Message de François Mitterrand lu par Jacques Chaban-Delmas

08 avril 1986
01m 36s
Réf. 00153

Notice

Résumé :
Jacques Chaban-Delmas, président de l’Assemblée nationale, lit un message du président François Mitterrand au Parlement.
Date de diffusion :
08 avril 1986
Source :
Antenne 2 (Collection: JT 20H )

Éclairage

La possibilité d’une cohabitation entre un Président de la République et une assemblée parlementaire issue de deux familles politiques différentes est inscrite dans la Constitution de la Ve République, mais les opinions à propos de sa viabilité ne sont pas unanimes.

Dans les rangs de la droite, le débat est ouvert depuis 1983 et deux courants se distinguent nettement. D’une part, il y a ceux qui sont favorables à la cohabitation pour permettre à la droite de gagner Matignon et renforcer son électorat en prévision de l’élection présidentielle de 1988. On y trouve Jacques Chirac et le RPR, tout comme François Léotard du Parti républicain, formation issue de l’UDF. Ce dernier adopte d’ailleurs une position différente avec celle de sa formation politique de référence, car l’UDF, principalement par la voix de Raymond Barre, s’oppose à la cohabitation : elle finirait par renforcer le pouvoir du président de la République, alors arbitre de l’exécution du programme de gouvernement, ce qui pourrait affecter en négatif les partis de la droite lors de la campagne présidentielle qui se jouera en 1988. La campagne législative pour les élections de 1986 voit cette divergence d’opinion s’approfondir par la voix de ses deux principaux représentants : alors que Raymond Barre accepte – mais ne signe pas – la plateforme électorale formée par le RPR et l’UDF, il se soustrait à toute expression publique qui puisse l’obliger à cautionner une forme de gouvernement, celle de la cohabitation, dans laquelle il ne croit pas ; ce qui l’oppose à Jacques Chirac, alors prêt à accepter la cohabitation avec le président socialiste.

Dans ces querelles, François Mitterrand se contente d’observer en spectateur ce que l’opposition prépare en vue d’une éventuelle victoire aux législatives ; victoire que les résultats des élections cantonales de 1985 rendent fort probable. De son côté, le Président se borne à rappeler que l’autorité du Président de la République n’est pas remise en question par les différentes échéances législatives qui jalonnent la vie politique. Aussi, il n’entend pas désavouer toute majorité qui se définira par les urnes, laissant le gouvernement choisi par le peuple gouverner, comme la Constitution l’indique. C’est le fond du message qu’il adresse à l’Assemblée nationale le 2 avril, alors que la cohabitation est désormais une réalité et qu’il faut fixer par la pratique les règles pour sa mise en œuvre.
Ilaria Parisi

Transcription

Bernard Rapp
Madame, Monsieur, bonsoir. Le message du président de la République au Parlement relève en principe de la tradition républicaine. Mais avec la cohabitation qui régit la vie politique en France depuis maintenant trois semaines, il prenait aujourd’hui un relief particulier. C’était l’occasion pour le Chef de l’État de préciser ce que doit être la règle du jeu entre lui-même, le Gouvernement et le Parlement. Avec une idée forte, il faut s’en tenir à la Constitution, Monsieur Mitterrand.
Jacques Chaban-Delmas
Pour la première fois, la majorité parlementaire relève de tendance politique différente de celle qui s’était rassemblée lors de l’élection présidentielle, ce que la composition du gouvernement exprime comme il se doit. Devant un tel état de chose, qu’ils ont pourtant voulu, beaucoup de nos concitoyens se posent la question de savoir comment fonctionneront les pouvoirs publics. À cette question, je ne connais qu’une réponse, la seule possible, la seule raisonnable, la seule conforme aux intérêts de la Nation : la Constitution, rien que la Constitution, toute la Constitution. Quelque idée qu’on en ait, et je n’oublie pas moi-même ni mon refus initial, ni les réformes qu'au nom d’un vaste mouvement d’opinion, j’ai naguère proposées, et que je continue de croire souhaitables, elle est la loi fondamentale. Il n’y a pas en la matière d’autre source du droit, tenons-nous-en à cette règle.