La maison des mineurs à Vence

01 décembre 1977
02m 50s
Réf. 00162

Notice

Résumé :

La Maison du mineur de Vence reçoit 500 mineurs par an. Au départ, elle a été créée en 1947 pour traiter la silicose, maladie qui a régressé, nous dit le commentaire, "grâce aux antibiotiques". Un des médecins du centre explique que sont traitées principalement des bronchites chroniques dues au tabac et à la pollution. Le centre s'est doté d'un laboratoire, une salle de gazométrie, de biologie et d'un ionogramme. La priorité a été donnée à la rééducation respiratoire. Interview de mineurs du Nord sur leur séjour dans cet établissement.

Date de diffusion :
01 décembre 1977
Source :

Éclairage

La Maison des mineurs de Vence est à l'origine (1946-1947) un établissement dépendant des Houillères du Dauphiné puis du Bassin du Centre et du Midi. Le déclin puis la fermeture de ces bassins d'exploitation entraînent à la fois son transfert en 1971 à une association de type loi 1901 fondée conjointement par Charbonnages de France et la Caisse autonome de la sécurité sociale dans les mines et l'accueil de mineurs principalement originaires du Nord-Pas-de-Calais, où l'exploitation massive du charbon se poursuit (1).

Sa mission principale a longtemps résidé dans la prise en charge, le traitement et la réadaptation des mineurs silicosés victimes de complications, mais l'amélioration des procédés thérapeutiques fait que l'établissement s'occupe désormais (on est alors à la fin des années 1970) en priorité des maladies pulmonaires chroniques en pleine recrudescence, comme la bronchite asthmatiforme du troisième mineur interrogé.

Le médecin en signale d'ailleurs les causes avérées : le tabac, la pollution et plus largement les mauvaises conditions de vie, voire les mauvaises habitudes des mineurs, implicitement montrés du doigt. Le charbon n'y est donc pour rien ou presque et tout est désormais réuni pour permettre un prompt rétablissement des patients : de bonnes conditions psychologiques et climatiques (le soleil "inonde" les images en extérieur), un plateau technique toujours plus sophistiqué, pouvant pratiquer des examens sanguins poussés (gazométrie et ionogramme), enfin un programme de remise en forme (réentraînement à l'effort) permettant aux malades de disposer d'un meilleur confort de vie au quotidien. Des soins accordés avec "beaucoup de générosité" reconnaît le second mineur, qui a dû subir une trachéotomie et voit désormais son état "s'améliorer". Plus largement, les résultats des traitements sont unanimement considérés comme "encourageants".

La "disparition" de la silicose n'est pourtant pas sans alimenter les interrogations : le premier mineur en est déjà à son troisième séjour et la bronchite du troisième est sa "première maladie" selon ses dires, ce qui pousse à croire que leur situation sanitaire ne s'est pas améliorée, bien au contraire. Enfin et surtout, on apprend non sans surprise que "cette terrible maladie des mineurs de fond a régressé grâce en particulier aux antibiotiques", alors même que la silicose est incurable et dégénérative ! A contrario, l'année même de la réalisation du reportage (1977), on recense près de 650 nouveaux cas et plus de 800 décès officiellement dus à la maladie, chiffres que toutes les études épidémiologiques et historiques disponibles signalent comme notoirement sous-évalués.

Au-delà des aspects strictement médicaux, l'enjeu est la reconnaissance officielle et/ou effective des risques liés à l'exploitation du charbon : les accidents et autres catastrophes sont connus et "acceptés" avec plus ou moins de fatalisme, mais les risques sanitaires font l'objet d'un débat de fond entre compagnies exploitantes, salariés et pouvoirs publics. Si les pneumopathies provoquées par l'inhalation de fines particules de poussières de silice sont décrites dès le XVIe siècle, les revendications des salariés ne les évoquent qu'au cours du premier XXe siècle (avec le recensement clinique des premiers cas à partir de 1925) et leur inscription au titre des maladies professionnelles ne date que de 1946, au lendemain de la nationalisation des Houillères. Les compagnies privées sont donc parvenues à retarder la reconnaissance de leur responsabilité et l'État désormais exploitant cherche à son tour à limiter les dégâts en "requalifiant" la silicose en maladies professionnelles de moindre gravité. La "grande tueuse" (34 000 morts officiellement recensés entre 1946 et 1987) conserve dès lors son statut de bombe à retardement.

(1) Ce centre qui a gardé le nom de Maison du mineur est désormais géré par la Mutualité Française et la Caisse nationale autonome de la Sécurité sociale dans les mines (CANSSM).

Matthieu de Oliveira

Transcription

(Musique)
Journaliste
La maison du mineur de Vence a été créée en 1947. Elle reçoit en moyenne 500 malades par an. Au départ, cet établissement soignait la silicose. Mais au fil des années, cette terrible maladie des mineurs de fond a régressé grâce, en particulier, aux antibiotiques.
Intervenant 1
Depuis la mutation de cet établissement, nous traitons essentiellement les insuffisances respiratoires chroniques, en particulier la bronchite chronique ; dont la recrudescence est importante depuis les méfaits du tabac et de la pollution. Nous avons, de ce fait, adapté la maison avec un laboratoire d’exploration fonctionnelle un peu plus sophistiqué qu’il était antérieurement avec la gazométrie ; et le laboratoire de biologie avec la possibilité de ionogrammes. Nous avons surtout donné la priorité à la rééducation fonctionnelle respiratoire qui a plusieurs buts ; obtenir l’expectoration dirigée pour les malades encombrés, obtenir une meilleure ventilation abdomino diaphragmatique ; pour que le malade acquière une technique plus adaptée à son insuffisance ; ce qui lui permet dans un deuxième temps d’obtenir un réentraînement à l’effort et avoir des conditions de vie qui sont bien meilleures.
Journaliste
Les techniques de soins les plus modernes, des conditions psychologiques et climatiques particulièrement favorables font de cette maison du mineur de Vence, un instrument de qualité tout entier, consacré à l’amélioration de la santé des malades.
Intervenant 2
Je viens du Nord, de Somain exactement. C’est mon troisième séjour que je fais. C’est très bien ici, je me sens beaucoup mieux, c’est d’ailleurs pourquoi que je suis revenu la troisième fois.
Intervenant 3
J’ai subi une trachéotomie pour me permettre de respirer mieux. Et j’ai besoin de soins constants que l’on m’accorde ici avec générosité. Et j’en suis très heureux, ça va beaucoup mieux, mon état s’améliore.
Intervenant 4
Moi, ce que j’ai fait, c’est une bronchite asthmatiforme, c’était ma première maladie. Après plusieurs séjours à l’hôpital, je suis venu ici. Puis depuis que je suis ici, je vois que..., je ne sais pas si c’est le climat ou quoi, mais mon séjour m’a fait beaucoup de bien. Et je respire beaucoup mieux.
Journaliste
Les résultats sont très encourageants. La maison du mineur de Vence, une réalisation humaine pour une œuvre humaine.