Une concentration : le 3-15 de Courrières

21 avril 1968
03m 33s
Réf. 00353

Notice

Résumé :

L'ensemble des puits du groupe d'Hénin-Liétard va subir une opération de concentration autour des puits 3-15 à Méricourt. Monsieur Queuillet, directeur de l'exploitation en définit le principe. Il s'agit de rassembler sur deux puits toute l'exploitation de six puits. Il présente sur un panneau le futur ensemble. Le but est d'améliorer les rendements et la croissance de la production.

Type de média :
Date de diffusion :
21 avril 1968
Source :

Éclairage

Le document oppose l'avenir "immuable" du paysage aux changements qui s'opèrent dans le sous-sol du Groupe d'Hénin-Liétard en 1968. Le directeur de l'exploitation du site, assez officiel, explique qu'il s'agit en l'occurrence de passer de six puits à deux, de réunir l'exploitation sur les puits 3 et 15.

Le forçage de la fosse 3 à Méricourt est entrepris en août 1858 par la Compagnie des mines de Courrières et celles du 15 en 1905 juste avant la terrible catastrophe de 1906 qui a vu périr 507 mineurs rien que pour ce puits. La Compagnie des mines de Courrières est nationalisée en 1946, et intègre le Groupe d'Hénin-Liétard. Le titre de ce document indiquant "3 de Courrières" évoque l'origine de la fosse et renvoie à la catastrophe dite "de Courrières". Trois mois après la diffusion de ce reportage, le 1er juillet 1968, le groupe fusionne avec celui d'Oignies pour former le Groupe Centre-Ouest.

La nationalisation des mines a été portée par des objectifs différents : des objectifs politiques en donnant plus de pouvoir aux ouvriers et moins aux patrons ; des objectifs sociaux qui débouchent sur le Statut des Mineurs ; des objectifs nationaux à la recherche de l'indépendance énergétique ; mais aussi des objectifs économiques. La nationalisation rime avec la rationalisation. Or les concentrations sont un aspect très important de la rationalisation de l'exploitation.

La concentration consiste à rassembler l'extraction du charbon sur un minimum de fosses. Chaque siège d'extraction où le charbon est transporté à la surface s'accompagne de puits secondaires qui servent à descendre le matériel et les hommes (puits de service) et à l'aérage des galeries (puits d'aérage). La concentration a un inconvénient : elle rallonge les distances des transports souterrains, mais ceci est compensé par l'introduction de transports plus rapides. Elle permet par ailleurs de réduire les coûts d'extraction et d'améliorer le rendement général de la mine. Le terme du processus peut être un seul siège d'extraction par bassin comme cela a été le cas aux Houillères du Bassin du Centre Midi à Gardanne avec la création du "Grand ensemble Morandat" au début des années 1980.

A l'époque des compagnies privées, la concentration se réalisait au gré des alliances ou des rachats entre les entreprises capitalistes. Avec la nationalisation de l'ensemble des charbonnages et la création de Charbonnages de France (CdF) avec son organisation en bassins, la concentration peut être pensée à long terme pour chaque bassin. C'est une démarche dans laquelle les ingénieurs des Mines ont une très grande compétence et qu'ils exercent avec beaucoup de satisfaction.

A la question que le directeur se pose à lui-même : y a-t-il contradiction entre cet investissement et "la menace de récession qui, nous dit-on, pèse lourdement sur l'avenir du charbon ?" (on remarquera le déni de la récession : "nous dit-on"), il répond avec prudence que le rythme de la récession est nécessairement différent selon les exploitations. Il s'agit donc de prolonger la longévité de cette exploitation du Bassin des Houillères du Nord-Pas-de-Calais. Elle durera 20 ans : en 1983 la fosse 3 cesse l'extraction qui est reprise par le 4-5, le puits 15 est alors remblayé puis le 3 l'est cinq ans plus tard, en 1988, à la fermeture du 4-5.

Philippe Mioche

Transcription

(Musique)
(Bruit)
Journaliste
Ce paysage, ce paysage minier que nous dominons actuellement du haut du 3 de Courrières semble promis à un avenir immuable. En fait, c’est sous terre que les transformations vont s’effectuer. L’ensemble de ces puits va connaître une opération dite de concentration.
(Musique)
Journaliste
Et Monsieur [Queuillet], Directeur de l’exploitation fond en définit le principe.
Intervenant
Concentrer la production du charbon, c’est rassembler sur un ou deux puits toute l’extraction qui se fait normalement par un nombre beaucoup plus important de puits. En l’espèce, nous partons d’une situation avec 6 puits périphériques autour du champ à exploiter et nous allons faire l’extraction de toute cette zone par 2 puits seulement placés à peu près au centre.
(Musique)
Intervenant
Vous voyez ici, sur ce panneau, le champ d’exploitation d’ensemble de la future concentration. Actuellement, l’extraction y est faite par 6 puits, de 3 et 15, les 2 puits du 6, le 5 et le 12. L’objet de la concentration va être de ramener toute la production sur les seuls puits 3 et 15. Le champ d’exploitation en question est limité au nord par une zone qui est stérile, au sud par les travaux déjà en cours du 4 sud et du 5, au sud-ouest par les travaux de Liévin, et enfin à l’ouest par les travaux de Lens.
(Musique)
Journaliste
Création d’un nouvel ensemble, rendement amélioré, cadence croissante de la production, et bien, voilà certainement des éléments très réconfortants. Mais n’y a-t-il pas là comme une contradiction avec cette menace de récession qui, nous dit-on, pèse lourdement sur l’avenir du charbon dans le Bassin ?
(Musique)
Intervenant
Et bien d’abord, pour des raisons d’économie, bien sûr, les Houillères sont en récession mais toutes les exploitations ne vont pas diminuer l’extraction au même rythme. Et le paquet de charbon qui est considérable, puisqu’il y a 45 ou 50 millions de tonnes dans cette région, donne une espérance de longévité importante à la concentration que nous allons faire. Si bien que son but, c’est finalement de diminuer le prix de revient de la production qu’on fera dans toute cette zone.
(Musique)