Le Théâtre Impérial de Compiègne

29 juin 1994
03m 50s
Réf. 00733

Notice

Résumé :

Pierre Jourdan raconte comment il a découvert le Théâtre Impérial de Compiègne, un bijou inachevé et oublié de l'architecture Napoléon III. Après les travaux de rénovation, il a créé son Théâtre Français de Musique pour le faire vivre. La caméra s'attarde sur les détails de décoration de la façade et de l'intérieur.

Type de média :
Date de diffusion :
29 juin 1994
Source :
France 3 (Collection: Estivales )
Personnalité(s) :

Éclairage

Ce reportage de juin 1994 expose très efficacement la résurrection d'un théâtre laissé inachevé pour des raisons historiques précises : la guerre de 1870 contre la Prusse. Il faut commencer par rappeler combien Compiègne fut, en France, la ville la plus continûment hospitalière à la royauté. Depuis les Mérovingiens mais surtout les Carolingiens (Charles le Chauve) qui en firent leur siège principal, jusqu'à Charles V bâtisseur d'un nouveau château à l'emplacement actuel, puis Louis XV qui compta en faire sa résidence et enfin Napoléon III, Compiègne aura vu passer toutes les lignées et figures de la monarchie nationale. C'est finalement Napoléon III qui devait donner ses lettres de noblesse au château où il entraîna la cour à passer un mois et demi chaque automne à partir de 1856.

Afin de ne pas faire de la chasse le seul divertissement, l'Empereur entreprit la construction d'un théâtre, face au château (3 rue Othenin) dont il confia les plans à l'architecte Gabriel-Auguste Ancelet. Lancés en 1867 les travaux furent interrompus par la défaite de Sedan en 1871, la destitution de l'Empereur et le désintérêt compréhensible de la IIIe République à l'égard de cet héritage impérial. Seul le gros œuvre, c'est à dire les murs et le plafond, ayant été achevés, la scène n'ayant reçu aucun décor, le bâtiment resta en l'état et tomba dans l'oubli pendant près de cent ans. En 1987 Pierre Jourdan, homme de théâtre, d'opéra et de cinéma (il est l'un des premiers à avoir filmé des pièces de théâtre), collaborateur de Jean Cocteau puis de Melina Mercouri et d'André Malraux, retrouve le bâtiment qui le séduit aussitôt. Il va en faire selon sa propre expression, l'œuvre de la fin d'une vie. Y abritant dès 1990 le Théâtre Français de la Musique, il redonne vie à l'instrument, en y assurant une programmation lyrique de tout premier plan. Dans ce théâtre à l'italienne de 816 places, véritable petit bijou acoustique, selon les artistes et les musiciens, il fait intervenir des orchestres et interprètes de très grande qualité. L'inauguration du théâtre a lieu en septembre 1991 avec Henry VIII de Camille Saint-Saëns. Après la disparition de Pierre Jourdan en 2007, c'est Eric Rouchaud l'actuel directeur qui assurera la programmation

Jacques Darras

Transcription

Olivier Montels
J’imagine que vous aimez le théâtre en tant que bon littéraire. Je vous emmène à Compiègne, au théâtre impérial. Vous connaissez peut-être. C’est une merveille qui a été commandée par Napoléon III pour être le symbole de son rayonnement. Malheureusement, ça n’a jamais été fini. Et ce théâtre n’avait jamais existé. C’est Pierre Jourdan, un fou de musique, qui, un jour, en est tombé complètement amoureux et qui lui a donné une nouvelle vie. C’est une très belle histoire. Voici la saga du théâtre impérial avec Pierre Jourdan dans le rôle du directeur, Corinne Péhau dans celui de la journaliste et Maria Callas. Regardez et écoutez.
(Musique)
Pierre Jourdan
C’est une anomalie, ce théâtre. C'est-à-dire que sous Napoléon III, Compiègne était donc la cour de l’empire. C’était le Versailles du Second Empire. Et on venait à Compiègne depuis le mois de septembre jusqu'au mois de novembre. Et toutes les semaines, l’empereur invitait les plus grandes personnalités du monde à Compiègne.
(Musique)
Corinne Péhau
Et c’est pour les dames aux grandes crinolines que Napoléon III demanda à l’architecte Ancelet de construire, en 1866, un grand théâtre impérial.
(Musique)
Pierre Jourdan
L’histoire est venue interrompre cette belle aventure. Et en 1870, c’est Sedan. L’empire disparait. L’empereur est prisonnier. Et on arrête les travaux inachevés de ce théâtre qui n’avait donc que son architecture générale et aucune finition faite. Il est certain que sous la IIIe république, disons que l’idée de Napoléon, de tout ça ne plaisait pas beaucoup et qu’on voulait oublier le Second Empire. On a fermé ce théâtre. Et ce théâtre est fermé et est resté fermé donc jamais inauguré, jamais utilisé, jamais fini pendant très très longtemps.
Corinne Péhau
Le théâtre est donc tout simplement oublié. Des années plus tard, Pierre Jourdan cherche un lieu pour créer son théâtre français de la musique. Nous sommes alors en 1988.
(Musique)
Pierre Jourdan
J’arrive devant le château et je cherche et je demande sur la place où est le théâtre. On me dit : « Il n’y a pas de théâtre, monsieur », en face. « Non, il n’y a pas de théâtre », « Ah bon ? », « Non, il n’y a pas de théâtre, monsieur, à Compiègne ». Alors bon, je rentre dans le château, et là je parle des responsables. On me dit : « Oui monsieur, il y a effectivement un théâtre mais il n’est pas visitable. D’abord, il est complètement fermé ».
(Musique)
Pierre Jourdan
Je dois dire que quand je suis arrivé, là, à cette porte et qu’on a ouvert la porte et que j’ai vu cet endroit extraordinaire, j’ai eu une telle émotion, une telle… Je me suis dit… Mais c’est la rencontre capitale d’une vie, ça. Et je me suis dit, en une seconde, j’ai pensé : « Je vais arrêter tout ce que je fais. Je vais définitivement consacrer la dernière partie de ma vie d’abord à amener ce théâtre à l’état de vie (puisque ce n’est pas le refaire revivre, il n’avait jamais vécu puisqu’il n’avait jamais ouvert). Donc c’est de l’amener à faire vivre ce théâtre et aussi à l’animer avec le théâtre français de la musique ».
(Musique)