Les classes de neige

05 mars 1953
01m 08s
Réf. 00053

Notice

Résumé :

L'école communale de Vanves, en région parisienne, dans les Hauts de Seine, part un mois en classe de neige, à La Feclaz. Le matin, les élèves suivent les cours et l'après-midi, ils pratiquent le ski. Cette expérience a été menée dans l'école depuis plus d'un an, afin de savoir si cette organisation pouvait être mise en place dans d'autres établissements scolaires.

Date de diffusion :
05 mars 1953
Source :

Éclairage

Du 31 janvier au 28 février 1953 est mise en place la première classe de neige par l'école communale de Vanves dans la région parisienne. Elle a lieu dans un chalet à la Féclaz, près de Chambéry. L'expérience est relatée dans les Actualités Françaises (1) du 5 mars 1953. Dans l'immédiat après-guerre, l'heure est à la reconstruction de l'école et au redressement de la nation. Santé et hygiène fondent les discours des hommes politiques et des responsables de l'éducation physique et sportive à l'école . La classe de neige naît à l'initiative du docteur Max Fourestier qui, après avoir imaginé dès 1950 un « mi-temps pédagogique et sportif », transpose en 1953 l'expérience à la montagne . Doté d'un réseau solide, connu des journalistes pour ses découvertes médicales (invention de l'endoscope à l'hôpital de Nanterre), le docteur sait investir tous les médias, comme l'illustre ce reportage maîtrisé de bout en bout. Le document est un plaidoyer pour la classe de neige présentée comme une expérience innovante et régénératrice. Le vocabulaire qui parcourt l'ensemble du commentaire est à ce titre éclairant : l'école communale de Vanves ne serait « pas une école comme les autres » ; on y tente une « expérience », une « nouvelle aventure scolaire », une « formule nouvelle ». Le gros plan sur la moufle d'un jeune écolier tenant fermement un cartable - gros plan voulu par Max Fourestier - énonce clairement l'objectif à atteindre : suivant une discipline quasi-militaire, « skis sur l'épaule et cartables à la main », les « 35 garçons de 12 à 13 ans » doivent pratiquer des activités intellectuelles le matin et des activités physiques l'après-midi, afin que « les écoliers en parfaite santé redoublent d'activité au travail ». Le reportage insiste d'ailleurs sur cette dimension laborieuse. Il ne s'agit pas de vacances à la neige. Il s'agit bien davantage par l'activité physique d'améliorer les performances intellectuelles – et de rassurer les parents. La séquence qui montre l'instituteur en train de corriger les devoirs du matin tandis que les écoliers pratiquent le ski est explicite. La « nouveauté » de l'expérience tient davantage dans la modification des horaires que dans les contenus enseignés. C'est aussi ce que montre le discours sur la montagne – ou plutôt l'absence de discours sur la montagne. Attaché à une montagne qui, au sanatorium de Saint Hilaire du Touvet dans les années 1930, lui avait permis de guérir de sa tuberculose, le docteur Fourestier ne s'intéresse pas à la montagne en elle-même ni à ses apports pédagogiques. Le reportage nous montre un cadre idyllique et réparateur. Il s'agit de quitter le « ciel gris » et pollué de la ville pour les « horizons clairs de la montagne ». On distingue furtivement dans un plan à la fin du reportage quelques habitations mais on privilégie les plans sur la nature « vierge ». La montagne est un cadre sain pour régénérer les corps : nous sommes dans la continuité d'une vision qui perdure au moins depuis le XIXe siècle. L'expérience n'en restera pas là et par la suite, d'autres enseignants se proposeront d'utiliser la montagne comme outil pédagogique. Au-delà, la réussite des classes de neige jusqu'à la fin des années 1960 – plus de 35 000 écoliers partent en classes de neige en 1965 – contribue à démocratiser la pratique d'un ski qui dans les années 1950 était encore l'apanage d'une élite.

(1) Les « Actualités Françaises » font partie des collections d'archives d'actualités cinématographiques conservées par l'INA. L'ensemble de ces documents a fait l'objet d'une restauration de l'image et du son opérée par les équipes de l'INA. Ces films étaient diffusés dans les salles de cinéma sous les dénominations suivantes :

- Les « Actualités mondiales » (août 1940 – août 1942), version pour la France du journal allemand de l'UFA, seul journal cinématographique visible dans la zone occupée. En « zone libre » un journal cinématographique est édité d'octobre 1940 à août 1942 sous le contrôle étroit du régime de Vichy : le journal de France–Actualités Pathé.

- « France Actualités » (août 1942 – août 1944) : ces actualités du régime de Vichy sont diffusées sur tout le territoire et, à capitaux français et allemands, elles marquent l'engagement plus profond du gouvernement de Vichy dans la collaboration.

- « France Libre Actualités » (septembre 1944 – décembre 1944), journal cinématographique fondé en coopérative par plusieurs comités de Résistance.

- Ce journal d'actualités prend le nom « d'Actualités Françaises » à partir de janvier 1945 et sera diffusé dans les salles de cinéma jusqu'en février 1969.

Pour aller plus loin :

- Attali Michaël, Saint Martin Jean (2009) L'éducation physique de 1945 à nos jours : les étapes d'une démocratisation. Paris : A. Colin.

- Laffage-Cosnier Sébastien (2013) L'élève accompli : les innovations scolaires menées à Vanves par le docteur Max Fourestier (1950-1973). Th : sciences du sport : université de Franche-Comté : dir. Christian Vivier et Jean-François Loudcher.

Isabelle Gaillard

Transcription

Journaliste
L’école communale de Vanves n’est pas une école comme les autres. Une expérience y est tentée depuis plus d’un an qui va peut-être révolutionner la vie des écoliers. Un coup de sifflet vient de donner le signal d’une nouvelle aventure scolaire, une aventure qui va conduire l’instituteur et ses 35 élèves, vers les horizons clairs de la montagne. Les skis sur l’épaule, et cartable à la main, les 35 garçons de 12 à 13 ans quittent le ciel gris de la banlieue parisienne, pour aller suivre leurs cours durant un mois en pleine montagne.
(Musique)
Journaliste
Et c’est en effet toute la petite troupe que l’on retrouve un peu plus tard, au chalet de l’Aurore à La Féclaz.
(Musique)
Journaliste
Après une matinée consacrée au travail scolaire, les écoliers disposent de tout leur après-midi pour s’initier au ski sur les pentes des Alpes. Formule nouvelle, formule efficace, est-on déjà en mesure d’affirmer, car les écoliers, en parfaite santé, redoublent d’activité au travail. Cette nouvelle méthode sera-t-elle multipliée ? les petits citadins auront-ils, une fois l’an, leur classe des neiges ? on doit l’espérer.