Une ardoisière à Saint Cadou

15 mars 1996
01m 55s
Réf. 00276

Notice

Résumé :

Alain et Dany Pouliquen sont artisans ardoisiers. Ces frères exploitent une ardoisière à Saint Cadou, dans le Finistère. Après des années difficiles, ils participent actuellement à la restauration du toit de la cathédrale de Quimper.

Date de diffusion :
15 mars 1996
Source :
A2 (Collection: Midi 2 )

Éclairage

La diminution du besoin de main d'œuvre dans les fermes ne suffit pas à expliquer la chute démographique des zones rurales : les évolutions techniques du monde artisanal ont également joué un rôle important.

Dans le passé, l'exploitation des ardoisières de Bretagne (ardoises fines de Maël-Carhaix dans les côtes d'Armor, ardoises épaisses du Mont d'Arrée, mais aussi ardoises de Ploërmel et de Rochefort dans le Morbihan etc.) jouaient un rôle économique important. Les ardoises alimentaient le commerce maritime et étaient vendues en France et à l'étranger. Au XIXe siècle, l'activité était à son apogée car la prospérité agricole permettait la construction de nouveaux édifices.

Les difficultés sont apparues dès les années 1930, et face à la concurrence des ardoises angevines et espagnoles, le savoir-faire des ardoisiers a failli disparaître : c'est la réfection de la cathédrale de Quimper qui sauve le dernier artisan de Saint Cadou. Celle de la toiture du Parlement de Bretagne est revenue aux ardoisières de Maël-Carhaix. Le sauvetage des ardoisières, et par conséquent des métiers liés à ce matériau, dépendent donc des bâtiments historiques car peu de constructions récentes l'utilisent. En effet, si la qualité du schiste est excellente (l'ardoise ne blanchit pas), son exploitation en partie manuelle la rend onéreuse.

La technique de préparation de l'ardoise est délicate. Les blocs de schiste qui peuvent faire plusieurs tonnes sont découpés manuellement en bloc, puis ils sont ensuite "tiercés", c'est à dire cassés au marteau et au ciseau dans le sens de la longueur.

Bibliographie :

- Article "Ardoise" dans Alain Croix, Jean-Yves Veillard, Dictionnaire du patrimoine breton, Rennes, éditions Apogée, 2000.

Site internet :

"Renaissance de la belle bleue"

Martine Cocaud

Transcription

Jacques Deveaux
Dans le village de Saint-Cadou, au coeur des Monts d'Arée, chaque maison rappelle que l'ardoise était la richesse du pays. De l'ardoise rustique, épaisse, dont on dit qu'elle dure 100 ans. Mais de la quinzaine d'ardoisières que l'on a compté ici, il n'en reste plus qu'une seule, celle des frères Pouliquen. Ils se sont accrochés sur cette terre ingrate, un travail d'un autre temps.
Alain Pouliquen
Faut pas avoir peur de se salir, faut pas avoir non plus de se couper parce que bon, tout est manuel à part donc le minage au départ et le, le déblaiement avec le tractopelle, et tout le reste, tout le reste se fait au marteau, burin, à la barre à mine et à la masse.
Jacques Deveaux
Tandis qu'Alain ramène les blocs d'ardoise, son frère Dany est à la taille, il reproduit pendant des heures, des gestes séculaires.
Dany Pouliquen
L'ardoise ne se travailles pas comme ça, on peut pas travailler avec euh, on peut la prendre comme ça, sèche, il faut qu'elle soit, il faut qu'elle soit en bonne condition, il faut que le bonhomme soit en bonne condition, mais il faut que le, l'ardoise soit aussi. On ne peut pas l'ouvrir, si elle est trop mouillée, on ne peut pas l'ouvrir, si elle est trop sèche, on ne peut pas l'ouvrir. Alors en fin de compte, c'est pratiquement elle qui nous commande.
Jacques Deveaux
Les deux frères ont longtemps attendu le client. La couverture en grosse ardoise ne se fait plus, trop coûteuse et trop lourde. La restauration de la cathédrale de Quimper est une manne providentielle. 70 000 ardoises à fournir, du travail pour quatre ans.
Dany Pouliquen
On a souffert pendant quelques années, je peux vous dire. Si on est restés ici vraiment, c'était pour sauver tout ce qui, tout ce patrimoine là qui allait, qui allait, qui partait en, en ruines quoi.
Jacques Deveaux
Il fallait y croire.
Dany Pouliquen
Il fallait y croire, oui, il fallait y croire, bon. Mais vous savez, on n'a pas gagné, on n'a pas gagné beaucoup d'argent hein.
Jacques Deveaux
Un savoir-faire sauvé grâce aux monuments historiques. Pour le toit de la cathédrale de Quimper, on a refusé d'utiliser de l'ardoise de récupération. Or, la récupération contribue à un véritable pillage des hameaux de Bretagne.