Diminution des jachères : réaction des agriculteurs landais

27 septembre 1995
01m 47s
Réf. 00137

Notice

Résumé :

En 1992, la Politique Agricole Commune imposait aux agriculteurs le gel de 20% de leur surface cultivable. Trois ans plus tard, l'Union européenne annonce une diminution de 10% du taux de jachère. Réaction des producteurs de maïs à Sore, suite à cette nouvelle décision.

Date de diffusion :
27 septembre 1995
Source :

Éclairage

La politique agricole commune (PAC) mise en place en 1962, a été, dès l'origine, un des piliers de la construction de la Communauté Européenne. Elle visait à sécuriser les approvisionnements grâce à l'augmentation de la productivité, à maintenir le niveau de vie de la population agricole grâce à une politique de soutien aux prix tout en garantissant des prix corrects pour le consommateur. Si elle fut un succès sur certains points, comme le montrent la croissance très importante de la productivité et la présence d'excédents alors qu'en 1960 l'Union ne couvrait que 80% de ses besoins, elle favorisa un productivisme effréné qui passa par une modifications des structures des exploitations et entraîna un exode rural massif, les petites exploitations n'étant pas assez compétitives. Ajoutons-y le poids, pour le budget de l'Union, de son coût exorbitant (45% du budget certaines années), s'expliquant, en partie au moins, par le poids politique des agriculteurs dans beaucoup de pays de l'Union.

L'apparition d'excédents (laitiers, par exemple) montra les limites d'un tel modèle, mais, en 1992, la réforme de la PAC, qui instituait les aides directes aux agriculteurs, n'en continua pas moins à accorder ces aides au prorata des quantités produites, ce qui ne put qu'abonder dans le sens d'une concentration accrue de la production et d'une course vers les rendements au détriment des préoccupations environnementales qui commençaient à se faire jour dans la politique de l'Union.

Par ailleurs, sous la pression de certains lobbies, comme celui des céréaliers, le maintien d'un niveau de prix supérieur au niveau mondial lésait certains agriculteurs, en particulier les éleveurs, obligés de payer les céréales destinées à l'engraissement des bovins ou des porcins au prix fort. Mais le discours officiel, et la politique qui est suivie, tant à Bruxelles qu'à Paris d'ailleurs, tend à considérer les agriculteurs comme un tout, sans se préoccuper des différences sociales existant au sein de la paysannerie, encouragé en cela par le discours des syndicats agricoles majoritaires.

Pour combattre les dérives du modèle productiviste, l'Union prit de nombreuses mesures, acceptées de plus ou moins bonne grâce par les principaux intéressés, les agriculteurs, comme les quotas laitiers ou le gel, sous forme de friches improprement appelées jachères, d'un certain pourcentage de la superficie agricole, politique à court terme et à courte vue, qui obligeait les producteurs à s'adapter sans cesse sans pouvoir faire de projets à long terme.

Francis Brumont

Transcription

Présentatrice
Agriculture avec une décision européenne qui se résume en un chiffre, 10 %, c’est le taux unique de jachères qui vient d’être décidé par Bruxelles. En première ligne, en Aquitaine, les maïsiculteurs qui sont plutôt satisfaits. Les réactions dans les Landes Patrick Pannier et Gérard Boisseau.
Patrick Pannier
Avec 150 000 ha, les Landes sont le département français qui exploite la plus grande surface de maïs. Ici, la politique agricole commune mise en place depuis trois ans contraignait les maïsiculteurs à geler 30 000 ha, soit 20 % de la surface. La décision prise à Bruxelles va permettre une augmentation du chiffre d’affaires de 10 % comme dans cette exploitation de 600 ha dans la Haute-Lande.
Jean Boulon
Les gens vont être très prudents dans la mise en place de ses cultures et dans les investissements qu’ils vont faire et même dans la création d’emploi. C’est sûr que ça ira vers des investissements. Il faut rééquiper les parcelles, remettre en route l’irrigation. Il faut améliorer les machines, tout ré-entretenir et peut-être employer un peu de main-d’œuvre.
Patrick Pannier
Avec la PAC, les producteurs de maïs ont du s’adapter et de nombreux emplois ont été perdus en amont et en aval de la filière. Pour certains, comme Jean-Claude Picon qui travaille sur une exploitation moyenne, les maïsiculteurs n’ont pas été suffisamment défendus. 10 % de jachères, c’est encore trop.
Jean-Claude Picon
La politique qui a été mise en place avec ces jachères, c’est la plus grosse connerie que des technocrates aient pu inventer. À la fin du 20ème siècle quand on voit que le tiers du globe meurt de faim et que dans nos zones tempérées où se produit la production vivrière, la limiter, c’est complètement aberrant.
Patrick Pannier
Les agriculteurs qui doivent sans cesse s’adapter à toutes les situations se demandent maintenant combien de temps ils devront composer avec des jachères à 10 %.