Les canons de la Natière

12 décembre 2006
02m 55s
Réf. 00323

Notice

Résumé :

Le site de la Natière, au large de Saint Malo, a révélé quatre épaves de navire, ainsi que neuf canons du XVIIIe. Les canons ont été conservés et vont être étudiés par les archéologues. Ces fouilles permettent de reconstituer la vie à bord d'un navire.

Date de diffusion :
12 décembre 2006
Source :
Personnalité(s) :

Éclairage

En 1995, un plongeur malouin découvre, tapies sous les laminaires, deux grandes épaves miraculeusement préservées par le temps et les sédiments, désignées Natière 1 et 2. En 1999, la fouille est lancée. Michel L'Hour, archéologue du DRASSM (Département de recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines) et responsable du projet, le qualifie comme étant "l'un des sites le plus attractif au monde". Plusieurs mois d'études en archives ont été nécessaires pour les identifier comme deux frégates corsaires du début du XVIIIe siècle : la Dauphine, du port du Havre, perdue lors de son retour de campagne sous le règne de Louis XIV en 1704, et l'Aimable Grenot de Granville, naufragé en 1749 alors qu'il appareillait pour Cadix.

La conservation miraculeuse de ces bateaux a permis d'extraire de la coque de la Dauphine une foule d'objets témoins de la vie à bord et riches de renseignements sur la construction maritime et sur les techniques de commerce : des céramiques normandes et allemandes, des pots en étain, des armes, épées, sabres et pistolets ainsi que des chaussures, des tonneaux, des instruments de chirurgie...

Ce chantier ambitieux a permis de lancer d'autres projets : on estime à dix ou quinze mille le nombre de sites archéologiques potentiels sur les côtes du littoral atlantique français. Pour l'heure, seuls quelques milliers d'entre eux sont identifiés avec certitude et localisés avec précision. Un Atlas archéologique des biens culturels maritimes de l'Arc atlantique, qui dressera l'inventaire méthodique des épaves du littoral du Ponant est en cours de réalisation conjointe par la DRASSM et l'association ADRAMAR (Association pour le Développement de la Recherche en Archéologie Maritime).

Martine Cocaud

Transcription

(bruits)
Karine Cevaer
Sous les feux des projecteurs, ce canon du XVIIIe siècle est enfin mis à nu. Habillé par la mer d'une épaisse concrétion, ce témoignage du passé va enfin pouvoir parler. Voici la suite du feuilleton de la Natière, ce fameux site au large de Saint-Malo, où quatre épaves de navire ont été découvertes.
Gilles Baron
Sur cette épave précise de la Natière, en fait, il y a 9 canons en traitement, et il n'y a aucun canon identique. Donc tous les canons sont différents avec des moulures, des motifs, des inscriptions. Donc à chaque fois, c'est une surprise.
Karine Cevaer
Evidemment, les archéologues sont là, avides de ces toutes premières informations que l'océan avait jalousement gardées.
Elisabeth Veyrat
Ce canon est extraordinairement conservé, oui. La gangue l'a protégé, il était protégé sur l'ensemble de sa surface par la gangue. Donc toutes les surfaces d'origine, d'il y a 302 ans sont là. On a déjà des inscriptions, des chiffres, une fleur de lys pour l'un d'entre eux, donc signe, en fait, d'une fonderie probablement royale, et donc des choses... suffisamment d'informations qui vont permettre d'être croisées avec les données d'archives, données historiques.
Karine Cevaer
C'est ainsi qu'ils ont découvert que ces canons provenaient de la Dauphine, une frégate corsaire drossée sur les rochers par un mauvais coup de vent en 1704.
(Musique)
Karine Cevaer
Trouvées par un plongeur à 17 mètres de profondeur, ces pièces d'artillerie font partie d'un gigantesque puzzle, que les scientifiques reconstituent peu à peu et qui débouche sur tout un monde.
(Musique)
Michel L'Hour
Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'un bateau, c'est un ensemble clos dans lequel vivent des humains, qui utilisent du matériel qui est produit à terre dans des fonderies, dans des usines, dans des lieux de production, c'est aussi des objets particuliers de la vie à bord, c'est des objets que l'on emporte sur soi. Ce que j'ai dans ma poche aujourd'hui, un marin, l'a, au XVIIe, dans sa poche, quand il est à bord. Ce bateau fait naufrage, c'est un ensemble clos, c'est Pompéi brutalement figé, le chaos, l'instant figé, quelques tentatives de récupération et puis tout ça s'éteint. Et aujourd'hui, au fond, qu'est-ce qu'on redécouvre ? C'est un monde entier au moment où il s'est arrêté. Et chacun de ces objets nous raconte une histoire. On va pouvoir reconstituer la vie des entre-pont, le côté confiné, les pièces d'artillerie, leur proximité, le poids, la vie. Il faut imaginer, dans un entre-pont, en pleine bataille navale ce que devait être la vie d'un matelot. Tout... la Natière permettra tout ça.
Karine Cevaer
Mais avant d'arriver à cette reconstitution destinée au futur musée maritime de Saint-Malo, il y a encore du pain sur la planche. Les canons, eux, n'ont pas révélé tous leurs secrets. Préalablement immergés dans un bain spécial pour fendre la gangue, ces objets vont encore devoir être dessalés, nettoyés, cirés. Rendez-vous dans plusieurs mois pour le prochain épisode de la Natière.