Le point sur l'industrie textile en Bretagne

07 avril 2000
02m 45s
Réf. 00249

Notice

Résumé :

Face à la concurrence des pays émergents, l'industrie textile française est en crise. Les entreprises bretonnes Guy Cotten et Armor-lux résistent à cette concurrence, mais espèrent une aide de l'Etat.

Date de diffusion :
07 avril 2000
Source :
FR3 (Collection: JT Rennes soir )

Éclairage

L'industrie textile, liée autrefois à la fabrication des toiles de lin et de chanvre a connu sa plus grande prospérité en Bretagne sous l'ancien Régime. L'abondante main d'œuvre bretonne filait et tissait pour les marchands des villes qui prospectaient les marchés extérieurs plus gourmands depuis la fin du XVe siècle : la Bretagne devient alors un grand fournisseur de toiles (les Noyales ou les Olonnes) utilisée pour les voiles. Au XIXe, lorsque la marine à voile disparaît, alors que la concurrence du coton s'affirme, le marché s'effondre.

Toutefois, l'industrie textile est encore présente en Bretagne jusqu'à la dernière décennie du XXe siècle car des entreprises ont été attirées par le potentiel de la main d'œuvre féminine des campagnes. Mais depuis 20 ans, le secteur est fragilisé par la concurrence des pays à bas salaires : les pertes d'effectif se sont montées à 5 200 emplois en quinze ans, soit 60 % des salariés. Le reportage se fait l'écho de ces difficultés.

En 2008 la Bretagne ne compte plus que 63 établissements de plus de 10 salariés, essentiellement regroupés autour de Fougères et Vitré (chaussures), et de la zone Brest-Quimper (textile). Cependant, des dynamiques sont apparues. Les entreprises qui subsistent sont celles qui proposent des produits bien identifiés à forte valeur ajoutée – Armor-Lux et Cotten par exemple, dont nous voyons les responsables dans le document. Ces derniers ont réussi à maintenir une partie de leur production en Bretagne. Le directeur d'Armor-Lux qui veut défendre la production bretonne vient de créer la collection "Molène" entièrement fabriquée à Quimper qui bénéficie du label "produit en Bretagne". Dans un secteur fortement concurrencé et en mutation permanente, la Bretagne peut trouver sa place en jouant à la fois sur l'image (l'identité bretonne souvent alliée à la pratique des sports nautiques) et sur l'innovation (engagement dans la filière biologique avec le renouveau du chanvre ou la fabrication du micromoal à base d'extrait de pulpe de bois de hêtre par exemple).

Bibliographie :

- Revue ArMen, n° 137 et n°167.

Martine Cocaud

Transcription

Eric Nedjar
De grosses unités comme celles-ci en Bretagne, il n'en existe pratiquement plus. Armor Lux emploie 450 salariés et son PDG, Jean-Guy Le Floch, s'est engagé à maintenir ces emplois, malgré la très forte concurrence des pays tiers. Pourtant lui aussi a recours à la délocalisation. Une partie de sa production est fabriquée en Chine, au Vietnam, en Tunisie ou au Maroc. Des pays où la main-d'oeuvre peut-être 10 fois moins chère qu'en France.
Jean-Guy Le Floch
Notre stratégie est simple, développer nos marques, convaincre de plus en plus de consommateurs de les acheter parce qu'elles le méritent, euh augmenter notre chiffre d'affaire, et le chiffre d'affaire supplémentaire, le délocaliser pour ouvrir notre spectre de marge et pour sécuriser quelque part les emplois existants sur le site ici.
Eric Nedjar
Chez Armor Lux donc, on maintient les emplois mais on n'en crée plus. On ne remplace plus non plus les départs en retraite, les risques sont trop grands, l'avenir incertain. En 1996, une aide sous forme d'allègement des charges sociales a été accordé à la profession dans le cadre du plan Borotra. Cette mesure a été condamnée par Bruxelles. Aujourd'hui les entreprises doivent rendre ce qu'elles ont touché. Ajoutez à cela la baisse du temps de travail, la loi Aubry sur les 35 heures ne fait que renforcer les difficultés que traverse l'ensemble de ce secteur d'activités, et le malaise qui y règne.
Guy Cotten
Sans être rétrograde quand on le, qui dit : travailler moins sans baisse de salaire, c'est une augmentation de coût. Quand on a déjà euh, quand on paie déjà plus cher, quand le travail, la main-d'oeuvre en France coûte déjà extrêmement plus cher que partout ailleurs, enfin en tout cas chez nos concurrents, bon, il n'y a pas de miracle hein.
Michèle Laguadic
Ça devrait être une avancée sociale et on a l'impression qu'on le subit. Tous les acquis sont remis à plat et on voit pas le bout du tunnel.
Eric Nedjar
Puisque la crise dure, la CFDT a décidé de réagir en proposant une plate-forme de revendications, comme la création d'un label social pour que le consommateur sache ce qu'il achète, l'interdiction du travail des enfants ou du travail forcé, l'accès en France pour tous les salariés de l'habillement à la formation continue. En tout, 10 propositions pour tenter de relancer l'industrie de l'habillement en France, ou en tout cas stopper les pertes d'emplois.
Maryse Tibulle
On a apporté des aides dans le temps à la métallurgie, à l'automobile, on n'est pas capable de faire dans le textile ? Je crois qu'il était, il était temps aujourd'hui qu'on dise qu'il y a une hémorragie, une hémorragie on peut l'enlever et ça évite la mort hein, en gros c'est un petit peu ça.
Eric Nedjar
Car l'industrie de l'habillement, du cuir et du textile, emploie aujourd'hui moins de 300 000 salariés et en perd chaque année 24 000. A ce rythme, si rien n'est fait, on le voit, c'est bien l'ensemble d'une profession qui pourrait disparaître d'ici 10 ans.