011
01m 26s
Réf. 00910

Notice

Résumé :
2010 : Trente nouvelles installations de jeunes agriculteurs dans les Landes. deux mille exploitations ont disparu en dix ans dans le département selon le recensement agricole. Gilles PECASTAING s'est lancé dans la polyculture et l'élevage porcin (parcours du combattant : administration et finances); sa principale difficulté : trouver des terres : en dix ans la région a perdu quatre vingt seize mille hectares de superficie agricole utilisée (dix mille hectares dans les Landes); en cause le massif forestier. Dernière observation : la taille des exploitations augmente.
Date de diffusion :
21 septembre 2011
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Éclairage

Tous les dix ans, le ministère de l’agriculture enquête auprès de l’ensemble des exploitations agricoles du territoire national. Ce « recensement » vise à collecter des informations sur tous les aspects de ce domaine : population agricole, taille des exploitations, surfaces cultivées suivant les types de culture, cheptel, diversification de l’activité (tourisme vert, vente directe, etc.).

Le ministère de l’agriculture a ainsi rendu publics le 13 septembre 2011 les premiers résultats de la dernière enquête que ses services statistiques ont conduite entre septembre 2010 et avril 2011 (1).

C'est dans ce cadre qu'a été réalisée l'interview de Gilles Pécastaing, exploitant dans le nord du département la forêt concurrence les espaces réservés à l'agriculture qui ne représentent ici que 13 % du territoire (2). Les sols y sont sableux, légers, et faciles à travailler, favorisant l'émergence de cultures nouvelles. Dans ces exploitations dont la taille est supérieure à la moyenne départementale, grâce à l'irrigation, on cultive intensément le maïs (3) mais aussi les légumes frais tels que carottes, asperges, haricots verts et maïs doux (4).

Une part   importante du  maïs est valorisée directement sur les exploitations, principalement par les élevages de palmipèdes et de volailles mais aussi par les élevages bovins - en Chalosse notamment - alors que, dans les Landes septentrionales, cette culture est parfois associée à l'élevage porcin.

C'est le cas chez Gilles Pécastaing, jeune agriculteur aux racines béarnaises, gérant d'une EARL fondée en 2005, implantée au quartier Bernadille, à Pissos. De fait, cet exploitant est tout à fait représentatif de la génération de paysans dynamiques, née dans les années 1970, qui sait s'adapter au marché, rebondir, innover. Alors que la génération précédente avait développé prioritairement la culture du maïs (5), ceux-ci, heureusement formés, la plupart du temps, dans des écoles spécialisées, doivent faire face, au cours de ces deux dernières décennies, à un contexte économique en pleine mutation (5). Leur bon niveau de formation les aide effectivement à contourner toutes les difficultés administratives et à monter des projets cohérents qui puissent convaincre en amont.

Le département compte ainsi 4 250 chefs d’exploitations et coexploitants sur des domaines de taille moyenne et de grande taille. L’âge moyen de ces 3 100 chefs d'exploitation est de 49 ans et 20 % d'entre eux sont pluriactifs (6), engendrant des emplois variés tout au long de la filière, du champ proprement dit aux produits transformés (7). On comprend l'enjeu et le souci des chefs d'entreprise d'optimiser leurs terres et surtout d'en acquérir dans les meilleures conditions quand cela est nécessaire. Il faut produire au meilleur prix et le coût de la terre intervient dans le calcul d'une exploitation rentable et compétitive.

Structurée sur plusieurs sites, la ferme de Bernadille produit plus de 10 000 porcs par an, de la naissance à leur commercialisation. L’ensemble est alimenté à partir des céréales produites sur les terres mêmes de l’exploitation dans le respect d'un cahier des charges très strict.

"L’exploitation s’inscrit dans un parfait écosystème grâce à l’utilisation des déjections comme engrais organiques pour la production des céréales (maïs et méteil) destinées à alimenter les animaux. Ainsi, grâce à la maîtrise de tous les maillons de la chaîne de l'élevage, elle offre toutes les garanties de traçabilité et de qualité de ses produits, pour une commercialisation de proximité, respectueuse de l'environnement" : cet extrait de la présentation de la société sur le site de l'entreprise traduit bien ici, par son engagement et la terminologie employée, le souci du "paysan", agriculteur, entrepreneur, aménageur de rester en phase avec son époque.

Mais produire du "bon" a un coût et la raréfaction des terre agricoles, qui a engendré une flambée des prix à l'hectare ces dernières années dans les Landes, constitue une entrave au développement de ce secteur. Pourtant, la tempête Klaus devait changer la donne...

