Le Louvre-Lens, c'est quoi ? L'historique du projet

04 décembre 2009
02m 46s
Réf. 00285

Notice

Résumé :

Historique du projet du "Louvre-Lens" à base d'archives. En 2003, Lens se porte candidat pour accueillir le Louvre décentralisé. En novembre 2004, la ville est choisie. Le Louvre sera implanté sur le site de la fosse 9-9 bis de Lens. Dès le départ, le projet s'est construit avec les habitants, en témoigne la Maison du projet. Interrogés dans un micro-trottoir, les lensois sont dans l'attentisme, ou le désintérêt. Lens et le Louvre ont fait un pari : celui de la culture dans une ville marquée par les mines et le football.

Date de diffusion :
04 décembre 2009

Éclairage

Diffusé au Journal télévisé régional à l'occasion de la pose de la première pierre du musée le 4 décembre 2009, ce document rappelle l'histoire du projet en utilisant les images d'archives de la visite de Renaud Donnedieu de Vabre pour découvrir le projet de l'installation du Louvre à Lens le 20 juillet 2004 et le retour de celui-ci le 29 novembre 2004, lors de la désignation officielle de la ville de Lens comme site d'accueil de la nouvelle antenne du musée du Louvre. Si le reportage présente cette désignation presque sous l'angle du conte, celle-ci est en réalité moins surprenante qu'il y paraît. Le choix de Lens satisfait en effet les attentes de toute une série d'acteurs. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et le président de la République Jacques Chirac, qui remettent au même moment sur l'agenda la décentralisation, se montrent favorables à une installation du Louvre hors de Paris. Établir cette installation dans une zone qui peine toujours à se remettre de la fin de l'exploitation du charbon, est de bonne politique et concrétise le sentiment encore présent d'un devoir de la collectivité nationale à l'égard des mineurs, ou de leurs descendants (l'émotion soulignée par le ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, atteste ce sentiment). Du côté du Louvre, l'implantation à Lens s'inscrit dans un processus plus global de "succursalisation" des grands musées et de leur transformation partielle en marque, exportable à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire national (1). Le Louvre-Lens s'agrège ainsi à d'autres exemples antérieurs ou contemporains : Guggenheim à Bilbao (le principal modèle pour les élus de l'ex-Bassin minier), la Tate Gallery à Liverpool ou encore le Centre Pompidou à Metz.

Ces différents exemples ont pour point commun d'être localisés dans des zones urbaines longtemps articulées à l'activité industrielle et frappées ensuite de plein fouet par la crise. Dans tous les cas ici, le musée, et en général les grands équipements culturels, sont envisagés comme un nouvel outil de relance économique, d'aménagement urbain et d'inclusion sociale. Les élus et les responsables du Nord-Pas-de-Calais se sont montrés sensibles à cette perspective qui fait de l'innovation culturelle une base du développement. On le voit bien à travers l'inauguration en 2001 du Musée d'art et d'industrie La Piscine, dans la vieille ville textile de Roubaix, ou encore dans les manifestations auxquelles a donné lieu en 2004 l'opération "Lille, capitale européenne de la culture". Les représentants de l'ex-Bassin minier ont cherché, eux aussi, surtout à partir des années 1990, à intégrer ce processus, comme l'attestent la naissance de la scène nationale Culture Commune et plus encore le projet de classement du Bassin minier sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco, projet qui d'ailleurs se déploie simultanément à celui du Louvre-Lens. Pour ce dernier, il faut relever le rôle particulier de deux élus : Daniel Percheron, président socialiste du Conseil régional, qui a passé son enfance dans la cité de la fosse 12 de Lens, à deux pas du site du futur musée (le carreau de la fosse 9-9 bis), et Guy Delcourt, député-maire socialiste de Lens depuis 1998. Les deux hommes se montrent particulièrement actifs dans leur soutien à la nouvelle antenne, dans laquelle il voit un facteur de changement, à la fois sur le plan matériel et le plan symbolique : le prestige du Louvre doit venir effacer l'image misérabiliste qui colle encore à la peau du Pays Noir. Il doit permettre également de contrebalancer un peu le poids écrasant de l'agglomération lilloise, en redonnant sa centralité à Lens, pour laquelle sont prévus de nombreux aménagements (transports, création d'un centre économique "Euralens", etc.). L'inauguration officielle du Louvre-Lens intervient le 4 décembre 2012 mais seule les années et les décennies qui vont suivre pourront décider de ce qu'il adviendra dans les faits de ce grand dessein.

