Réunion de la famille socialiste dans la Nièvre

28 janvier 1995
01m 45s
Réf. 00301

Notice

Résumé :
Banquet républicain à Château-Chinon à l’occasion du 14e anniversaire de la déclaration de candidature à la présidentielle de François Mitterrand en 1981. Sur les images, on voit trinquer Lionel Jospin et Henri Emmanuelli, alors qu'ils sont tous deux candidats à l’investiture du Parti socialiste pour l’élection présidentielle. François Mitterrand assure qu’il n’est pas venu pour jouer l’arbitre et "trouve normal qu'une formation démocratique organise en son sein une juste compétition pour savoir quel est le candidat qui lui paraît le mieux convenir à la situation".
Date de diffusion :
28 janvier 1995
Source :
FR3 (Collection: 19/20 )

Éclairage

A l’occasion du 14e anniversaire de la déclaration de sa candidature à l’élection de 1981, François Mitterrand se rend pour l’une des dernières fois de son mandat dans son fief électoral, Château-Chinon. Cette visite, officiellement à l’initiative du Parti socialiste (PS) de la Nièvre, permet au président de s’afficher en rassembleur, alors qu’au sein du PS la crise pour désigner celui qui lui succédera est à son apogée. 

Les militants sont en effet appelés pour la première fois à se prononcer eux-mêmes sur le nom de leur candidat à l’élection présidentielle. Après le retrait de Jacques Delors au mois de décembre 1994, alors que ce dernier partait favori (voir ce document), le PS se divise. Il y a d’un côté Lionel Jospin qui avait succédé à François Mitterrand à la tête du PS en 1981. Il s’érige contre la stratégie de rapprochement avec le parti radical de Bernard Tapie voulue par l’Élysée. Les mitterrandiens lui opposent Henri Emmanuelli, le premier secrétaire en exercice. Jack Lang se retire rapidement de la course et laisse donc la place à un duel entre ces deux hommes.

La mise en scène de ce banquet républicain qui se déroule sous l’oeil des caméras le 28 janvier, dix jours après la déclaration de candidature de Henri Emmanuelli, ne parvient pas à gommer les divisions qui affectent le PS. Les deux candidats sont installés à gauche et à droite du président qui déclare ne pas vouloir choisir entre eux, refusant le rôle « d’arbitre ». 

François Mitterrand incarne néanmoins ici une figure consensuelle et rassembleuse qui est destinée à renvoyer l’image d’une apparente unité de la « famille » socialiste réunie autour de son chef. 

Dans la suite de son discours, après avoir fait savoir qu'il ne choisirait pas de dauphin, il livre un message politique en indiquant que le principal adversaire pour la présidentielle est la droite et que le candidat du PS aura pour tâche essentielle la réduction des inégalités et la construction européenne.

Moins d’une semaine plus tard, le 4 février, Lionel Jospin remporte la désignation avec 65,83% des suffrages militants. Dans la campagne, il réclame un « droit d’inventaire » à l’égard de l’héritage mitterrandien. Le 17 mai, après la défaite de Lionel Jospin, les mêmes sont de nouveau rassemblés au siège du Parti socialiste, à l’occasion du départ de François Mitterrand de l’Elysée (voir ce document).
Arthur Delaporte

Transcription

Catherine Matausch
Nous ouvrons notre page politique avec d'abord le grand banquet du PS à Château-Chinon, le fief électoral de François Mitterrand, qui a joué aujourd'hui le rôle d'arbitre entre Henri Emmanuelli et Lionel Jospin. Il ne choisit pas mais il s'autorise à leur faire un peu de morale. Le reportage de Danielle Sportiello et Herve Gutman.
Danielle Sportiello
Les trois enfants terribles sont là. Jack Lang, l'enfant gâté, qui s'est pourtant sacrifié sur l'autel du devoir pour laisser la place à un autre: Henri Emmanuelli. Jospin, Emmanuelli, les anciens amis engagés dans une compétition sans merci : la course à l'investiture, sont pourtant côte à côte, sourire obligé ; car le père, qui n'aimait plus se montrer en famille est de retour. Nostalgie des réunions de famille d'antan, même si aujourd'hui chacun se dispute l'héritage d'un père qui n'a pas réglé, c'est le moins qu'on puisse dire, les problèmes de succession. Aujourd'hui, le chef de l'Etat n'hésite plus à redevenir chef de famille pour dédramatiser la dernière querelle du PS.
François Mitterrand
Je trouve tout à fait normal qu'une formation démocratique organise en son sein une juste compétition pour savoir finalement quel est le candidat qui lui paraît convenir le mieux à la situation. Je ne participerai pas à ce scrutin là, mais au mois de mai, enfin avril et mai, là je dirai ce que j'aurai à faire. Et nul ne peut naturellement imaginer que ma préférence pourrait aller à un autre qu'à l'un de mes compagnons de toujours.
Catherine Matausch
Lassé des querelles de famille du PS, le chef de l'Etat ferait le lit d'un autre candidat, Raymond Barre. Une rumeur que François Mitterrand a voulu démentir en s'affichant aujourd'hui parmi les siens