Jean-Paul Kauffmann à propos de son livre La Maison du retour

11 avril 2007
01m 50s
Réf. 00007

Notice

Résumé :

Détenu pendant trois ans au Liban, l'écrivain et journaliste Jean-Paul Kauffmann décide, au lendemain de sa libération, de s'installer dans une vielle bâtisse, en Haute Lande. Dans son roman, La Maison du retour, l'auteur raconte cette installation qui lui a permis de se reconstruire au contact de la nature.

Date de diffusion :
11 avril 2007
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Personnalité(s) :

Éclairage

Né en Mayenne en 1944, Jean-Paul Kauffmann est un journaliste français qui commence sa carrière à l'AFP puis travaille au Matin de Paris. Il devient ensuite grand reporter à L'Événement du Jeudi. Dans le cadre de l'une de ses missions au Liban, il est enlevé à Beyrouth le 22 mai 1985, en compagnie du jeune chercheur Michel Seurat, deux mois après les diplomates Marcel Carton et Marcel Fontaine.

La détention des otages devait durer trois ans mais Michel Seurat ne survit pas aux dures conditions qu'imposent les ravisseurs et meurt en mars 1986.

Dans un contexte politique mouvementé, il est difficile de connaître les raisons exactes de ce rapt. Revendiqué par le Djihad islamique exigeant la fin de l'aide française à l'Irak, en guerre alors contre l'Iran, il pourrait être aussi lié, selon Dominique Lorentz, au contentieux entre Paris et Téhéran concernant le consortium d'enrichissement d'uranium Eurodif.

Quoi qu'il en soit, Jean-Paul Kauffmann revient très marqué de ce séjour forcé, endeuillé par la perte de l'un de ses compagnons d'infortune. La libération a lieu le 4 mai 1988 mais, malgré le bienveillant soutien de tous ses proches, la convalescence est longue et le journaliste, devenu écrivain, cherche alors un lieu apaisant qui l'aide à revenir à la vie. C'est en suivant son ami Michel Cantal-Dupart, fondateur d'un comité de soutien aux otages, qu'il découvre une vaste maison de maître, délaissée au milieu d'un airial, en Haute Lande, dont il perçoit la vacuité comme une ouverture ; une terre d'élection pour ce contemplatif qui a survécu dans les cachots en grande partie grâce à la Bible, lue et relue maintes fois pendant les quelque 1037 jours de l'épreuve.

Cette Maison du retour (2007) suit la publication de plusieurs ouvrages : L'Arche des Kerguelen : voyage aux îles de la Désolation (1993), La chambre noire de Longwood sur les traces de Napoléon prisonnier dans l'île de Sainte-Hélène (1997), La Lutte avec l'Ange évoquant Delacroix peignant une scène biblique dans une chapelle latérale de Saint-Sulpice, à Paris (2001), et 31, Allées Damour - Raymond Guérin, biographie d'un jeune Bordelais prisonnier en Allemagne (2004).

Si la thématique commune de ces écrits est l'enfermement, Jean-Paul Kauffmann tourne une page avec ce dernier livre qui constitue une passerelle entre "l'avant" et "l'après". De même que les travaux de la maison ont duré, l'auteur a mis du temps à se reconstruire, à se restaurer, "se rééduquer" au sens littéral. Matrice protectrice, cachée au cœur de la forêt landaise, la vieille bâtisse, sise dans un espace ouvert, a permis à l'ex otage, prisonnier de ses souvenirs, de retrouver le "bonheur d'être vivant" car Jean-Paul Kauffmann est, malgré tout, un "élégiaque enjoué", un épicurien. Il peut même faire preuve d'humour en évoquant ce qui fut longtemps indicible ; ainsi parle-t-il du sable des Landes, pauvre, stérile - le désespoir du jardinier - remontant toujours à la surface, comme le passé.

La maison du retour est en cela la maison du retour à la vie car ce livre, dédié à son ami urbaniste, finit de le libérer, l'autorisant enfin à parler des tabous. Dans une région forestière où nul obstacle ne borne l'horizon, l'auteur se sent bien. Il participe désormais d'un pays qui, comme lui, ne se livre pas spontanément ; ce pays, ce sont les Landes de Gascogne, un "blanc sur la carte" qui comble désormais sa vie.

Bénédicte Boyrie-Fénié

Transcription

Présentatrice
Jean-Paul Kauffmann écrivain journaliste vient de publier aux éditions du Nil son cinquième récit La maison du retour. Après le traumatisme du Liban où il a été détenu 3 ans. Il revient dans son ouvrage sur cette forêt landaise qui a contribué à sa renaissance. Martine Chambon, Nicolas Pressigout.
Jean-Paul Kauffmann
Les Landes pour moi c’était un blanc, un blanc sur la carte. Que ça n’avait pas d’existence propre.
Journaliste
Et pourtant ces Landes qu’il ne connait pas vont faire partie de son univers. A son retour du Liban, impossible de reprendre la vie d’avant. Commence alors une longue quête à l’issue de laquelle il déniche une vieille bâtisse abandonnée, point de départ de son livre.
Jean-Paul Kauffmann
Cette Maison du retour raconte en effet les premiers mois de mon établissement dans cette maison que j’ai achetée peu de temps après ma libération. Je voulais être là pendant les travaux, parce que moi aussi j’étais aussi dans une période de réparation, de restauration, je ne sais pas comment on peut dire, de recomposition.
Journaliste
Autour de cette maison dont il ne nous dévoilera rien, une forêt bienveillante, mystérieuse mais jamais hostile, loin des clichés.
Jean-Paul Kauffmann
Derrière cette apparence, il y a un monde caché qu’il faut apprendre, qui ne se livre pas d’emblée. Cette maison du retour et cette forêt m’a permis de me reconstruire, de me rééduquer dans tous les sens du terme.
Journaliste
Ode à la haute Lande si bien décrite par Mauriac, ou thérapie, La Maison du retour de Jean-Paul Kauffmann se veut avant tout à un livre sur la délectation, le bonheur d’être vivant.