Bilan et perspectives de l'aéroport de Beauvais

07 juin 1990
02m 36s
Réf. 00509

Notice

Résumé :

Bilan et perspectives de l'aéroport de Beauvais-Tillé qui voit passer 200 000 passagers par an essentiellement en charters. L'idée serait de transformer Tillé en aéroport complémentaire de ceux du Bourget et de Roissy. Pour M Dupont de la CCI Beauvais, cet aéroport doit être multiservices et peut être complémentaire de Roissy. Déjà les investisseurs s'intéressent à cette opportunité.

Date de diffusion :
07 juin 1990
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Éclairage

Le reportage conclut sur une prophétie qui voit "l'aéroport de Beauvais-Tillé comme un futur Roissy Charles de Gaulle en miniature". Or, Beauvais-Tillé est aujourd'hui le 9ème aéroport français sur le plan du trafic aérien de passagers avec 3,8 millions de passagers, juste devant l'aéroport de Nantes Atlantique. En 2013, six compagnies assurent des liaisons aériennes à partir de l'aéroport de Beauvais.

Construit puis ouvert durant les années 1930, avant d'être rapidement utilisé à des fins militaires durant la Seconde Guerre mondiale, l'aéroport devient finalement et véritablement un aéroport commercial en 1956. Si, durant les années 1960 et 1970, de petites compagnies aériennes britanniques, comme la Skyways Coach-Air Limited, assuraient des liaisons entre Beauvais et le Royaume-Uni, l'ouverture de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, inauguré en mars 1974, met en grande difficulté l'aéroport en provoquant une diminution de 75% de son trafic de passagers. Comme le mentionne le reportage, des compagnies charters assuraient également, dans les années 1980, des vols à destination de la Scandinavie, des îles britanniques, de l'Allemagne et des Pays-Bas. Si, en 1990, au moment de la réalisation du reportage, les projets de développement de la plate-forme aéroportuaire inscrivaient l'aéroport dans une complémentarité avec les autres aéroports franciliens, en jouant la carte d'un moindre coût d'escale pour attirer les compagnies aériennes, le processus de déréglementation du transport aérien en Europe, progressivement engagé par les autorités européennes, à partir de 1987 et achevé en 1997, va permettre à l'aéroport de Beauvais-Tillé de se développer à un rythme très soutenu grâce à l'installation de compagnies aériennes low-cost. Aujourd'hui, celles-ci assurent en effet 99,9% du trafic aérien annuel de l'aéroport. Parmi les différentes compagnies aériennes desservant actuellement l'aéroport, Ryanair occupe une place prépondérante et historique, car celle-ci a choisi, la première, de s'installer à l'aéroport de Beauvais-Tillé dès 1997 (en créant une première liaison aérienne entre Beauvais et Dublin) et a principalement contribué à son essor ; elle assure toujours aujourd'hui plus de 80% du trafic de l'aéroport.

Dans le paysage aéroportuaire du Bassin parisien, l'aéroport de Beauvais fait figure d'exception, puisque la puissance et la qualité de la desserte des deux principaux aéroports franciliens ont empêché le développement d'autres aéroports importants dans un rayon de 200 à 300 kilomètres. Cette exception s'explique par le développement du système des compagnies aériennes low cost dont le modèle repose, entre autres, sur l'utilisation d'un seul type d'avion, sur des liaisons "point à point", sur l'exploitation intensive des appareils par un court temps d'escale, sur un réseau de distribution des billets par internet et enfin sur le choix de desservir des aéroports secondaires autour des grandes villes, comme c'est le cas ici. Pour favoriser l'implantation de ce type de compagnies aériennes, les aéroports secondaires ont également pu proposer des tarifs d'escale ou un soutien marketing, considéré depuis par la Commission Européenne comme une subvention déguisée.

Propriété de l'État jusqu'en 2007, la plate forme aéroportuaire était gérée par la Chambre de Commerce et d'Industrie (CCI) de l'Oise jusqu'en 2008. La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (article 28) et la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports, a transféré aux collectivités territoriales ou à leurs groupements, la propriété, l'aménagement, l'entretien et la gestion des aéroports, à l'exception des aéroports à vocation nationale ou internationale, listés par le décret du 24 août 2005 et qui ont été exclus du processus de décentralisation. Malgré l'importance de son trafic, l'aéroport de Beauvais-Tillé ne figure pas sur cette liste. Il est donc devenu, depuis mars 2007, au terme du processus de décentralisation et de transfert du domaine aéroportuaire, la propriété du Syndicat Mixte de l'Aéroport de Beauvais-Tillé (SMABT). Composé des collectivités locales (conseil régional de Picardie, conseil général de l'Oise et Communauté d'agglomération du Beauvaisis), le SMABT a, par ailleurs, délégué depuis 2008 et pour une durée de quinze ans, la gestion et l'exploitation de l'aéroport à la SAGEB, société détenue à 51% par la CCI de l'Oise et à 49% par Veolia Transport.

