Les influences éclectiques de l'architecture à la fin du XIXe siècle

02 décembre 1977
04m 09s
Réf. 00067

Notice

Résumé :
L'architecture de la fin du XIXe siècle dans la métropole lilloise connaît diverses influences. Si le palais réalisé pour le roi du savon en 1885 à Roubaix a disparu, on retrouve des traces de l'influence orientale dans un jardin d'hiver boulevard Vauban à Lille ou avenue Tiers avec la loge maçonnique qui s'inspire de l'ancienne Egypte. Avec le goût des voyages on trouve des chalets suisses, des maisons normandes, alsaciennes...
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Date de diffusion :
02 décembre 1977
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Éclairage

Qu’est ce que l’architecture éclectique ? C’est une tendance qui consiste à mêler des éléments empruntés à différents styles ou époques de l’histoire de l’art et de l’architecture, très en vogue entre les années 1860 et la fin des années 20. Ce mouvement est particulièrement représenté dans la métropole lilloise. Les architectes éclectiques n’ont pas hésité à réemployer et à mélanger des styles historiques pour les réinterpréter librement. Les productions de ce style, tant dans le domaine public que dans le domaine privé, ont été si nombreuses qu’on en oublie presque de les regarder. Il a fallu un travail de recherche en architecture et la sortie de l’ouvrage Le siècle de l’éclectisme Lille 1830-1930 (1) en 1978 pour que l’on reconsidère cette période faste de notre patrimoine. L’émission proposée est d’ailleurs en rapport direct avec cette recherche sous la direction de Maurice Culot, alors professeur à l’école d’architecture de La Cambre à Bruxelles.

Le premier style évoqué est le style mauresque qui se développe à la période du colonialisme triomphant. La réalisation la plus spectaculaire a été le Palais Vaissier ou Palais du Congo édifiée à Roubaix pour un industriel du savon en 1885. L’architecte roubaisien Dupire-Rozan a construit là une villa-château digne d’un Maharadjah même s’il n’a pu, comme le désirait son propriétaire, l’édifier sur quatre éléphants ! Le rêve et l’imagination se traduisent par l’immense coupole ornée de vitaux de couleurs qui surplombe l’ensemble, la profusion des motifs floraux et animaliers, la polychromie des matériaux à l’intérieur comme à l’extérieur. A la mort du propriétaire, après quelques essais de sauvegarde, le palais a été détruit en 1925 pour faire place à un lotissement. Il reste cependant les pavillons du concierge et du jardinier, en pierre et brique émaillée de rutilantes couleurs, pour nous faire une idée de la splendeur éclectique de l’ensemble.

Le goût de l’orientalisme est encore visible dans de nombreux jardins d’hiver de Lille ou de Roubaix. La loge maçonnique de la rue Thiers à Lille, construite en 1901 par l’architecte Albert Baert, s’inspire de l’ancienne Egypte alors que dans la même rue, s’élevait un établissement de bains dans le style mauresque dont quelques éléments de façade sont préservés.

Mais le style éclectique se veut aussi régionaliste, et de toutes les régions ! Chalets suisses, cottages anglais, maisons normandes ou alsaciennes fourmillent à Croix, Roubaix et Tourcoing pour accueillir une bourgeoisie cossue. Le pittoresque de la composition est remarquable dans les villas édifiées Avenue de l’hippodrome à Lambersart : la villa Saint Charles de l’architecte Victor Mollet en 1893 ou la villa Saint Georges de Albert Baert en 1894 sont de vrais manifestes de l’éclectisme.

La tendance éclectique concerne aussi les édifices publics : le premier du genre est l’Hôtel de ville de Tourcoing de 1866, œuvre de Charles Maillard qui s’inspire de l’Opéra de Paris de Charles Garnier. Plus tardif, celui de Roubaix du à l’architecte Victor Laloux inauguré en 1911, est un mélange de baroque et de classicisme à connotations régionalistes. Les références flamandes sont légion dans les mairies de l’agglomération où le beffroi devient l’élément principal de la composition, mettant le Moyen Âge à l’honneur. Louis-Marie Cordonnier en construira huit avant ou après le Grande Guerre.

C’est aussi le style éclectique qui a été choisi dès 1880 pour l’édification des écoles de la République qui s’élèvent dans chaque quartier de l’agglomération mais surtout pour la construction des Universités d’Etat regroupées à Lille dans le quartier des Ecoles, en opposition au style néo-gothique adopté par les Facultés Catholiques dans le quartier Vauban.


(1) Lise Grenier, Hans Wieser-Benedetti, Le siècle de l’éclectisme Lille 1830-1930, Archives d'architecture moderne, 1979
Dominique Mons

Transcription

Inconnue
Le dommage, c’est qu’elle ait disparu.
Jenny Clève
Hélas oui, les deux pavillons d’entrée sont aujourd’hui les seuls éléments qui demeurent de ce fastueux Palais Vaissier, réalisé en style néo-mauresque pour le Roi du savon du Congo en 1885. Même si le goût en paraît surprenant dans nos territoires du Nord, il est probablement dommage qu’il n’ait pas subsisté... Un musée peut-être !
(musique)
Jenny Clève
Quelques intérieurs aussi datent de cette période d’engouement pour l’exotisme. Par exemple, ce jardin d’hiver d’un bel hôtel du boulevard Vauban à Lille, hérité d’un marin nostalgique et aujourd’hui siège de l’ALEFPA.
(musique)
Jenny Clève
La loge maçonnique de la rue Thiers s’inspire, elle, directement et logiquement de l’Ancienne Egypte.
(musique)
Jenny Clève
Mais avec le goût de l’aventure ou simplement des voyages en France, refleurissent les chalets suisses, les maisons normandes ou alsaciennes, au goût médiéval, à Croix, Roubaix, Tourcoing.
(musique)
Jenny Clève
Peu à peu, cependant, s’insinue l’idée de la création d’un style nouveau qui emprunte aux autres styles des éléments significatifs adaptés aux exigences des architectes et des propriétaires. Ce sera l’éclectisme dont les exemples foisonnent dans la région lilloise. Tantôt, c’est la tendance pittoresque qui domine, les avenues de Lambersart,
(musique)
Jenny Clève
La rue du Port, à Lille,
(musique)
Jenny Clève
Tantôt la tendance plus classique l’emporte, c’est l’actuelle Banque de France à Lille.
(musique)
Jenny Clève
L’Hôtel de Ville de Tourcoing, le plus ancien et le plus important exemple.
(musique)
Jenny Clève
L’Hôtel de Ville de Roubaix, plus récent, incorpore la tradition flamande.
(musique)
Jenny Clève
La Chambre de Commerce de Tourcoing, avec son beffroi, rejoint la tradition régionale. C’est aussi le cas de l’Hôtel de Ville de Loos, de l’architecte lillois Louis Cordonnier, à qui nous devons aussi l’Opéra et la nouvelle Bourse de Lille.