François Mitterrand en voyage aux Etats-Unis

29 novembre 1975
01m 52s
Réf. 00194

Notice

Résumé :
François Mitterrand donne quelques impressions sur son voyage aux Etats-Unis : "Moi je suis frappé par l'Amérique de l'espace libre. Je me suis promené le long du Potomac. On aurait pu imaginer l'Amérique originelle, l'espace libre ".
Date de diffusion :
29 novembre 1975
Source :
TF1 (Collection: JT 20H )
Personnalité(s) :

Éclairage

François Mitterrand effectue ce voyage privé aux Etats-Unis du 24 au 29 novembre 1975, à l’invitation du Council of Foreign relations de New-York et des universités de New-York, de Columbia, d'Harvard et d'Amherst. Depuis son élection comme Premier secrétaire du Parti socialiste, il ne s'était pas encore rendu aux États-Unis, ni sur le continent Nord-Américain. S’il n’y était pas strictement au titre de premier des socialistes, ce voyage est ainsi malgré tout symboliquement et politiquement important.

A Washington, ce déplacement donnea en effet l'occasion à François Mitterrand de s'exprimer devant la presse américaine par l’intermédiaire du National Press Club, ainsi que de s'entretenir avec des dignitaires américains comme le secrétaire d’Etat Henry Kissinger et des membres démocrates de la Commission des affaires étrangères de la Chambre des Représentants. Grâce à l’action du militant socialiste et conseiller de presse à l’Ambassade de France, Renaud Vignal, il est même reçu à dîner à l’ambassade tout comme au consulat à New-York, ville où il donne une conférence devant le Council of foreign relations. Il séjourne enfin à Amherst (Massachusetts) où il rencontre divers universitaires dont des spécialistes de la politique française.

Ce voyage compte parmi les voyages socialistes les plus couverts par la presse française, du fait de l’importance géopolitique des Etats-Unis et de l’attention portée de chaque côté de l’Atlantique aux relations franco-américaines. François Mitterrand est ainsi soucieux de porter un regard informé sur les Etats-Unis, loin de tout anti-américanisme primaire. Dans ses différentes interventions, il souligne combien les États-Unis sont divers, par leurs paysages, par leur échiquier politique et par leurs aspirations : pays de l’immense ville comme de l’immense nature, du libéralisme politique comme politique. Cette vision est très personnelle, marquée par une tendresse et une fascination, forgée par ses voyages antérieurs et par son expérience de la Seconde Guerre mondiale. Elle vise aussi, par sa médiatisation, à compenser les attaques de certaines franges du PS contre « l’impérialisme américain », ainsi qu’à apaiser les craintes que peuvent susciter aux Etats-Unis la progression électorale de l’union de la gauche conclue avec les communistes.
Judith Bonnin

Transcription

François Mitterrand
On imagine de loin les États-Unis d’Amérique sous la forme suivante, d’énormes villes, des gratte-ciels, des millions d’hommes et de femmes entassés, des rues encombrées, beaucoup de lumière, la vie trépidante, quelquefois la violence. Et moi, je suis surtout frappé, bien que cet aspect ne soit pas non plus tout à faux, par ce que j’appellerais l’Amérique de l’espace libre. Avant-hier par exemple, à Washington, je suis allé me promener pendant quelques quarts d’heure le long du Potomac, je suis sorti de la ville, je suis allé vers les rapides, c’est-à-dire du côté de l’Ouest. Et très vite, à peine cette immense ville à l’horizon, c’était l’immense nature. On aurait pu imaginer l’Amérique originelle, l’espace libre. Hier soir, j’étais dans une réunion amicale avec des écrivains, des sculpteurs, des artistes et j’entendais des architectes, j’entendais beaucoup d’idées, presque une ivresse du choc des idées. Et je m’éloignais soudain de cette Amérique un peu pesante, un peu conservatrice, un peu figée qu’on nous présente à l’extérieur. Et je me mettais un peu à imaginer ce que cela pourrait donner dans un monde nouveau si l’Amérique redevenait ou s’affirmait telle qu’elle est, c’est-à-dire un immense espace libre où il serait possible de construire une société nouvelle. Je ne me contente pas de rêver, j’espère.