Ravageant près d'un tiers du massif forestier landais, cet événement climatique survenu le 24 janvier 2009 devait ouvrir d'autres perspectives. Devant l'ampleur du désastre, nombreux sont ceux qui ont alors misé sur l'effondrement du prix de la forêt ; mais c'était sans compter sur la résilience du Landais qui "toujours replante". De fait, après une première phase de sidération où le sylviculteur a songé à la reconversion, les importantes aides apportées par l'État pour restructurer le massif ont rapidement abouti à redonner confiance aux investisseurs et, même si, en 2011, on n'en n'est pas encore là, les derniers chiffres de 2015 donnent la forêt largement gagnante (8). Là aussi, les belles parcelles se font rares car certaines innovations de la filière bois attirent.

De plus, si l'on a, pendant des années, souligné le caractère intrusif des grandes exploitations agricoles dans les zones boisées, on constate, en parallèle, un mitage des surfaces dédiées à l'agriculture par l'urbanisation et la périurbanisation des bourgs. Un phénomène nouveau qu'essaie de maîtriser la Chambre d'Agriculture. Dans un souci d'optimisation économique des territoires, tout en préservant les intérêts agricoles et forestiers, celle-ci participe en effet à un groupe de travail associant les services de l'État, l'Association des Maires et le Syndicat des Sylviculteurs du Sud Ouest, pour mener une réflexion partagée autour d'une gestion équilibrée de l'espace rural et pour définir notamment les principes de constructibilité en zone agricole et forestière.

Trois chartes sont issues de ces travaux, notamment la charte des principes de constructibilité en zone agricole et forestière (2008) (9).

Mais, à l'évidence, les principes ne suffisent pas. La forêt renaît de ses cendres, le département des Landes connaît un boom démographique sans précédent avec un retour des populations dans les zones rurales. Contre le forestier et les néo-ruraux, l'agriculteur, en Haute Lande, ne fait plus toujours le poids, malgré l'évolution de ses moyens de production et les investissements qu'il a consentis pour demeurer compétitif.



(1)http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/recensement-agricole-baisse-continue-du-nombre-exploitations.html

(2) Au sud, dans la zone Sud-Adour et en Armagnac, les surfaces agricoles couvrent plus de la moitié du territoire ; 7 exploitations du département sur 10 se situent dans ce secteur.

(3) Le département des Landes est le premier département producteur de maïs. Il est cultivé dans près de 9 exploitations sur 10 avec un rendement moyen de l’ordre de 100 quintaux à l'hectare (moyenne sur la période 2005-2014 dans tout le département) et 60 % des surfaces en maïs sont irriguées.

(4) Tout le secteur de la Haute Lande alimente ainsi en légumes frais l'entreprise Légum'Land, à Ychoux.

Empreintes landaises : La production de carottes dans les Landes et l'usine Légum'Land (1991)

(5) À partir de 1962, la première politique agricole commune (PAC) garantit le prix des céréales, dont celui du maïs largement cultivé dans les Pyrénées-Atlantiques et dans les Landes.

(6) http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=T13F172

(7) Sur ces exploitations grandes et moyennes, on compte 1100 salariés permanentes et 940 conjoints et autres actifs agricoles. Ces exploitations génèrent de nombreux emplois : 936 salariés permanents  et 526 salariés saisonniers (enUTA) et 5 145 ETP salariés dans l'agroalimentaire. 

(8) http://www.sudouest.fr/2015/01/23/six-ans-apres-la-tempete-klaus-ou-en-est-la-foret-landaise-1807166-4723.php

(9) http://www.landes.chambagri.fr/territoires/agriculture-et-urbanisme.html
Bénédicte Boyrie-Fénié

Transcription

(Silence)
Journaliste
30 nouvelles installations de jeunes agriculteurs dans les Landes en 2010, le symbole d’une agriculture qui ne fait plus recette. 2000 exploitations ont disparu en 10 ans dans les Landes selon le recensement agricole. Gilles Pécastaing, lui a pourtant franchi le pas. Il s’est lancé dans la polyculture et l’élevage porcin, un parcours du combattant.
Gilles Pécastaing
Il a fallu convaincre les banques, il a fallu convaincre les partenaires, il a fallu trouver des débouchés. Il a fallu passer toutes les étapes administratives et financières pour pouvoir reprendre un tel outil.
Journaliste
Mais la principale difficulté pour Gilles désormais, c’est de trouver des terres. Un problème pour de nombreux agriculteurs en Aquitaine. En 10 ans, la région a perdu 96000 hectares de superficie agricole utilisée. Selon l’étude, le chiffre s’élève à 10000 hectares dans les Landes. En cause, le massif forestier.
Pascal Lafenêtre
On dit que la forêt perd chaque année des centaines, voire des milliers d’hectares chaque année. Mais quand on regarde les chiffres, l’agriculture en consomme 250 à 300 hectares. Le reste est consommé pour une grande partie par l’urbanisme.
Journaliste
Dernière observation, si le nombre d’exploitations baisse, leur taille augmente. Un gage de compétitivité est désormais un passage obligé pour de nombreux agriculteurs en Aquitaine.