(1) Dominique Poulot, Musée et muséologie, Paris, La Découverte, 2009, p. 81-96.

Marion Fontaine

Transcription

Christelle Massin
Il faut remonter à novembre 2003 pour retrouver le début du début du projet. La première trace de la candidature lensoise, même si tout s’est joué un an plus tard. Le Louvre-Lens, où, quand, comment, pourquoi. Sylvia Gonzalez.
Sylvia Gonzalez
Au début des années 2000, le Louvre a voulu sortir de son Palais royal et remplir autrement ses missions éducatives et sociales. La solution, sortir de Paris. En 2003, Lens et d’autres villes de la région sont candidates pour accueillir le musée, une locomotive économique et sociale très attendue dans le Bassin Minier.
Guy Delcourt
Nous avons plus besoin du Louvre qu’ailleurs car c’est, à mon avis, le seul point de sortie du marasme économique dans lequel nous sommes installés depuis quelques années.
Sylvia Gonzalez
En juillet 2004, le gouvernement se laisse convaincre par l’énergie lensoise. La ville est mobilisée derrière le projet, la région aussi. En novembre, c’est officiel, Lens accueillera la nouvelle antenne du musée du Louvre.
Renaud Donnedieu De Vabres
Je pense aujourd’hui à ces trois personnes qui habitent juste à côté du terrain et dont j’avais senti l’émotion. Eh bien, ce n’est pas un vain mot, je suis sincèrement ému.
Guy Delcourt
Nous avions un tel retard, qu’aujourd’hui nous apporter le Louvre, c’est nous redonner espoir.
Daniel Percheron
Nous ne sommes pas simplement la région de Métal Europe. Nous sommes aussi la région du Louvre, sur une grande friche minière à côté de la cathédrale du sport, le stade Bollaert.
Sylvia Gonzalez
Un symbole social très fort, le Louvre sera implanté près des terrils de la Fosse 9-9 bis de Lens, une autre pyramide. Le Louvre à Lens a surpris, agacé, pour beaucoup, c’est un choc culturel. Pour les porteurs du projet, c’est une ambition, celle de retrouver un public éloigné des toiles de maître et réussir un greffe pas vraiment évidente au premier coup d’œil. Dès le départ, le projet s’est construit avec les habitants, en témoigne la maison du projet ; un lieu emblématique de cette volonté d’ancrage dans le territoire. A Lens pourtant, même si on se réjouit d’un nouvel équipement, on ne croit pas forcément à la baguette magique de la culture.
Inconnu 1
Qu'est-ce qu'ils vont mettre dedans? Des peintures ? Vous ne savez pas non plus ? Bon moi, je m’en fous.
Inconnue 1
Moi, c’est plus le football.
Inconnue 2
Je trouve que le centre-ville commence à mourir à cause de ça, parce que le maire veut tout délocaliser à côté du Louvre.
Inconnu 2
C’est un bon projet et la région en avait probablement besoin aussi.
Inconnu 3
C’est très important pour la ville, pour tout le monde, ça va nous ramener beaucoup de gens, le commerce va mieux tourner.
Inconnue 3
On ne se sent pas concerné, je ne pense pas que c’est adapté à la région Nord-Pas-de-Calais en fait.
Sylvia Gonzalez
Lens et le Louvre ont fait un pari, celui de la culture dans une ville marquée par les mines et le football. La première pierre est à peine posée, que déjà la greffe pose question, un enjeu avec lequel il faut être patient. Lorsque le musée de la Piscine a vu le jour il y a 10 ans, sa pertinence à elle aussi était remise en cause à Roubaix. Aujourd’hui, c’est le 5ème musée de France et la vitrine de la ville.