Même s'il est difficile d'évaluer précisément les effets économiques d'une infrastructure de transport comme un aéroport, l'organisation professionnelle des équipements aéroportuaires estime généralement qu'une plateforme aéroportuaire engendre, en moyenne, 1000 emplois directs pour chaque million de passagers. A Beauvais, l'essentiel des voyageurs sont en transit et se dirigent (ou sont originaires) de l'agglomération parisienne, reliée à la plate forme aéroportuaire par l'intermédiaire d'un système de navettes par autocars circulant sur le réseau autoroutier. La compagnie aérienne Ryanair, elle-même, appelle l'aéroport "Paris-Beauvais", ce qui souligne la proximité et la zone de chalandise surtout francilienne de l'aéroport.

En définitive, l'aéroport de Beauvais joue aujourd'hui de facto, sur certains plans, le rôle de troisième aéroport parisien dont le projet de construction a suscité de vifs débats à partir du milieu des années 1990.

Pierre-Jacques Olagnier

Transcription

Thierry Bonté
Devenir la plate-forme aéroportuaire la plus proche de la capitale, telle est l’ambition des responsables de l’aéroport de Beauvais Tillé. A l’heure où l’on parle de déréglementation du marché aérien, d’extension des lignes et d’aéroport international en Picardie. L’Oise veut donc se donner les moyens d’une telle alternative. Pourquoi pas ? Puisque l’aéroport fonctionne bien et qu’il pourrait agir en complémentarité avec les grands aéroports parisiens.
Ronan Ponnet
L’Oise a un seul aéroport de trafic international, celui de Beauvais. Un aéroport qui a un beau bilan : 200 000 passagers par an, des charters qui viennent de l’Europe du nord, Scandinavie, Pays-Bas, Allemagne, Angleterre. Cela pourrait être satisfaisant. Une fréquentation en hausse de 15 %. Un chiffre d’affaires de 8 millions de francs. Un déficit annuel qui dépasse un million de francs et qui est couvert chaque année par des subventions. Une situation ordinaire pour un aéroport ordinaire. Mais voilà, à Beauvais, on a des idées. Cette piste est la plus proche de Paris. Et le projet a germé. En jouant le jeu des aéroports de Paris, pourquoi ne pas devenir un aérodrome complémentaire de Roissy-Charles de Gaulle et du Bourget ? Un aérodrome qui accueillerait des vols internationaux, qui servirait de station service et de base d’entretien pour avions. Un aéroport proche de Paris mais beaucoup moins cher que les autres.
M. Dupont
Ça doit être un aéroport multi service. Je dois dire que le monde du transport aérien est en pleine mutation dans un monde économique en pleine mutation, et il est évident que nous ne pouvons pas, aujourd'hui… il serait présomptueux d’imaginer une cible précise. Ce que nous savons aujourd'hui, ce que nous avons comme conviction, c’est que l’aéroport de Beauvais Tillé, je répète, tant par sa situation géographique, tant par ses infrastructures et tant aussi par la dynamique apportée par la CCI et l’ensemble de ses partenaires, nous sommes sûrs qu’à 45 minutes de Roissy-Charles de Gaulle, nous avons la possibilité d’apporter un certain nombre de services complémentaires à l’aéroport de Paris.
Ronan Ponnet
Pas si utopiste que cela. Le groupe Hachette et Jean-Luc Lagardère sont prêts à investir dans une zone détaxée sur l’aéroport. Des compagnies aériennes jettent un oeil intéressé sur cette piste qui peut accueillir des gros porteurs et qui sera à ¾ d’heure de Paris par l’autoroute, en 1994. L’aéroport de Beauvais est une belle carte dans le développement économique de l’Oise. Et après tout, vu l’aménagement et l’extension de la région parisienne, il se pourrait bien que Beauvais Airport, d’ici une dizaine d’années, prenne des allures de Roissy-Charles de Gaulle en miniature.