Le quartier Euralille

En pleine émergence du 13ème quartier de Lille, Euralille, le reportage interroge les principaux protagonistes de la mise en chantier. On doit beaucoup à Jean-Paul Baïetto, directeur de la SAEM Euralille, qui, par sa ténacité, est parvenu à mettre en œuvre ce grand projet. Premier des cinq pôles d’excellence définis au schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme SDAU communautaire pour renforcer la ville renouvelée, Euralille bénéficie de l’ouverture du tunnel sous la Manche et de l’arrivée des trains à grande vitesse, TGV nord-européens. Pierre Mauroy, maire de Lille et président de la communauté urbaine, lance le projet en 1990. Il veut un centre international d’affaires, véritable "turbine tertiaire", pour renforcer l’attractivité de la métropole. Son concepteur, l’architecte néerlandais Rem Koolhaas, prévoit un pôle rayonnant sur un territoire européen élargi à 70 millions d’habitants et dessine un projet ambitieux à la mesure des enjeux, "un gigantesque projet futuriste lancé à deux pas du centre historique". Sur quelque 120 hectares investis sur d’anciens terrains militaires habilement négociés par Pierre Mauroy, Euralille peut s’envisager dans un avenir florissant.

Le document décrit le programme de la première phase du projet, Euralille 1 qui couvre près de 40 hectares et est acté depuis 1989. Il s’agit d’un quartier d’affaires, de commerces et de loisirs faisant appel à des investisseurs privés et publics pour un montant de 5 milliards de francs. Le pari est osé en période de crise économique. Les échos sont pourtant optimistes de la part des différents protagonistes réunis sur le plateau.

Pour l’aménageur Jean-Paul Baïetto, les conditions sont réunies pour la réussite : un marché unique européen et un marché nord-européen à la pointe, drainant 100 millions d’habitants, le tunnel sous la Manche s’ouvrant en même temps que la gare Lille Europe en 1994. Les flux promettent d’être considérables tant à l’échelle européenne qu’à l’échelle locale et le programme s’y emploie avec la construction de la plus vaste station de métro de la métropole, l’espace "piranésien", et une nouvelle gare de tramway souterraine pour relier Roubaix et Tourcoing. Enjambant le linéaire de la nouvelle gare, les deux tours de bureaux, celle du Crédit Lyonnais de Christian de Portzamparc et celle du World Trade Center de Claude Vasconi, sont le symbole de la modernité. Le centre commercial du triangle des gares entre Lille Flandres et Lille Europe confié à l’architecte Jean Nouvel accueille une grande surface, des galeries marchandes mais aussi des logements et des services dans la barre et les quatre tours cernant l’ensemble.

Plus au sud, c’est Lille Grand Palais qui remplace l’ancienne Foire commerciale pour accueillir congrès, exposition et un Zénith pour les spectacles. Ce bâtiment est le plus coûteux pour les finances publiques mais pour l’élu Bernard Roman, les emplois possibles et les ressources fiscales permettent un retour sur investissement favorable à la ville.

Quant à Gérard Thiébot, président de la Chambre de Commerce communautaire, la vocation haut de gamme du projet permet une revalorisation de l’image de marque de la région à l’international, sans préjudice ni exclusion pour la population locale. Il faut souligner que le projet est alors complété par un grand parc public de 10 hectares, le parc Matisse, véritable poumon vert au cœur de la ville.

Vingt ans plus tard, Euralille s’est complètement intégré à la vie urbaine lilloise. Ses extensions au fil des programmes d’habitat et de services, de La Madeleine au nord, Saint-Maurice à l’est, jusqu’à la Porte de Valenciennes au sud, renouvellent l’art d’habiter en ville.