Jacques Lucas, scientifique académicien

09 janvier 2006
03m 56s
Réf. 00466

Notice

Résumé :

Jacques Lucas est chercheur et directeur du laboratoire Verres et Céramiques à l'Université Rennes 1. Depuis 22 ans, il réalise des travaux sur l'infrarouge, qui lui ont valu une certaine reconnaissance. A ce titre, il est élu à l'Académie des Sciences.

Date de diffusion :
09 janvier 2006
Source :
FR3 (Collection: JT Rennes soir )
Personnalité(s) :

Éclairage

Le 29 novembre 2005 est une consécration dans la carrière de Jacques Lucas, scientifique et ancien directeur du laboratoire "Verres et céramiques" de l'Université de Rennes 1. En effet le chercheur devient le second breton à recevoir son épée d'académicien des sciences. Bien qu'annoncé dans ce reportage comme étant le premier breton à siéger sous la coupole, Jacques Lucas a en fait été précédé par Bernard Kloareg, le directeur de la station biologique de Roscoff.

Ce sont ses travaux et recherches sur l'infrarouge - qui ont de multiples applications dans l'industrie, l'armement ou encore la santé - qui ont valu à Jacques Lucas les hommages de la communauté scientifique.

Né le 12 juin 1937, Jacques Lucas devient docteur ès science en 1964 et est nommé professeur à l'Université de Rennes en 1968. Il fonde au début des années 1970 le laboratoire "Verres et céramiques", dont il sera le directeur jusqu'en 2002 à l'Université de Rennes 1. Chimiste des solides, Jacques Lucas a découvert un nouveau type de verre, les verres fluorés, dont les propriétés optiques vont révolutionner les recherches sur l'infrarouge. Ces nouveaux verres intéressent rapidement les entreprises de télécommunications, car ils permettent la transmission optique de signaux telecoms sur de très longues distances. Jacques Lucas et son laboratoire signent également un partenariat avec la Direction Générale à l'Armement (DGA) pour développer des caméras de vision nocturne à infrarouge. Une technologie qui intéresse aujourd'hui l'industrie automobile pour améliorer la sécurité et la visibilité des véhicules.

Cette découverte fut aussi l'occasion pour Jacques Lucas et son collaborateur X.H Zhang, chercheur au CNRS, de créer une société d'exploitation de lentilles et de verres spéciaux, VERTEX, qui sera rachetée plus tard par une multinationale belge. Le développement de fibres optiques infrarouges très fines a été aussi l'occasion d'une collaboration avec un laboratoire rennais de l'INSERM, afin de développer cette technologie dans le cadre de l'imagerie infrarouge bio-médicale. La distinction académique de Jacques Lucas vient ainsi récompenser près de quarante années de travail du chercheur breton et de son équipe. Il est aujourd'hui professeur émérite à l'Université de Rennes 1 et "visiting professor" à l'université d'Arizona à Tucson.

Frédéric Martin

Transcription

Présentateur
Qui a dit qu'en France le monde de la recherche se portait mal ? Le parcours et le succès d'un professeur de l'université de Rennes I pourrait prouver le contraire. A 68 ans, Jacques Lucas vient d'être élu à l'Académie des sciences. C'est le premier Breton à obtenir cette consécration. Alors avant de le retrouver dans quelques instants, on va parler de ses travaux qui l'ont fait connaître dans le monde entier, des travaux qui tournent autour de l'infrarouge et qui connaissent aujourd'hui de nombreuses applications. On voit cela avec Antoine Placier et Patrick Soulabaille.
Jacques Lucas
Ça tu dis... alors ça donc c'est vrai que c'est la nouvelle génération de matériau infrarouge, mais peut-être que...
Antoine Placier
Des verres à infrarouge d'une puissance inégalée à ce jour, capables de voir bien au-delà de ce que l'oeil perçoit, voilà la découverte majeure de Jacques Lucas. Tout commence ici il y a 22 ans sur le campus Beaulieu à Rennes. Avec Zhang, son principal collaborateur, ils parviennent à mouler des blocs de verre noir. L'aventure peut alors réellement commencer.
Jacques Lucas
On avait découvert, dans les années 75, ce qu'on appelle les verres fluorés, mais qui n'ont pas ces propriétés de transparence infrarouge aussi grandes. Mais on savait, on était déjà... on avait déjà un pied dans le monde de l'infrarouge, quoi. Donc on avait déjà des contrats avec la DGA, avec l'armée, qui nous avait dit un jour : « Les gars si vous pouviez étendre le domaine spectral de vos verres, ça serait bien ». Et puis boum !
Antoine Placier
Boum ! Les deux hommes placent leurs maisons en gage pour lancer cette petite société spécialisée dans les lentilles à infrarouge. La démarche est rarissime pour l'époque. Un industriel belge a, depuis, massivement investi et repris l'entreprise. Caméras de vision nocturne, de surveillance, aujourd'hui, on les retrouve partout. Un célèbre constructeur automobile en a même commandé 50 000 pour son dernier modèle haut de gamme, un système capable de sauver des vies.
Yann Guimond
Et ça peut aller jusqu'à 300 mètres. C'est impressionnant. Vous voyez, moi, j'ai conduit cette voiture pour les tests et vous voyez un vélo sur le bord de la route à 150 mètres, 200 mètres, bien avant de le voir même quand vous êtes en plein phare. En plein phare où vous voyez des catadioptres et vous allez pas voir autre chose. Là vous allez voir le cycliste.
Antoine Placier
Retour au labo où réussite oblige, les financements affluent. Le professeur Lucas et son équipe peuvent ainsi continuer à explorer les incroyables possibilités qu'offre leur découverte. L'un des principaux chantiers, la signature infrarouge de la matière que les fibres de verre permettent d'établir, un peu comme une carte ADN version infrarouge.
Jacques Lucas
C'est ça la technique fibre, nous on appelle ça, c'est pour faire de l'analyse reculée, c'est-à-dire pour aller chercher de l'info dans des endroits un peu tordus, quoi. Et entre autres, à l'intérieur du corps.
Antoine Placier
Les pistes de travail sont, en effet, très prometteuses à l'INSERM de Rennes avec qui il avance main dans la main. D'éminents spécialistes des maladies du foie pensent même que les travaux du professeur Lucas permettront peut-être un jour de lutter plus efficacement contre le cancer.
Olivier Loréal
Il y a à la fois la possibilité d'utiliser cette nouvelle méthode à terme pour du dépistage, et donc de repérer, par une signature particulière, la survenue d'une pathologie avant qu'elle ne soit extrêmement importante et révélée par les examens classiques. C'est aussi la possibilité, lorsqu'elle est présente, d'en établir le stade de gravité et de prendre donc, à ce moment, des décisions thérapeutiques appropriées.
Antoine Placier
Pour le remercier, on lui a donné cette épée le 29 novembre 2005. Jacques Lucas est ainsi devenu le premier chercheur breton à faire son entrée à l'Académie des sciences.
Jacques Lucas
Ce qui prouve que dans le centre Bretagne on peut produire autre chose que des grenadiers et des organisateurs de vieilles charrues.
Antoine Placier
La gloire, les honneurs, à défaut de l'étourdir, semblent l'amuser. C'est vrai qu'on ne le dirait pas, mais à 67 ans, l'homme voit pourtant des étoiles par milliers. L'agence spatiale européenne lui a en effet demandé de participer à un projet hors norme : le lancement d'une sonde chargée de découvrir des traces de vie dans l'espace, peut-être, là, sa véritable consécration.